Cette fois-ci dans Partie Rapide, Zali vous parle d’un remake d’un classique du JRPG, Star Ocean First Departure R et Un Rieur vous parle de Basement, un jeu de gestion inspiré de Breaking Bad.
Star Ocean First Departure R
Star Ocean est une série de JRPG à l’histoire heurtée : alternant des épisodes formidables (le deuxième) et des catastrophes industrielles (le cinquième), elle a aussi connu les affres du marché de la localisation aléatoire des années 90-2000. Certains épisodes restent complètement inédits en dehors du Japon, d’autres ont connu un parcours pour le moins chaotique. Ainsi, le tout premier épisode, datant de la Super Nintendo, n’a été localisé chez nous que suite au portage de son remake sur PSP en 2008, avant de redevenir indisponible pendant de longues années. Avec cette sortie sur Switch et PS4 d’une version HD de ce remake (vous suivez ?), le tout premier épisode, renommé pour l’occasion Star Ocean First Departure R se rend enfin largement et facilement accessible. Trop tard ?
Star Trek avec une Fausse Perruque
Comment décrire Star Ocean à quelqu’un qui n’aurait jamais croisé la franchise ? Allez, je tente de comparer les carottes et les petits pois : Star Ocean, c’est Star Trek, mais revu à la sauce animés des années 90 avec un délicieux nappage Tales Of pour le système de combat. Chaque jeu de la franchise reprend plus ou moins le concept de civilisations avancées devant intervenir, bon gré mal gré, dans la vie de planètes médiévales. Souvent pour réparer de grosses bêtises.
Ce premier épisode posait d’ailleurs les bases de manière assez expéditive et étrangement efficace pour un jeu du genre : quand la fédération galactique se rend compte qu’une mystérieuse force alien est en train de transformer tous les habitants de la planète Roak en pierre après l’usage d’une arme biologique, le valeureux capitaine Ronyx et son aide de camp Ilia embarquent quelques valeureux adolescents autochtones 300 ans dans le passé de leur propre planète, à la recherche du patient zéro, pour éviter la mise en quarantaine de la planète condamnant tout le monde à une mort certaine. Bien entendu, tout ce petit monde finit éparpillé aux quatre coins de la carte, et le porteur initial de la souche du virus s’avère être un démon invincible qui met le monde civilisé à feu et à sang. Bien que dotée d’un ventre mou assez pénible (consistant à rassembler l’équipe), Star Ocean a une intrigue dont la densité et la bonne tenue étonne encore 25 ans plus tard. Comptez à peine 20 ou 30h pour en voir le bout, avec un nombre de digressions assez faible et une tendance à éviter le bavardage passé la première heure d’introduction. Un jeu qui en dit et en montre ni trop ni trop peu, et n’oublie pas que nous n’avons pas tous le temps de niaiser, c’est assez rare dans les JRPG pour ne pas le souligner.
Galère des étoiles
Si je pouvais, je m’arrêterais là, en rajoutant les quelques louanges d’usage pour ce remake de remake : oh, regardez, des combats légèrement repensés, pas de temps de chargement, un lissage correct des textures, et assez de contenu supplémentaire pour justifier de refaire le jeu même si vous vous y êtes déjà frottés. Parce que j’aime vraiment beaucoup Star Ocean premier du nom, c’est un jeu qui a du cœur, et qui a constitué pour tri-Ace (puis Enix puis Square Enix) un excellent terrain de jeu et d’expérimentation pour les deux épisodes suivants, chacun à leur manière d’excellentes milestones dans l’histoire du JRPG.
Mais le portage de Star Ocean embarque avec lui les défauts de son âge et de ce côté encore immature des mécaniques qu’il propose : les combats, pas des plus intéressants, droppent à une fréquence absurde, le système de sauvegarde reste anachronique, les instructions sur ce que vous devez faire sont parfois assez floues, et la structure de la première moitié du jeu vous force à du bactracking qui en déroutera plus d’un. Pire, le niveau de difficulté (traditionnellement plutôt relevé dans la franchise) n’a pas vraiment été ajusté. Globalement, vous allez rouler sur le jeu comme un bulldozer, SAUF si vous décidez de faire le MOINDRE pas en dehors du chemin prévu par la quête principale, et ce sans avertissement. Le déplaisir de perdre 30 minutes de sauvegarde parce que vous êtes entré dans une grotte où les ennemis vous éclatent en un tiers de seconde, voilà un plaisir des années 90 qui me manquait peu. D’une manière générale, le jeu combine maladroitement un manque de challenge et la nécessité de beaucoup leveller (ne serait-ce que pour acheter armes, armures et compétences). Une petite refonte de cet équilibre n’aurait pas été de trop.
Faites-le sur Switch
J’ai presque regretté de faire ce remake de Star Ocean sur PS4, tant il me semble qu’aujourd’hui, il se prête davantage à une expérience courte ou nomade comme peut le proposer la Switch. Sans compter que sur un écran qui dépasse celui de la portable de Nintendo, les textures, bien que largement retapées, se fondent assez mal dans des décors peints en basse résolution qui, s’ils sont souvent superbes, restent de la bouillie de pixels une fois projetés sur une surface de grande taille.
