Ça y est, Animal Crossing New Horizons a déjà un an (ou 7 ans en âge de chien, 25 ans en âge de Covid et une Snyder’s cut de Justice League). En 12 mois d’une année pas comme les autres (mais nous y reviendrons) le jeu s’est vendu à plus de 31 millions d’unités (dont 7 millions en Europe), s’approchant doucement du total cumulé des autres jeux de la franchise. Autant vous dire que la vie est belle pour Tom Nook qui nage tranquillement dans sa piscine de clochettes. Mais ce succès est-il mérité ? Animal Crossing a-t-il réussi (à nouveau) son pari de jeu qui se savoure sur la durée, par doses modérées ?
Revenons un peu en arrière si vous le voulez bien. Nous sommes le 20 mars 2020, cela fait 3 jours que le pays est entré dans son premier confinement (vous savez, celui qui a eu de réels effets) et Nintendo débarque avec Animal Crossing New Horizons, exclusivité de la Switch et jeu déjà annoncé comme meilleur compagnon de cette longue période qui s’annonce (à tel point que les meilleures théories du complot émergent, des théories jamais officiellement démenties par Nintendo au passage…).
Je lance le jeu dès qu’il est disponible, à minuit, histoire de profiter d’un premier jour in-game avant le changement de journée à 5 heures du matin (un move effectué par une partie des joueurs et qui va créer une première dissension dans la communauté, ces derniers ayant accès à certains bâtiments un jour plus tôt). Et rapidement, je (je dis « je » mais en fait c’est plutôt « nous » puisque nous sommes 2 sur la partie avec ma chère et tendre, de quoi justifier les 600 heures qu’on a sur le jeu…) vais me faire emporter par l’histoire que souhaite me raconter Tom Nook et ses amis.
Père Tanuki, raconte-nous une histoire
L’île sur laquelle j’ai choisi de débarquer, rapidement renommée Cocolint, ne semble attendre que mon intervention pour être transformée en petit paradis pour animaux et humains en quête de tranquillité. Mais Rome ne s’est pas faite en un jour et le jeu, par l’entremise de Tom, est là pour nous le rappeler.
Animal Crossing New Horizons se présente initialement comme un jeu où il faut accepter de prendre son temps. Bien sûr, les premiers jours, il y a beaucoup de choses que l’on peut faire (et bien plus qu’on voudrait pouvoir faire), mais le jeu va nous imposer son rythme. Vous voulez avoir tout de suite accès au musée où vous pourrez entreposer les différents insectes et poissons attrapés ? Il vous faudra déjà récupérer les matériaux nécessaires et aider au financement de ce dernier, des choses que vous ne pourrez pas forcément obtenir en un jour. Et même si c’est le cas, il vous faudra ensuite attendre 2 jours pour voir le fameux bâtiment sortir de terre. Il en va de même pour les habitations qui pourront accueillir vos futurs résidents (ces derniers qu’il vous faudra d’ailleurs rencontrer au préalable en allant visiter d’autres îles).
Oui votre but premier est « d’améliorer » votre île en y installant de nouveaux habitants, des boutiques et en agençant le tout de manière plus ou moins harmonieuse (les goûts et les couleurs vous savez…), mais le jeu dans sa première partie sera toujours là pour vous rappeler qu’il est nécessaire de prendre votre temps. Rien ne presse, il n’y a aucun timer qui va vous déclarer perdant si vous n’avez pas tout réalisé avant une certaine date. Chacune de vos avancées, que ce soit l’arrivée d’une nouvelle personne, l’agrandissement de votre maison (après le paiement d’un prêt exorbitant, il n’y a pas de petit profit) ou même la construction d’un pont, ne se fait pas dans la seconde et est surtout l’occasion de célébrer avec vos amis virtuels.
Alors bien sûr on est parfois frustré de devoir attendre le lendemain pour obtenir une nouvelle possibilité de personnalisation, encore plus peut-être quand on commence à avoir un plan précis en tête nécessitant la construction de plusieurs ponts et bâtiments et que l’on sait que le jeu va nous demander de tout échelonner dans les temps. Mais Animal Crossing New Horizons, comme ses prédécesseurs, est fait pour se jouer sur la durée et c’est ici sa manière de nous le faire comprendre.
