Nous sommes au milieu des années 1990, le jeune et innocent Murray passe une grosse partie de son temps libre sur la Gameboy de son frère (oui à l’époque c’est la Gameboy, il est innocent, je le rappelle). Il n’a alors qu’une obsession : finir encore et encore The Legend of Zelda : Link’s Awakening. Il n’est arrêté dans sa tâche que par l’usure des piles rechargeables et par le mal au cœur qu’il a à force de vouloir finir le 7ème donjon pendant un trajet en voiture. Autant vous dire qu’en début d’année 2019, quand le remake Switch de ce classique a été annoncé, le maintenant vieux et aigri Murray a senti battre à nouveau son cœur très fort (mais c’était peut-être juste une artère qui se bouchait).
33 ans sont passés depuis le début des aventures de Link et presque autant de temps depuis que les fans se déchirent pour savoir quel est le meilleur épisode de la franchise. Si certains mélangent l’intégralité des titres, d’autres séparent ceux en 3D de ceux vus du dessus. Et si l’on s’écharpe éternellement sur la place d’un Majora’s Mask face à un Ocarina of Time ou un Link to the past, un titre semble toujours rassembler tout ce beau monde : Link’s Awakening. Ce premier opus sur console portable n’est pas forcément tout en haut des listes, mais il est quasiment toujours dans le top 3, lui et son histoire bien séparée du reste de la franchise, sans Zelda ni triforce. Bien que toujours jouable, notamment sur la presque défunte 3DS dans sa version DX rajoutant un donjon et de la couleur, Nintendo a décidé de lui donner un coup de jeune et, on va pas se mentir, ce n’est pas pour me déplaire.
Même joueur, même histoire, nouveau décor
Passer de la Gameboy (promis je vais alterner pour faire plaisir à tout le monde) à la Switch (non je ne vais pas alterner par contre avec celle-là), c’est quand même quelque chose. La cinématique d’introduction, devenue un vrai petit dessin-animé (mais pas celui-là, rassurez-vous), et qui permet de voir un Link à la lutte contre les éléments sur son radeau de fortune, donne le ton avant de laisser place aux nouveaux graphismes éclatant de couleurs et qui détonent par rapport au noir et blanc avec des teintes de vert du Gameboy.
Bien sûr les images changent, mais on garde les bonnes vieilles habitudes. On commence par renommer son Link en Zelda dans le menu principal, ce qui permet d’entendre une petite musique différente, plus guillerette (et on s’étonne après que les gens mélangent les deux persos), et puis on se retrouve à nouveau échoué sur cette plage de l’île Cocolint, recueilli par la belle Marine et le marioesque Tarkin avant de partir à l’aventure. Vous qui avez déjà fait le jeu, aucune surprise ne vous attend, l’histoire est la même, de même pour la carte refaite à l’identique à 99,9%.
En revanche, si vous n’avez jamais touché au jeu d’origine, bienvenue dans une histoire extraordinaire sur l’île Cocolint, où vous devrez réveiller le Poisson-Rêve. Il vous faudra pour cela récupérer différents instruments au fin fond de chacun des 8 donjons principaux du jeu (accompagnés d’un 9ème, venu de l’édition DX permettant d’obtenir un bonus supplémentaire pour votre personnage). La progression est assez linéaire à première vue : vous devrez récupérer la clé du donjon avant d’entrer dedans, de le fouiller complètement et ainsi de trouver un nouvel objet facilitant votre quête et vous permettant de battre le boss, puis de récupérer l’instrument du donjon, avant de passer au suivant et ainsi de suite. Mais derrière cette simplicité se cache en réalité beaucoup d’exploration, d’énigmes, de collectes de quarts de cœur, et d’une quête d’échange d’objets qui vous fera vous balader aux quatre coins de la carte et rencontrer un paquet d’habitants de l’île.
Je n’irai pas plus loin concernant l’histoire elle-même, si ce n’est pour vous dire qu’elle est toujours aussi belle et mélancolique, nous faisant regretter d’arriver à son terme au bout des 8 à 10 heures (allez 11h si vous êtes nouveau) d’aventure qui vous attendent.
Mais revenons à notre comparatif Gameboy/Switch pour simplement dire : que cette idée de diorama est réussie. Je ne suis pas persuadé qu’une telle idée aurait marché avec d’autres jeux de la franchise, y compris le duo Oracle of Seasons/Ages, jeux basés pourtant en grande partie sur ce qui avait été fait pour Link’s Awakening (faites-moi mentir Nintendo, c'est quand vous voulez), mais il colle parfaitement à l’univers de l’île Cocolint.