Alors si vous souhaitez un bon petit RPG de science-fiction et de fantasy et que vous avez déjà épuisé Dragon Quest XI et autres Disgaea de la portable de Nintendo, la Switch me semble toute indiquée pour profiter de ce classique dans les meilleures conditions. Vos yeux diront merci aux images beaucoup plus agréables dans ce format, et votre cerveau ronronnera d’aise à la perspective de pouvoir interrompre une séance de levelling fastidieux d’une simple pression sur le bouton de veille.
Star Ocean First Departure R a été testé sur PS4 via une clé fournie par l’éditeur.
L’accès aux classiques du JRPG n’a jamais été aussi simple, et on ne va pas s’en plaindre. Star Ocean First Departure R est une occasion de redécouvrir dans de bonnes conditions cet épisode fondateur et méconnu, base d’un univers riche et généreux. Prenez juste vos précautions : ça reste un JRPG Super Nintendo orienté grind et perclus de petits défauts dus à son âge respectable.
Basement
C’est très particulier d’écrire sur Basement aujourd’hui (on est en décembre 2019) car il s’agit d’un jeu en early access depuis 2015, autant dire que je pensais le projet mort et enterré. Mais quand il y a un mois, j’ai vu que le jeu était sorti pour de bon, j’ai voulu le tester une bonne fois pour toutes. Et c’était très triste.
Breaking très très bad
Mais c’est quoi Basement ? Ben c’est censé être un jeu de gestion où l’on contrôle des producteurs et vendeurs de drogue. Rien que ce pitch avait réussi à me vendre le jeu à l’époque, car il réunit deux choses que j’aime personnellement beaucoup : les histoires de criminels, et les jeux de gestion. Malheureusement pour moi, je n’accroche pas du tout à la narration étrange et à l’humour du jeu, ainsi qu’à la DA qui a été développée pendant l’early acces. Tant pis.
Néanmoins ce genre de défauts ne m’arrêtent pas en général, mais Basement a un problème plus profond, qui vient je pense d’une incompréhension personnelle du jeu. La philosophie de game design et la volonté des développeurs vont à l’encontre de ce que je défends ou de ce que j’apprécie dans un jeu, mais peut-être que j’interprète mal les messages des créateurs. Toujours est-il qu’avoir des messages en jeu disant que j’ai qu’à devenir meilleur si je veux voir la suite du jeu, que quoi qu’il arrive si je perds c’est de ma faute (même si c’est probablement vrai), ça aide pas à se motiver pour aller plus loin. Donc le jeu m’est tombé des mains, alors même que la bêta m’avait donné pas mal envie.
La tristitude
Basement me déprime à plusieurs niveaux. D’une part au niveau de l’idéologie performative qui s’en dégage (réussis, sinon c’est que t’es mauvais, gros nul), d’autre part, même si on ne peut pas reprocher à un jeu développé par seulement deux personnes la minceur de son gameplay, il faut reconnaitre qu’il n’est pas très enchanteur. Enfin, la direction artistique et l’ambiance en général sont assez ambivalentes dans leurs intentions. D’une part on a cette patte très grisâtre, des corps déformés, et une musique lourde qui sont déprimants (pourquoi pas après tout, on parle quand même de trafic de drogue), mais de l’autre on a des tentatives d’humour un peu foireuses, des éléments qui se veulent plus légers, et une sorte de mise en abyme du personnage principal avec les créateurs du jeu, cependant la sauce ne prend pas franchement avec moi. Pourtant c’est pas faute d’aimer ce genre de double discours, la série des GTA m’accrochant beaucoup dans ce type d’ambiance mi-poisseuse, mi-drôle, avec une mention spéciale pour GTA Chinatown Wars et GTA IV qui explosent tout à ce niveau-là. De même, la série animée Les Lascars avait cette ambiance grise de cité mélangée à un peu d’humour qui marchait bien, mais chez Basement je pense que le dosage du déprimant et la qualité de l’humour entrainent un sentiment de malaise étrange.
Bon je ne cracherai pas outre mesure dans la soupe malgré tout. Je pense que le problème vient plus de mes goûts que du jeu en lui-même, du moins pour ce qui est de l’appréciation générale que j’en ai. Il a certes des défauts de gameplay, mais j’aime beaucoup d’autres jeux ayant à peu près les mêmes, dans un style très similaire, par exemple j’apprécie énormément Unholy Heights qui est un jeu de gestion de pension pour monstres. Du coup peut-être que vous aimerez vendre de la drogue virtuelle à plein de gens, mais ce sera sans moi.
Au final, après 4 ans d’early access, qu’est-ce-que je retiens de Basement ? Essentiellement que c’est un jeu qui véhicule un message auquel je suis assez opposé, et qui plombe mon mood. Malgré tout, le gameplay est simple et efficace, donc si vous cherchez un jeu pour glander en matant un stream, ou en faisant autre chose, il peut faire le taf.
zalifalcam
J'aime les jeux double A, les walking simulateurs prétentieux et les JRPG, et plutôt que de me soigner, j'écris à leur propos.
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