Presque un an après Tiara: the Deceiving Crown, le studio franco-japonais Makee Games continue de raviver les souvenirs des anciens joueurs‧euses avec son second jeu au style 16 bits japonais, avec quatorze personnages jouables. Enfin en tout cas, il essaye.
Lorsque j’ai vu pour la première fois le trailer de Rise Eterna (j’espère d’ailleurs que vous n’allez pas frôler la crise d’épilepsie en le visionnant), j’ai tout de suite sauté sur l’occasion : celle de m’essayer enfin à un jeu de ce type. Rise Eterna nous est présenté comme « un Tactical RPG qui vous rappellera les jeux de stratégie japonais de l’ère 16 bits ». Les développeurs eux-mêmes souhaitent faire écho aux plus grands jeux du genre, en citant notamment Fire Emblem, Tactics Ogre et Final Fantasy tactics… Et pourtant, même en étant peu familière de ces tactical et en me fiant simplement à leur réputation, Rise Eterna n’est sans doute pas à la hauteur de tous ses grands frères malgré son potentiel.
Un scénario classico-classique
L’histoire nous est présentée brièvement dans une cinématique avant de commencer une partie et concrètement, elle tient sur un post-it. Nous sommes donc face au paisible royaume d’Ars Rare, attaqué et envahi par l’armée de l’Empire Athracien, dirigée par le général Adamanth le Grand. Le jeu nous introduit ensuite nos deux protagonistes. D’un côté Lua, seule survivante du massacre commis par des bandits auquel elle vient d’assister dans son village. De l’autre, Natheal, présenté comme un ancien soldat qui était allié aux bandits mais qui a refusé de participer au carnage, et qui décide de secourir Lua et de la soigner. Il la prend sous son aile (bon courage à lui, elle est exagérément insupportable), et ils se mettent ensemble en quête de retrouver un certain Seevan à la capitale. Ce vieux monsieur dont on ne sait rien leur ordonnera d’aller chercher les sœurs de Lua (pas de sang, mais liées quand même… bref.) aux quatre coins du pays. Pour quoi faire ? Ils devront le découvrir par eux-mêmes.
Voilà donc l’histoire “sombre et mature” qu’on nous promet. En vérité, vous passerez de map en map à vous demander pourquoi il faut réunir ces cinq sœurs, et pourquoi aller les kidnapper chez elles, là où elles ont été élevées. Car non, elles ne viendront pas gentiment avec vous, elles vous expliqueront qu’elles doivent protéger leur village, et que les habitants sont chers à leurs yeux. Soudainement le jeu, sans pression aucune, vous impose de décimer tout le monde pour récupérer la fameuse sœur pour continuer la quête. On assiste alors à des dialogues incroyables tels que “bon eh bien puisque vous avez tué tout le monde ici, je n’ai plus qu’à venir avec vous de toute façon”. Le but est donc de dégommer des bourgades entières en tuant des innocents sans poser de question et tout va bien. Cinq fois. Les dialogues entre les personnages sont ironiques et cyniques à outrance sans forcément apporter beaucoup de choses au scénario, et chaque sœur rencontrée est réellement insupportable pour rien. Tout ça pour au final découvrir un plot twist assez mal amené et franchement inintéressant.
Un gameplay prometteur, au final décevant
Au cours des niveaux, vous devez déplacer vos unités sur la carte avec un système de cases, chacune ayant une portée de déplacement et d’attaque différente (les archers par exemple se déplacent souvent moins loin mais possèdent une plus grande portée). Une fois placées, elles pourront alors soit attaquer (pas de magie, de compétences ou autres, juste taper bêtement avec son arme), soit attendre, soit utiliser un objet. C’est le cas de la majorité des personnages, exceptées quelques rares exceptions pas nécessairement utiles (et c’est franchement dommage). Vous pouvez ensuite visualiser à l’avance combien de dégâts vous allez infliger à l’ennemi, le pourcentage de chances de toucher l’adversaire, celui de subir une contre-attaque, ou encore d’annuler votre déplacement. C’est à partir de là que le jeu montre déjà ses limites, l’IA étant incroyablement passive, puisqu’il faudra traverser son champ de vision pour qu’elle réagisse… Et vraiment, l’IA est un pot de fleurs aveugle qui attend gentiment de se faire éclater sans bouger.
