Overwatch, en tant que jeu, je l’aime comme je le déteste. Mais il faut bien avouer que c’est le premier jeu multijoueur dans lequel je me suis plongé à fond et, encore aujourd’hui, je passe de longues soirées devant à enchaîner les games avec des potes. Overwatch c’est aussi le jeu qui m’a fait traverser la barrière de l’eSport. Je ne suivais vraiment pas beaucoup le sport électronique avant la sortie du jeu, et l’annonce d’une ligue eSportive par Blizzard qui allait « révolutionner » le monde de l’eSport m’a tout de suite hypé. L’Overwatch League a entamé depuis deux semaines sa troisième saison et, si la meta actuelle me convient plutôt pas mal – en comparaison avec les immondices qu’ont été les meta GOATS et Double Shield la saison dernière – pour les phases de jeu à regarder, je me dois de freiner un coup et de dire « Ça suffit Blizzard, trop c’est trop, là vous allez droit dans le mur ! »
Petit disclaimer : dans cet article je ne parlerai QUE de l’Overwatch League et non des Contenders, que je ne suis pas.
Des changements importants pour cette nouvelle saison
Revenons d’abord sur les points marquants de cette troisième saison d’Overwatch League, avant de passer dans le cœur du sujet et de vous expliquer les raisons de ce coup de gueule.
Les fans ont pu apprendre de manière assez brusque que l’OWL allait désormais être diffusée sur Youtube pour les années à venir. Activision-Blizzard, dont le contrat d’exclusivité de deux ans avec Twitch est arrivé à son terme, a passé un deal de 160 millions de dollars avec la plate-forme de partage de vidéo détenue par Google pour la diffusion exclusive de l’Overwatch League, de la Call of Duty League et des compétitions Hearthstone. Sacré coup joué par Google pour marcher sur les plates bandes de son grand concurrent, Amazon. Car, au delà de la simple plate-forme de diffusion des compétitions, il y a des intérêts capitaux dans les services de cloud proposés par ces entreprises. Ici, c’est Google qui récupère le tout au dépend d’AWS (on le rappelle, mais c’est notamment avec ses services de cloud qu’Amazon gagne de l’argent, et non avec les livraisons).
Autre grosse nouveauté de l’année, mais que l’on nous a annoncé bien plus tôt, le système de homestands. Les équipes de l’Overwatch League portent, et donc représentent, des noms de villes des Etats-Unis, mais aussi de Chine, de Corée et d’Europe. Le but étant de rendre l’attrait de la compétition très international et de provoquer une certaines ferveurs de supporters. Jusqu’ici, tous les matchs d’OWL se jouaient dans l’arène de Blizzard prévue à cet effet à Los Angeles. Désormais, chaque week-end, des matchs se déroulent dans différentes villes dans le monde. La première semaine se déroulait à New York et Dallas, la deuxième semaine à Philadelphie et ce week-end nous aurons le droit à des matchs à Washington. Paris recevra aussi sa part avec trois week-ends de compétition en avril, mai et juin.
Bon bah ça a l’air très bien tout ça ! Pourquoi est-ce que je devrais m’énerver alors ? Bon, déjà, je ne pense pas être le seul à en avoir gros sur la patate. Je vais m’appuyer sur des chiffres que j’ai pu observer lors des diffusions en direct de matchs. Sur l’année 2019, l’Equipe rappelait que la moyenne des viewers par match, tous streams confondus, était d’environ 313 000. Sur la semaine 2 de la troisième saison d’OWL, le stream américain peinait à dépasser les 70k viewers et le stream français oscillait entre 5 et 7k spectateurs… On est donc loin de la moyenne avancée par l’Equipe sur l’année dernière. S’il est difficile d’évaluer les raisons précises de cette faible audience, je pencherai plutôt vers une perte d’intérêt globale du contenu en direct (les rediffusions sont plutôt bien regardées par contre) plutôt que sur une partie des spectateurs qui n’ont pas voulu suivre la migration de Twitch à Youtube.
Autre point à avancer. Je suis tombé sur un article intéressant de ESPN dans lequel le journaliste mettait en avant ses doutes sur cette nouvelle saison d’Overwatch League. Une de ses principales peurs concerne ces fameux homestands. Les joueurs OWL sont très jeunes. Ils ont entre 18 et 24 voire 25 ans pour les plus vieux. Les faire voyager d’une destination à l’autre chaque semaine (même au sein des Etats-Unis, c’est quand même un grand pays hein) apportera très probablement des problèmes importants de jetlag qui seront difficiles à gérer et qui pourront venir impacter les performances des joueurs.
Des débuts assez calamiteux
Rentrons désormais dans tout ce qui ne va pas, à mon sens, dans ce début de saison d’Overwatch League et qui, si cela continue, pourrait sceller très vite le futur pourtant si prometteur qu’on nous promettait pour cette compétition.
Il y a un ENORME problème de qualité vidéo des retransmissions en direct. Que ce soit sur le stream français (que je privilégie car j’aime beaucoup les casters, leur personnalité et leur façon de faire) ou américain – n’en déplaise aux défenseurs qui disent que c’est seulement sur le français, non, vous avez juste à cliquer pour voir – qu’importe la connexion, la qualité dépasse rarement les 480p et baisse parfois à 360p. Un véritable scandale qui fait perdre tout confort de visionnage. Les replays se portent mieux mais possèdent un genre de filtre flou ou lissant qui donne une image bizarre par rapport à celle que l’on peut voir quand on joue au jeu.
