Début février sortait Rift of the NecroDancer, le nouveau jeu de rythme de Brace Yourself, notamment derrière le culte Crypt of the NecroDancer. Une des principales raisons de ce succès, en plus de l’originalité du concept, c’était évidemment sa BO, composée par Danny Baranowsky, et rejoint par quelques pointures du milieu, de Jules Conroy à Chipzel. Ce nouveau titre promettait à son tour un album solide, avec bien sûr le retour de Baranowsky et FamilyJules, mais également quelques nouvelles têtes d’affiche très enthousiasmantes, telles qu’Alex Moukala, Sam Webster (Grindstone) ou Josie Brechner (aussi connue sous le pseudo Visager, et mon coup de cœur de l’album Rift of the NecroDancer). Ce nouveau jeu, je l’attendais avec un mélange d’impatience et d’appréhension. Car j’adore les jeux de rythme. Mais j’ai un sens du rythme tout pourri, et suis donc assez médiocre aux jeux de rythme.
Et pourtant, je m’accroche. Beat Saber, Theatrhythm Final Bar Line, Trombone Champ, Crypt et Rift of the NecroDancer : j’y ai passé des heures, ce fut douloureux, j’ai adoré. Ma compagne qui, elle, a un sens du rythme autrement plus solide que le mien et qui se débrouille infiniment mieux sur ce genre de jeux, se demande à chaque fois qu’elle me voit jouer comment j’arrive à voir le bout de ces titres, voire à faire des scores corrects (ou même très corrects, j’ai des preuves). Et la question est légitime : pourquoi, et surtout comment joue-t-on à des jeux de rythme quand on a un sens du rythme lamentable ?
À contretemps sur l'autoroute du tempo
La question du pourquoi est somme toute assez convenue : je joue à ces jeux, car j’aime leur musique (sauf Trombone Champ, auquel je joue car c’est important d’interpréter la Marseillaise au trombone prout pendant que Fanny nous lit un communiqué de France Travail). Je pourrais, à vrai dire, me contenter d’écouter les albums de leur BO, qui fonctionnent tout à fait de manière indépendante. Mais entendre une piste au sein d’un album et l’entendre, voire la découvrir, en jeu, ce n’est pas du tout le même type d’expérience. J’ai par exemple été extrêmement emballé en voyant des morceaux de The Black Keys, Nine Inch Nails ou The Prodigy annoncés dans la bande-son de Hi-Fi Rush, quand bien même j'avais déjà écouté ces pistes des dizaines de fois, et que je n’ai jamais eu besoin du jeu pour le faire. Mais il y a toujours une excitation à découvrir comment un morceau familier peut être utilisé d’une nouvelle manière, que ce soit en termes de mise en scène ou de synchronisation avec le gameplay.
C’est d’ailleurs ce qui m’a fait passer autant d’heures sur Beat Saber : la possibilité de jouer aux niveaux de la communauté, et de vivre des morceaux que j’aime beaucoup via le prisme du jeu. Car si mon sens du rythme est pour ainsi dire médiocre, un niveau correctement mappé dans Beat Saber, ou même des patterns de boss savamment conçus dans Hi-Fi Rush, peuvent me permettre de mieux comprendre leur rythmique, et ainsi les découvrir sous un nouvel aspect. C’est totalement ce qu’il s’est produit quand j’ai commencé Rift of the NecroDancer. J’avais déjà écouté l’album plusieurs fois durant les quelques jours qui ont précédé mon lancement du titre, et les pistes m’étaient donc très familières. Et pourtant, j’ai eu l’impression de les redécouvrir en jouant. Des morceaux que je n’avais pas spécialement appréciés en écoute seule comme Progenitor ou Matriarch ont pris tout leur sens une fois en jeu et face au mapping des niveaux, et d’autres que j’aimais déjà beaucoup, comme Hang Ten Heph, Spookhouse Pop ou Overthinker, ont pris une importance encore supérieure à mes yeux. Je joue ainsi presque à l’envers à ces jeux : au lieu de m’aider de la musique et de son rythme pour réussir les niveaux, c’est progresser dans les niveaux qui m’aide à mieux comprendre le rythme et la composition des pistes, le tout enrichi par l’aspect ludique de l’expérience. Mais, du coup, comment j’y joue ?

