Après plus d’un an de quasi-absence de communication, de maigres trailers et d’un report au mois de février, le nouveau FromSoftware Elden Ring nous a finalement laissé poser nos mains dessus, le temps d’une beta fragmentée en cinq sessions – dont deux sur un créneau de 4h à 7h du matin, j’espère que vous appréciez notre abnégation. Et si la présence de George R.R. Martin à l’écriture, le marketing nébuleux et le passage en open world me laissaient personnellement perplexe, force est de constater que la grosse dizaine d’heures passée sur la preview m’ont plus que rassuré, et que j’attends désormais la sortie définitive avec la plus grande impatience.
Elden Ring se pose ainsi comme une suite très logique dans l’évolution de FromSoftware et de ses Soulsbornes en termes de mécaniques, de genre, de structure, de narration et d’esthétique, tout en se rappelant que l’exceptionnel hiatus Sekiro est passé par là. Du pur jeu d’action qu’était leur précédent titre, FromSoft a conservé son approche accueillante – bien que très difficile, ce dernier se montrait plus taquin que réellement méchant et plaçait son exigence dans le système de combat/danse, là où les Soulsbornes aimaient les embuscades sauvages et les séquences punitives – et sa maniabilité plus fluide et nerveuse ; pour retourner sur la base de dark fantasy et de RPG chère au studio, cependant intelligemment repensée pour l’open world.
Reach out, touch grace
Ce qui frappe en premier lieu, c’est à quel point Elden Ring reprend la base d’un Dark Souls. Le choix de sa classe est toujours autant obscur – à moins de connaître parfaitement les effets de chaque statistique, qui, par chance, sont globalement les mêmes que dans les titres précédents – , l’arrivée dans le monde est accompagnée d’un minimum d’explications (mention spéciale au tuto caché au fond d’un trou), les NPC parlent toujours en énigmes, et la grande majorité des mécaniques restent parfaitement similaires, leur renommage faisant office de moustache à peine collée. La fiole d’Estus devient la fiole de larmes (pourpres pour le regain de santé, bleu ciel pour la magie), les feux de camps deviennent des sites de grâce, les âmes ont cédé la place aux runes, la Fire Keeper est remplacée par Melina pour les passages de niveaux, les menus, inventaires et feuilles de statistiques sont toujours exactement les mêmes – c’est-à-dire très peu ergonomiques – bref, vous l’aurez compris : pour peu qu’on ait déjà touché à un Dark Souls ou un Bloodborne, on est totalement à la maison.
Sauf que la maison a été complètement retapée et agrandie, et que si les mécaniques de base demeurent intactes, des changements majeurs dans la philosophie du studio, cependant indispensables pour l’open world, font leur apparition. Dans les plus flagrants, on notera l’arrivée d’une carte, ainsi que de petits filets de vent dorés, indiquant la position des prochains feux de camp sites de grâce, et de statues permettant de réapparaître quasi à côté des combats de boss, qui, malgré les craintes d’un open world à la Ubi, ne dénaturent en aucun cas l’exploration très organique et gratifiante de la recette FromSoftware, et ne servent globalement qu’à faire du voyage rapide entre les sites de grâce, et trouver le point de sauvegarde le plus proche au lieu de mourir bêtement. Ainsi, rassurez-vous : on erre toujours autant, il y a toujours autant d’embranchements, de passages secrets, de mystères dans Elden Ring, et j’ai continué de trouver des escaliers cachés, des entrées de grottes, des boss secondaires, des donjons, des coffres dans des zones pourtant explorées à de nombreuses reprises. Si la carte peut s’avérer utile, FromSoft conserve le level design virtuose qui a fait sa renommée. Ainsi, on n’est jamais réellement perdu, tant chaque recoin est reconnaissable et marquant, et, une fois rendu sur les murailles du château, contemplant les plaines et collines qui s’étendaient à perte de vue, j’ai pu mesurer le chemin parcouru, comme ça avait pu m’arriver maintes fois sur Dark Souls 3 ou Bloodborne. Un sentiment incroyable, qu’aucune carte, aucun filet doré, aucune aide ou accessibilité ne pourront retirer (donc laissez les cartes svp, ça n’enlève rien au génie de conception qu’est l’univers, ça le rend juste moins frustrant).
Tout aussi étonnant, c’est l’arrivée d’un cheval – un cheval-vache ? un chevache ? – dans les zones ouvertes, permettant de parcourir de larges distances rapidement, mais aussi de combattre. Un aspect pour le coup un peu moins réussi, puisque questions maniabilité et caméra c’est parfois la foire : on tourne régulièrement autour de mobs sans vraiment réussir à les toucher, il faut jongler entre son soin et le soin de son destrier, on se coince de manière parfois dramatique dans des cailloux ou buissons durant un combat de boss et le système d’équipement d’armes – on ne peut utiliser que sa main droite dans cette situation – peut s’avérer assez contraignant dans le cas d’une build magie avec un bâton dans une main et une épée/lance dans l’autre. Combat mis à part, les plaines et plages pouvant être assez étendues – mais loin d’être vides -, la présence d’une monture reste une très bonne idée, et se trouve franchement bien intégrée dans nombres de séquences pensées et conçues pour.