C’est finalement le versant communautaire qui a sans doute posé le plus problème au jeu concernant cette démarche d’attente. En effet, qu’il était difficile (et parfois presque décourageant pour certains) de débarquer sur l’île d’un autre joueur et d’y voir des choses que l’on ne pouvait faire encore sur la sienne. S’est d’ailleurs posé le débat des time-travellers, qui, en avançant leur console dans le temps, pouvaient facilement enchaîner les journées et ainsi tout débloquer rapidement.
Aucun jugement sur ces derniers à faire, je reste dans l’idée que chacun peut jouer de la manière qu’il préfère, même si cela semble aller à l’encontre de l’idée principale du jeu. Personnellement, j’en ai profité pour y voir une fenêtre sur le futur, m’inspirer de ce que je voyais pour prévoir mes futurs agencements : c’est aussi ça le partage sur Animal Crossing.
Mais voilà, arrive le moment où on atteint le nombre maximum d’habitants sur notre île, où les différents bâtiments sont construits et où Kéké débarque sur notre île pour y jouer sa musique et déclencher le générique de fin d’un jeu qui nous a raconté son histoire. Que faire alors ?
Un jeu comme canevas de vos inspirations
Il est temps de créer la vôtre. Animal Crossing New Horizons vous a donné les bases. Vous savez maintenant comment placer et déplacer vos habitants et bâtiments, où et comment trouver les matériaux. Il est temps maintenant de laisser prendre les commandes à votre imagination. Le jeu va même vous aider en vous donnant la possibilité de modifier en partie votre île ! Cette colline ne vous arrange pas à cet endroit ? Vous pouvez supprimer un étage de votre île et le mettre ailleurs. Vous voulez plus d’eau ? Construisez une cascade débouchant sur un étang où vous pourrez pêcher toute la journée et à côté duquel vous pourrez faire un coin à pique-nique.
Alors bien entendu, l’outil n’est pas parfait, il a des limites et surtout n’est pas toujours évident à manier, la faute au fait d’avoir voulu que le villageois incarné par le joueur fasse lui-même les travaux au lieu de mettre en place un système plus simple avec un simple curseur modifiant le terrain selon les besoins. Mais on finit par maîtriser les possibilités et façonner son île comme on le souhaite. Mieux encore, vous pouvez faire vos propres designs à appliquer au sol histoire d’aller plus loin que le simple sol « terre » ou « herbeux ». Et si vous manquez de talent pour le faire vous-même, la communauté est toujours là pour vous proposer de jolis motifs (et autres excentricités) à appliquer sur votre île et sur vos vêtements.
C’est grâce à cela que j’ai pu obtenir l’île que je souhaitais, subtil mélange entre la nature et la ville avec ses chemins de pierre, son coin pour les sportifs, son jardin suspendu et son spa pour des moments de détente au bord d’une rivière en hauteur.
Mais laisser son imagination prendre le contrôle, c’est aussi donner plus de vie aux habitants de son île. Eux qui sont si serviables et adorables mais qui manquent parfois cruellement de personnalité. C’est ainsi que Flèche, ce taureau aux yeux rouge sang qui me faisait juste peur (en vrai c’est un amour) s’est retrouvé être mon personnage préféré une fois que j’ai pu installer sa maison dans un coin de l’île en hauteur tout en fabriquant un labyrinthe en pierre juste devant chez lui. De la même manière, c’est en faisant un coin à l’écart et en rapprochant deux maisons que j’ai pu décréter qu’Octave le poulpe et Sophie l’autruche vivaient à présent un amour passionnel (une relation purement dans mon esprit, il n’y a aucun moyen de matérialiser ce dernier dans le jeu).
On se retrouve face à la situation d’une grande salle remplie de Lego. Il y a les gens qui feront uniquement ce qu’ils vont pouvoir voir sur les boites et s’arrêteront là, contents (et à raison) de ce qu’ils ont accompli. Et il y a ceux qui laisseront partir leur imagination, créant des situations, rajoutant des éléments qui ne vont à priori pas ensemble, pour inventer leur propre histoire et donnant ainsi plus de vie à l’ensemble. À noter tout de même que, dans le cas d’Animal Crossing, s’arrêter au générique revient non seulement à se priver de certaines fonctionnalités, mais aussi à ne pas profiter pleinement de ce que le jeu a à offrir.