This is the rhythm of the naze
J’en ai très largement parlé dans des papiers sur la difficulté et sur le masocore (et dans environ 75 % de mes critiques), si ma pratique du jeu vidéo est assez éclectique, je reste avant tout un joueur de plateforme et d’action, 2D comme 3D. Et, c’est sûrement un peu malheureux, mais j’ai de ce fait un peu tendance à aborder beaucoup de jeux sous l’angle de l’apprentissage de patterns et de chemins, et me repose énormément sur les stimuli et indicateurs visuels, souvent au détriment de l’aspect sonore. Même quand il s’agit de rythme. C’est comme ça que j’appréhende des titres comme Nine Sols ou Sekiro, qui sont pourtant des jeux d’actions très portés sur la rythmique (jusqu’à caractériser les différents types d’attaques par des sons spécifiques), mais rien n’y fait, je reste un joueur à patterns (et aux réflexes pas très efficaces), et vu que je ne parviens pas à comprendre et interpréter ces rythmiques, je préfère apprendre des briques d’enchainements et des signaux visuels plutôt que de tenter en vain de faire rentrer le rythme dans mes doigts.
Et, étonnamment, ça marche. Jusqu’à une certaine limite, mais ça marche. Ça marche particulièrement sur un jeu comme Beat Saber en mode Expert, puisque tout va si vite qu’il devient plus question de réflexes que de rythme, et ça marche plutôt très bien sur Rift of the NecroDancer, qui base une bonne partie de sa difficulté sur l’apprentissage des patterns des monstres, qui vont se comporter et se déplacer différemment selon leur type et leur couleur. Bref, des indicateurs très visuels et qui me suffisent amplement pour réussir (presque) tous les niveaux en difficulté moyenne, avec un score généralement très correct. La limite, c’est évidemment que l’autre partie de la difficulté réside dans le rythme, notamment avec ces épouvantables variations, ces monstres qui arrivent en contretemps, qui sautent des battements ou qui arrivent plus vite que d’autres. Bref, dès qu’on quitte un peu le confort d’un rythme binaire et régulier, c’est la panique. C’est ce qui fait que je suis tout à fait capable de finir avec un rang S, voire S+, de faire des combos complets, mais ne peut empêcher mes contacts Steam de me chasser du podium sur la quasi-totalité des niveaux. Notez que je parle de contacts Steam, pas d’ami·es (ça va, c'est bon, je plaisante, je vous aime bien même avec vos scores de brutes).

C’est cependant insurmontable pour certains mini-jeux du mode histoire (ou les boss en niveau difficile), puisque ces derniers reposent exclusivement sur la musique, façon Rhythm Paradise ou Melatonin – j'ai d’ailleurs dû abandonner ce dernier, étant parfaitement incapable de passer rien que le premier niveau. Heureusement, Rift of the NecroDancer prend en compte les nullos de mon espèce : au bout de quelques échecs, il propose de couper court à l’humiliation et d’ajouter des petites flèches à l’écran, qui rendent l’exercice beaucoup plus simple. C’est d’ailleurs sur ce point que je terminerai : si je peux jouer à ce genre de jeux, c’est aussi car ils me laissent entrer. Nombreux niveaux de difficulté, options d’accessibilité, aides visuelles, calibrage de la latence sonore et visuelle, ça ne fait pas de miracles quand on est vraiment nul en rythme, mais ça permet de commencer en douceur sans rencontrer d’énormes skill checks ou murs de difficulté, et augmenter peu à peu la cadence jusqu’à trouver son point de rupture (le mode difficile, pour ma part). J’ai définitivement atteint ma limite au bout d’une vingtaine d’heures passées sur Rift of the NecroDancer, et je suis déjà ravi d’avoir pu profiter du mode histoire et de deux niveaux de difficulté sur quatre. Je le relancerai certainement au gré des mises à jour (ou juste pour profiter de mes pistes préférées), en regardant de loin mes petits camarades s’arracher les high scores.
Bon, et quand on a le sens du rythme, ça donne quoi ? - L'avis de Sysy
Si vous êtes familier des jeux de rythme à défilement vertical (Beatmania, DJMax, Guitar Hero...) vous pourriez vous sentir comme à la maison et être tenté de lancer Rift of the NecroDancer directement dans sa difficulté maximale : après tout, ces jeux-là, c’est tous les mêmes, non ? D’autant qu’il n’y a que trois touches, c’est forcément pour les bébés ! Eh bien, non, ne faites pas ça. Car même si Rift of the NecroDancer ne demande pas d’être un virtuose du piano comme ses inspirations les plus directes, il est ici bien plus difficile de lire les partitions qui vous sont envoyées.
Nombreux ennemis aux couleurs différentes et contre-temps marqués par un discret carrelage : la lecture du jeu demande un temps d’adaptation non négligeable. Le défilement saccadé des ennemis associé au BPM différent de chaque morceau du jeu, les malus tels que les ennemis remplacés par des points d’interrogation, ou le sol enflammé qui les accélère sont autant d’embûches qui viennent perturber les cerveaux de nous autres, les joueurs ayant passé des centaines d’heures à tapoter frénétiquement notre clavier en fixant le centre de notre écran. Toutes ces embûches sont purement visuelles : si on retranscrivait les partitions de Rift of the NecroDancer – même les plus difficiles – en des pistes de Guitar Hero, elles seraient très simples. Cela a un côté extrêmement positif : même en difficulté impossible, on tape toujours au rythme de la musique, ce qui est rarement le cas pour les morceaux les plus difficiles des jeux de rythme plus traditionnels, qui contiennent beaucoup trop de notes pour que chacune ait un sens musicalement. Cela ne permet pas en revanche à Rift of the NecroDancer de déclencher cet état de transe où l’on martèle le clavier à une vitesse ahurissante tout en impressionnant ses amis qui ne comprennent pas vraiment ce qui se passe. Cela déplaira forcément à une partie du public cible, mais c’est aussi un vent de fraîcheur apporté au genre : on ne se bat pas contre de simples notes, mais contre de réels ennemis qu’on adorera détester.

Rift of the NecroDancer a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur.
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