Bien plus qu’un Dark Souls avec une fausse moustache
Mais ces nouveautés font pratiquement figure de cosmétiques face à d’autres ajouts bien plus discrets – voire faciles à rater si on n’explore pas suffisamment les menus ou que l’on ne parle pas aux bons NPC – et qui pourtant affectent le gameplay en profondeur. Je pense particulièrement à cette notion de cendres de guerre, que l’on pourra placer sur nos armes en se reposant aux sites de grâce. Loin d’être un détail, ces cendres se trouvent être un aspect majeur dans la construction de sa build, et placer la bonne cendre sur la bonne arme pour la bonne séquence pourra totalement renverser le cours d’un combat compliqué. Ces cendres se trouveront en explorant ou en abattant des boss et mini boss, et changeront drastiquement les stats de nos armes, ajoutant ou enlevant des dégâts physiques, pour conférer un pouvoir précis assigné à l’équipement. Ainsi, on pourra attribuer un coup d’estoc surpuissant à une épée, invoquer des épées fantômes, de la foudre, permettre à notre bouclier d’invoquer une zone de soin et de ce fait modifier en profondeur la manière d’aborder un boss ou un ennemi particulièrement puissant. Les sites de grâce étant souvent bien placés, il sera aisé d’expérimenter les différentes cendres sur un même boss et voir laquelle convient le mieux pour cet affrontement.
C’est également le cas pour les invocations, que l’on pourra acheter ou trouver un peu partout, et qui permettent dans des endroits précis de se faire accompagner de loups ou autres méduses fantomatiques, pas spécialement puissants, mais terriblement pratiques pour occuper ses adversaires, et une assez bonne alternative à l’invocation de joueurs·euses. Ainsi, en plus des traditionnelles classes de départ, des assignations de points de compétences dans les stats et des choix d’armements lourds ou légers, d’armes à deux mains, de boucliers ou sceptres magiques, il faudra composer sa build avec ces mécaniques de cendres et d’invocations, permettant une construction de personnage bien plus flexible et adaptable aux situations.
On s’attardera un peu moins sur le craft, également facile à rater si l’on n’a pas la curiosité de fouiller l’inventaire du marchand, et un peu plus anecdotique, mais qui remue tout de même l’approche des consommables par FromSoft. Là où il fallait trouver et/ou acheter ces objets dans les précédents titres, que ce soient des consommables de soin ou de buff, il sera ici possible de les fabriquer soi-même, en ramassant au préalable ses ingrédients dans la nature. C’est une mécanique qui généralement me gave, ou me passe au-dessus, et que j’avais à la base prévu d’ignorer. Cependant, la récolte de fleurs, graines, ossements et compagnie se faisant très naturellement et rapidement, je me suis retrouvé sans forcer à parcourir le menu de craft et à constater les avantages non négligeables que constituait cet aspect du gameplay. Armes enflammées, soin du cheval, amulettes d’invocations de joueurs : on pourra très certainement faire sans, mais ces objets se sont trouvés être d’une aide certaine à de nombreuses reprises.
Et techniquement ?
Testé sur PS4 pro, le titre n’a pas tellement à rougir face aux versions next gen d’un point de vue visuel : les textures restent globalement du même acabit – c’est-à-dire plutôt moyen, les jeux FromSoft ayant plus l’habitude de briller sur le plan artistique que sur leur finesse graphique et technique. C’est du côté FPS que la différence se ressent surtout, et les 30 images par seconde se font parfois sentir, sans que cela ne soit trop pénalisant pour autant – c’est bon, si on joue sur consoles depuis un moment, on ne les voit plus, c’est seulement en comparant les versions que la différence est réellement flagrante. Ceci étant, le framerate reste constant, la PS4 ventile bien moins que sur d’autres titres moins récents, comme Control ou Ghost of Tsushima, et hormis certains temps de chargement un brin longuets, l’expérience sur PS4 s’est révélée fluide et agréable.
La beta d’Elden Ring a été testée sur PS4 via une clé fournie par l’éditeur. La version finale sortira sur PC, PS4, PS5, Xbox One et Xbox Series le 25 février 2022.
Si inquiétude ou retenue il y avait avant de poser les mains sur cette beta, tout a été douché en quelques sessions. Elden Ring est un tour de force, restant très fort sur ses appuis et sa base largement éprouvée de RPG de dark fantasy, sans oublier les innovations permises par Sekiro en termes de maniabilité et d’accueil de nouveau public. Les nouvelles mécaniques, très loin d’être anecdotiques, apportent un nouveau souffle à la création et gestion de personnage et de build et s’articulent parfaitement avec l’apparition de l’open world. On lui pardonnera ainsi largement ses menus moches et peu ergonomiques, ses textures légèrement datées (un peu moins sa caméra daubée, autre marque de fabrique de FromSoftware) et l’on rejoint le très grand train de la hype, fins prêts pour la version finale, normalement prévue pour février 2022. Vivement.
Shift
Camélidé croisé touche de clavier et militant pro-MS Paint. J'aime les jeux indés à gros pixels, les platformers sadiques et les énigmes.
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