Évidemment, libre aux joueurs de décider de tout refaire parce que l’île ne convient plus à ce qu’ils veulent ou par pur plaisir du changement. Animal Crossing New Horizons a su rajouter du contenu tout au long de l’année en fonction des saisons et des fêtes pour laisser libre cours à l’imagination des joueurs. De quoi refaire pour la 6ème fois son salon ou installer tout ce qu’il faut sur la plage pour préparer un mariage sous un soleil couchant.
Tout ce que propose le jeu, que ce soit à travers l’histoire qu’il veut nous raconter comme celle qu’il nous laisse créer, fait que cette première année sur Cocolint restera un excellent souvenir. Bien sûr il y a eu des périodes où la console a été allumée uniquement pour récupérer les quelques objets du jour et enlever les mauvaises herbes, mais en cherchant bien, il y a toujours quelque chose à créer/améliorer/réinventer si l’envie est là. Reste maintenant à savoir si cette année sur cette île loin de tout aurait été différente si elle ne s’était pas déroulée en 2020.
Un rêve en temps de pandémie
Comme dit au début, Animal Crossing New Horizons s’est très bien vendu. Est-ce qu’il aurait été un succès en temps normal ? Oui. La Nintendo Switch se vendait déjà avant comme des petits pains et le train de la hype sur le jeu était déjà bien lancé. Mais, même si l’on ne pourra jamais faire une estimation précise, la pandémie qui a touché le monde (et continue de le toucher d’ailleurs je sais pas si vous le savez…), a joué un rôle dans son succès.
Et comment pouvait-il en être autrement. Le jeu propose à ses joueurs de venir s’installer sur une île paradisiaque et d’y faire ce que bon leur semble en solo ou avec des amis, ces mêmes amis qu’ils ne peuvent pas voir dans la vraie vie. Et c’est sans compter sur les différentes communautés qui se sont formées rapidement sur des forums ou Discord pour se donner des bons plans (littéralement, je pense ici aux plans de construction de certains objets), inviter de parfaits inconnus à visiter notre île pour y puiser de l’inspiration ou pour vendre les fameux navets et leur système boursier fou (ici encore le jeu était en avance sur son temps). La pandémie (et son confinement) était l’assurance qu’à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, quelqu’un était disponible pour venir vous voir ou vous inviter.
Le succès du jeu aidant, Animal Crossing est devenu aussi un lieu de rassemblement que ce soit pour les amis donc mais aussi de manière plus inattendue pour des manifestations (je pense ici notamment à celles contre le gouvernement chinois) ou encore pour des visites de musées fermés dans la vraie vie de la réalité véritable. Le jeu a enfin été l’occasion de fêter des anniversaires pour certains, mais aussi des mariages annulés et même de célébrer le Ramadan.
J’éviterai de passer sous silence les abus qu’il y a pu y avoir. Je pense notamment aux trafics de navets avec des gens demandant des sommes énormes ou des objets spécifiques en échange du prix de vente des navets sur leur île, ou encore à ces personnes invitées qui saccagent toutes les plantes. Mais je préfère me concentrer sur tous les bons moments, que ce soit ceux d’entraide pour récupérer des plans ou des objets mais aussi ceux de découverte et de partage, les chasses au trésor et autres parties de pêche.
Ce qui est certain, c’est que l’influence qu’a eu la pandémie sur le jeu est telle qu’une personne se lançant aujourd’hui dans l’aventure New Horizons ne vivra pas la même expérience qu’une personne l’ayant fait l’année dernière, et ce au-delà même du simple fait d’avoir raté le train de la hype au lancement du jeu.
Est-ce que j’avais prévu de passer autant de temps sur Animal Crossing New Horizons ? Pas du tout. Et pourtant, un an après, je ne regrette pas un seul moment, le jeu a été la parenthèse feelgood idéalement tombée au milieu d’une année 2020 difficile. Reste à savoir comment va évoluer le jeu dans sa 2ème année qui comportera nécessairement des redites sur ses évènements (je pense particulièrement à toi Albin le lapin de la fête des œufs je sais que tu arrives…). Dans tous les cas, en un an, Tom Nook et sa bande auront plus que réussi leur pari. D’ailleurs si vous voulez bien m’excuser j’ai une piscine à construire pour mon nouveau coin détente…
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