Et que dire des réinterprétations musicales faites par Ryo Nagamatsu, qui a dû sentir une énorme pression à l’idée de toucher à des morceaux devenus cultes et qui a, malgré tout, réussi à s’en sortir avec brio. Je m’en voudrais d’oublier le travail effectué sur les bruitages du jeu, notamment les cris du héros se noyant, beaucoup trop amusants pour ne pas l’avoir fait exprès une ou deux fois, et surtout le bruit des pas lors de l’utilisation des bottes de Pégase (permettant d’avancer plus vite et de briser certains objets), d’ores et déjà bruit le plus mignon et agréable à l’oreille de 2019.
C’est ça le progrès…
Ce Link’s Awakening Switch Edition, bien qu’étant une copie dans sa structure de l’épisode Gameboy, ne s’est pas contenté de changer ses graphismes, il en a aussi profité pour gommer les quelques petits défauts du jeu original. Et oui, fini le jeu Gameboy divisé case par case (sauf pour les donjons), bienvenue le monde ouvert où vous pouvez courir sur de longues distances sans être arrêté par un changement d’écran au bout de 2 secondes.
Malheureusement tout n’est pas parfait dans ce nouveau monde de couleurs. La faute à un effet flou au niveau des bords de l’écran qui, même si on s’y habitue rapidement, est un peu trop accentué. La faute aussi à des ralentissements survenant assez aléatoirement (et surtout avec la Switch dockée). Rien qui ne gâchera complètement votre expérience, mais assez pour être noté.
Au-delà des améliorations techniques dues à une console (légèrement) plus puissante que son ancêtre, Nintendo en a profité pour améliorer certains pans du gameplay. La première (très) bonne nouvelle, c’est que la Switch a plus de boutons que son ainée qui n’avait que le A et le B. Du coup, cette fois-ci votre épée et votre bouclier sont assignés directement aux gâchettes, tandis que vous bénéficiez toujours de deux boutons pour assigner deux objets parmi la grosse dizaine que vous allez récupérer pendant votre aventure. Et ici encore le studio Grezzo en charge du remake a été malin, certains objets comme le bracelet de force vous permettant de soulever des rochers sont équipés constamment, vous évitant ainsi de devoir passer par le menu pour les mettre comme c’était le cas en 1993.
Rajoutez à cela une multiplication des téléporteurs sur la carte qui passent de 4 à une dizaine, une augmentation du nombre de rubis que vous pouvez avoir sur vous à chaque instant (ah… adieu la limite des 999 rubis), l’apparition de bocaux pouvant contenir des fées et vous obtenez un jeu mieux optimisé mais aussi, il faut l’avouer, plus facile (bien qu’il bénéficie d’un mode plus difficile dans lequel l’apparition des cœurs est limitée).
Du contenu supplémentaire ? Quel contenu ?
Je m’en veux de finir par ce point, mais il me faut l’aborder : je veux bien sûr parler de ce qui aurait dû être l’ajout principal à ce jeu, à savoir son mode « Zelda Maker ». Il était attendu presque comme le messie, certains (dont possiblement moi…), voyant en lui un équivalent à Mario Maker, mais avec des donjons labyrinthiques, des coffres à ouvrir et des boss, mais il n’en est rien.
Non, vous ne pourrez pas créer sur mesure votre propre donjon et le partager au monde entier. À la place, vous avez la possibilité d’utiliser des tuiles, en réalité des cases des donjons finis dans le jeu, pour créer votre propre niveau qui ne sera donc en réalité qu’un patchwork de cases déjà visitées durant votre aventure. Un donjon donc sans réelle âme où une case remplie de lave va côtoyer une case remplie d’eau, où vous n’aurez pas vraiment de contrôle sur quel escalier mène à quel autre et où, au final le plus amusant, plutôt que de créer son propre donjon, résoudre les défis proposés par Igor, votre interlocuteur dans cette partie. Mais cela reste un amusement disons… limité.
Un coup de Master Sword dans l’eau donc pour un jeu qui, de base, n’en avait surement pas besoin. On espère simplement que la firme nippone saura comprendre le problème et pourra un jour proposer à ses joueurs un réel Zelda Maker, qui, vu l’engouement suscité chez les joueurs quand ils pensaient en avoir un dans ce Link’s Awakening, serait sans aucun doute un franc succès.
Alors on l’achète ou pas ce The Legend of Zelda : Link’s Awakening ? Si vous ne l’avez jamais fait, vous devriez déjà vous diriger vers votre magasin le plus proche. Si vous avez déjà eu l’occasion de le faire dans sa version Gameboy, personne ne vous jugera si vous voulez replonger dans le monde du Poisson-Rêve tant ce remake est réussi. Mais si vous voulez attendre qu’il baisse un peu de prix, on ne vous jugera pas non plus, c’est promis.
Murray
J'aime me prendre la tête, mais uniquement quand c'est dans un jeu vidéo. Sinon j'aime aussi la vie, mais ce n'est pas un amour réciproque.
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