Bon, là vous allez me dire « oh bah ça va, déjà tu paies pas pour voir ça donc te plains pas trop c’est pas SI gênant ». Allez, disons que je vous accorde ce point là. Que diriez-vous de vous manger des pubs autant de fois que vous piochez dans un bol de M&M’s posé devant vous ? J’ai été très vite interpellé par le nombre incroyable de pauses pub pendant les rencontres, et apparemment je n’étais pas tout seul à trouver ça légèrement abusé. Troma, le community manager de l’équipe de France d’Overwatch, a relayé sur Twitter il y a quelques jours des plaintes de fans venant de Reddit. Un internaute s’est même amusé à découper la construction d’un stream américain de la deuxième journée d’OWL. En lisant ses chiffres, impossible de se dire que tout va bien.
En gros, sur 4h de stream américain (le stream « officiel » donc), on retrouve 47 minutes de pré-show. 50 minutes d’interviews et d’analyse. 1h30 de jeu pur et… 47 minutes de publicités. Quarante. Sept. Minutes. Et on les sent bien passer ces « petites pauses pub ». Au début, au milieu, entre les rounds, entre les maps, encore au milieu, à la fin… des pubs il y en a tout le temps ! Et ce ne sont que des pubs pour les 5 mêmes trucs qui tournent en boucle !! Call of Duty League, Hearthstone (sûrement celle qui passe le plus souvent, svp aidez moi j’aime bien la chanson mais j’en peux plus !!!) et des jeux mobiles insignifiants. On connaît comment la télé américaine fonctionne, et son système en général même. Les pubs, il y en a tout le temps. Sauf que l’Overwatch League se veut internationale. Adopter les seuls codes américains ne peut que venir entacher l’expérience des étrangers, habitués à des modèles moins invasifs et fermés.
La communauté mise sur le banc
En parlant d’être fermé, Lutti, un des casters français star d’Overwatch, a pu s’exprimer il y a quelques temps au micro d’ES1. Lorsqu’on lui a demandé si lui et ses équipiers casters étaient consultés par Blizzard, il a très vite répondu que non, jamais, et qu’il pense que même les implantations dans les autres régions du monde de Blizzard ne l’étaient pas non plus. En gros, c’est la mère patrie USA qui s’occupe de tout, les autres taisez-vous et faites avec. Pour le cas des casters français comme étrangers, bon, s’ils se présentent comme officiels car les seuls à le faire, ils n’en restent pas moins prestataires externes de Blizzard. Par exemple, O’Gaming, qui retransmet énormément d’événements eSport en France (LoL, Starcraft, Overwatch…) est lié par contrat avec Blizzard dans ce cas (merci DDaFox, fondateur de Casters Nest, pour la précision). Les casters ne sont donc pas directement liés à l’éditeur américain. Ils n’ont donc rien à dire. On avait déjà pu voir ces limites avec la précédente World Cup – par ailleurs complètement rushée et mal organisée – où les casters français obtenaient toutes sortes d’informations contradictoires sur l’organisation encore quelques minutes avant le lancement de la compétition, les laissant démunis jusqu’à ce qu’ils obtiennent enfin la bonne info qui leur permette de faire leur travail.
Niveau entretien et support de la communauté, il y a aussi de quoi râler. Pendant que Blizzard n’est pas fichu de proposer une qualité vidéo et sonore (le stream français n’a aucun son d’ambiance des salles où se déroulent les matchs, dommage, vu l’ambiance électrique provoquée enfin par de vrais supporters) correcte à ses viewers, League of Legends, par exemple, produit des contenus exclusifs à ses chaînes dédiées aux régions dans lesquelles le jeu est présent. Il y a même eu un morceau de musique fait spécialement pour la communauté française pour fêter les 10 ans du jeu. Qu’on aime ou pas le morceau, c’est la preuve que Riot sait et désire s’occuper de sa fan base mondiale.
Pour Overwatch, rien de spécial, juste des retransmissions et quelques tweets impersonnels. Pire encore, le prix des places pour les homestands est proprement hallucinant. J’ai renoncé volontairement à aller assister aux matchs de Paris Eternal au Zénith de la capitale lorsque j’ai vu qu’il fallait débourser entre 40 et plus de 100 euros pour une seule journée de matchs. Ces prix honteux laissent un petit goût amer et nous font penser que Blizzard se dit que l’on est assez fan de leur jeu pour faire chauffer la carte bleu juste pour eux. D’ailleurs, il reste encore pas mal de places encore non vendues pour les homestands de Paris. Preuve de ces prix beaucoup trop hauts qui rebutent les fans ?
Vous avez pu le voir, beaucoup de choses viennent entacher ce début de troisième saison d’Overwatch League. D’un point de vue eSport pur, donc pendant les matchs en eux-mêmes, je n’ai pas grand chose à reprocher. Je suis toujours autant émerveillé du niveau lunaire que nous présentent les joueurs. Mais au niveau de l’organisation de la compétition, là je ne peux vraiment plus. Je pense que je vais arrêter de regarder les matchs en direct et me concentrer seulement sur les rediffusions, lors desquelles je pourrai sauter toutes les pubs et les moments mous. C’est dommage, car je trouve que regarder les matchs en direct offre une dimension très spéciale à l’expérience que veut nous proposer Blizzard. Mais si cette expérience est ruinée par de trop nombreux facteurs, alors il n’y a plus qu’à se replier vers d’autres solutions.
Benjamin "Noodles"
Faire des jeux de mots c’est mon dada. J'aime bien tous les jeux aussi. Sauf les mauvais ou ceux qui nous prennent pour des glands.
Articles similaires
Sun Haven, ou le monde des indés en pleine Guerre des Clones
juil. 09, 2021
Persona 5 Strikers m'a fait réaliser ma lassitude vis-à-vis des (bonnes) suites inutiles
févr. 23, 2021
Non, le format d'early access n'est pas adapté à tous les projets (et il va falloir arrêter d'en abuser)
oct. 09, 2020