Dans son tutoriel, le jeu insiste sur le fait que le support entre vos différentes unités est capital, car certains personnages peuvent agir en même temps s’ils se situent sur des cases adjacentes. Une bonne idée sur le papier, tandis qu’au final très peu de personnages interagissent entre eux et la feature n’est franchement pas indispensable ou tant avantageuse, à tel point que l’on peut réellement s’en passer. Ajoutez à tout cela une OST répétitive, qui boucle énormément et surtout, qui recommence à chaque tour. C’est-à-dire approximativement toutes les cinq secondes. Sans exagération aucune, il m’a bien fallu cinq heures avant de me rendre compte que la musique était différente pendant le tour du joueur et pendant le tour de l’IA, puisqu’elle recommence à l’infini. Enfin, on retrouve des objectifs de mission pour chaque carte. Plus précisément… On retrouve un objectif de mission pour chaque carte. Il vous faudra toujours sauver Lua et Natheal. N’importe quel autre héros peut mourir, il faudra sauver ces deux-là. Les développeurs auraient pu, par exemple, imposer de jouer avec certains personnages sur les quatorze proposés, nous forçant à tester tous les gameplays de ces derniers. Dommage : ils n’ont pas saisi cette opportunité.
C’est loin mais c’est beau
Si l’on doit souligner un point qui aurait pu être intéressant, c’est bien que Rise Eterna possède un système de craft, où il est possible de récolter des ressources durant les niveaux. Ressources qui serviront à fabriquer des potions de soin ou qui améliorent les stats pendant un tour, des clés de coffres, ou encore des armes. Encore une fois, une idée qui semble très prometteuse mais qui pourtant n’est honnêtement pas si utile que cela, et pour cause… la taille des niveaux. En effet, chaque perso possède un inventaire personnel de six places, et vous pouvez avoir dans votre équipe six héros parmi les quatorze proposés. Il est souvent difficile de se rappeler qui possède quoi, et c’est là l’un des principaux défauts du jeu : on peut passer plusieurs tours d’affilée à faire des allers-retours sur la map tant elles sont grandes, et parfois un peu vides. Par conséquent, on peut vite avoir la flemme de chercher qui possède une clé pour aller chercher un trésor avec souvent un objet inutile dedans. Surtout quand on a des bugs d’interface qui empêchent de voir où sont nos unités… Sans compter que la moindre ressource prend également un temps fou à aller récolter, et est la plupart du temps assez inutile et ne vaut pas le coup d’allonger encore la durée du niveau. De plus, il n’existe aucun moyen d’enregistrer un set d’inventaire, il est nécessaire de tout refaire après chaque map et de chercher les trois items réellement utiles dans votre inventaire. Flemme.
La meilleure attaque, c’est l’attaque
Au final, on constate vraiment que les développeurs ont souhaité nous donner un large panel d’outils, avec son système d’arbres de compétences, d’artisanat et de gemmes pour améliorer les stats des personnages (au nombre de… trois : la force, la défense et l’agilité). Malgré tout cela, nous sommes face à des ennemis qui attendent comme des piquets qu’on vienne les poutrer, et pourquoi perdre un tour à utiliser des objets qui permettent de les empoisonner, les paralyser ou les ralentir tandis qu’on peut simplement les one shot avec la plupart des personnages ?
Je pense tout de même que Rise Eterna reste une expérience agréable avec sa direction artistique au côté rétro appréciable. La patte pixel art des combats est plaisante, même si sur les maps les graphismes restent très standards avec des décors relativement répétitifs. Le chara design des héros est également bien réalisé (même si, mince, on a encore oublié d’habiller les femmes et de leur donner des armures décentes). Sur le papier, Rise Eterna était très prometteur, et malgré tous ses défauts, j’ai apprécié découvrir le genre, alors que j’avais toujours eu une appréhension sur ce type de jeu. Mais même en étant novice des tactical, j’ai moi-même pu constater que le gameplay est trop basique, répétitif et que le côté stratégique est assez raté (dommage pour un tactical, quoi) puisque, en bourrant, ça passe.
Rise Eterna a été testé sur Switch via une clé fournie par l’éditeur.
Si vous êtes fan, voire expert de ce type de jeu, il serait honnête de ma part de vous dire que vous risquez d’être déçu par Rise Eterna. Si vous cherchez un tactical complexe et sombre, tournez-vous vers Black Legend. Si vous préférez quelque chose de plus doux avec un style rétro, foncez faire Ikenfell. Et si vraiment, vous cherchez un classique du tactical, bah… Jouez aux classiques dont les développeurs s’inspirent. J’ai malgré tout envie de terminer sur une bonne note : on peut réellement sentir que les développeurs avaient de bonnes idées et ont souhaité intégrer des mécaniques intéressantes au gameplay… Et rien que pour ça, j’éprouve une certaine sympathie envers Rise Eterna et en retiendrai une assez bonne expérience au final.
Elitchu
Après un passé trop sombre composé de MMORPG et de MOBAs, je me repens désormais en essayant plein de types de jeux, et en chassant leurs trophées/succès.
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