Mercredi quelques centaines d’employé·e·s d’Activision Blizzard ont débrayé et manifesté devant le siège de l’entreprise à Santa Monica suite au dépôt d’une plainte par l’État de Californie pour discrimination et harcèlement sexuel. Cette manifestation est l’occasion de revenir, dans les grandes lignes, sur ce qui se passe à Activision Blizzard depuis la semaine dernière.
Mercredi 21 juillet 2021, le journal Bloomberg rapportait qu’au terme d’une enquête de deux ans, une plainte avait été déposée contre Activision Blizzard par le California Department of Fair Employment and Housing (l’agence californienne pour l’équité dans le logement et l’emploi) pour discrimination et harcèlement sexuel. La plainte fait état, entre autres, de harcèlement sexuel à grande échelle, de discrimination à l’embauche et à la promotion, de racisme, de blagues à répétition sur le viol, etc.
Suite au dépôt de plainte, le porte-parole de l’entreprise a fait savoir qu’une grande importance était accordée à l’inclusivité sur les lieux de travail et que ces accusations étaient prises au sérieux. Il a néanmoins ajouté que l’agence avait « déformé des faits » et que l’image dépeinte n’était « pas représentative d’Activision Blizzard aujourd’hui ». D’autres réponses ont suivi, certaines jugeant ces accusations « préoccupantes » et d’autres sans fondement, c’est le cas notamment de Frances Townsend, chief compliance officer de l’entreprise.
De nombreux développeurs vedettes et cadres se sont dits choqués et pas au courant qu’une telle culture existait dans l’entreprise ou désolés de n’avoir pas fait davantage. Le licenciement du directeur créatif de World of Warcraft, Alex Afrasiabi en 2020, tend à prouver que cela ne devrait être une surprise pour personne. Kotaku rapporte qu’Alex Afrasiabi était connu pour harceler sexuellement ses collègues féminines et explore le cas de la « Cosby-suite », une salle de réunion pleine d’alcool et décorée d’un portrait de Bill Cosby (ancienne star de la télévision américaine accusée de nombreux viols depuis 2004) où se retrouvaient certains employés de l’entreprise lors de la BlizzCon 2013.
Cette gestion a été jugée insuffisante par de nombreux employés (anciens et actuels) et lundi 26 juillet, près de 2000 d’entre eux ont signé une pétition adressée à la direction dénonçant cette gestion qui ternissait les efforts faits en interne et visait à les faire taire. La pétition demande notamment à ce que les accusations soient prises sérieusement et appelle à la démission de Frances Townsend.
Sans faire allusion à la plainte en cours, les développeurs de World of Warcraft se sont engagés en milieu de semaine à rendre le jeu plus inclusif et à retirer immédiatement des « références qui n’ont pas leur place dans notre monde ». Ils n’ont toutefois pas encore précisé de quelles références il s’agit.
Le 28 juillet 2021, Robert Kotick, PDG d’Activision Blizzard, s’est exprimé sur le sujet en présentant ses excuses pour la gestion plus qu’insuffisante de la situation. Il a également promis d’agir rapidement et de mettre en place des changements à long terme en commençant par un audit des politiques et procédures par une entreprise externe et la promotion d’un environnement de travail respectueux et inclusif.
Ces déclarations faisaient suite à l’annonce d’une partie des employés d’Activision Blizzard de leur intention de débrayer et manifester. La manifestation a été maintenue et les organisateurs ont fait savoir qu’ils étaient certes heureux de voir qu’ils étaient enfin pris au sérieux, mais que cette réponse n’était pas suffisante.
Mercredi donc, quelques centaines d’employé·e·s ont manifesté devant le siège d’Activision Blizzard pour protester contre la gestion de la situation actuelle et porter leurs quatre revendications principales : fin des clauses d’arbitrages obligatoires, l’adoption de politiques de recrutement, d’entretiens, d’embauche et de promotion conçus pour améliorer la diversité des profils, la publication des données salariales et audit par un tiers de la structure hiérarchique, du département des RH et de la direction. Cette manifestation a été soutenue par d’anciens employés, par des joueurs, mais également par 500 employés d’Ubisoft, qui se retrouvent dans ces revendications, par le biais d’une lettre ouverte.
Aux dernières nouvelles, Blizzard a chargé le cabinet d’avocat Wilmer Cutler Pickering Hale and Dorr d’auditer sa culture d’entreprise et a également remanié son équipe juridique. Il est difficile de savoir pour le moment s’il s’agit juste d’un effet de manche ou si les changements promis seront effectivement mis en place.
Cette affaire est loin d’être terminée et cet article n’est en aucun cas exhaustif, mais il nous paraissait important de revenir sur la chronologie et sur ces faits qui ne sont, hélas, pas rares dans le secteur du jeu vidéo (et ailleurs), car plus ils sont relayés et documentés, moins il sera facile de prétendre qu’on ne savait pas.
BatVador
Traductrice ascendante topiaire qui aime les city builders, les dystopies et les jeux avec des gens déprimés dedans.
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