Cette fois-ci dans Partie Rapide, Zali vous parle du platformer 2D Ganryu 2, suite d’un titre culte de la Neo-Geo, et du jeu d’infiltration sombre et immersif Winter Ember.
Ganryu 2
Complètement inconnu en Occident si ce n’est d’une poignée d’amateurs de jeux rétro, la société japonaise Visco a fait les beaux jours de la Neo-Geo avant de disparaître absorbée par Sammy, puis par Sega au début des années 2000. Plus de vingt ans après l’original, c’est au studio Storybird (Golden Force) que l’on doit ce Ganryu 2, suite d’un beat them all prenant place dans le Japon médiéval.
Oni soit qui mal y pense
Ganryu 2, c’est avant tout une structure très arcade, devenue assez inhabituelle de nos jours, vous imposant de finir un à un les six niveaux du jeu en ne laissant pas beaucoup de droit à l’erreur ; tant que vous n’avez pas complètement terminé un monde, le suivant reste verrouillé. Le jeu est d’ailleurs pas mal basé sur l’apprentissage de ses mécaniques et de son level design. Une fois que l’on connaît l’emplacement des bonus, des vies supplémentaires, des armes en rab et des pièges, on se fraye assez vite un chemin jusqu’aux boss des différents mondes. La seule différence avec l’arcade étant qu’on n’a pas besoin de remettre deux euros dans la machine à chaque partie et que les niveaux débloqués le sont pour de bon.
Et contrairement à ce que faisait un Sifu un peu plus tôt dans l’année, renvoyant perpétuellement à la niche tant que vous n’aviez pas l’intégralité du jeu en tête, Ganryu 2 a la modernité et l’élégance de vous permettre d’apprendre son challenge d’une manière beaucoup plus souple, en modulant la difficulté pour que vous alliez relativement loin et puissiez vous permettre des échecs, par exemple. Mais aussi avec des méthodes plus artificielles mais efficaces, comme placer une vie supplémentaire peu avant des étapes compliquées (les séquences impliquant des sauts dangereux ou un boss intermédiaire par exemple), ce qui permettra de vous y confronter plusieurs fois d’affilée et donc d’apprendre les patterns adverses sans avoir à redémarrer tout le niveau.
À noter d’ailleurs que si le scénario du jeu est plus qu’anecdotique (vous êtes Miyamoto Musashi et vous devez aller taper des démons un peu partout au Japon, d’accord ?), l’aventure révèle un décorum très varié et multiplie les petites surprises. Certains environnements sont directement repris du jeu original, mais Ganryu 2 cherche aussi à étonner avec des séquences de vol, d’autres plus horrifiques ou orientées SF, des courses poursuites ou des combats de boss à plusieurs phases très inspirés. Tout juste pourra-t-on regretter quelques vilaines chutes de framerate sur Switch quand trop d’ennemis sont affichés à l’écran. Rarement un problème face aux boss du jeu et durant les séquences clés, ces ralentissements vous donneront l’impression frustrante de galérer pour rien contre de simples petits paquets d’ennemis de base.
Beau, rythmé, efficace mais basique
Pour convaincre, Ganryu 2 mise sur son extrême simplicité, évoquant pleinement les jeux de l’époque : un bouton pour avancer, un pour sauter, un pour donner un coup de sabre, un pour lancer un projectile, et un dernier pour balancer une furie quand la jauge adéquate est pleine. Seule concession visible à la modernité, la possibilité de moduler ses sauts en rebondissant sur les murs et en dashant, des fonctions permettant un level design ambitieux en termes de verticalité comme de latéralité. Une formule minimaliste qui m’a personnellement beaucoup plu mais qui pourrait frustrer un peu celleux qui cherchent un gameplay plus profond ou plus innovant.
C’est un peu à la fois la force et la limite de Ganryu 2 : tout ce qu’il propose ou presque, Shinobi le proposait déjà en 1987. Storybird a rendu une copie irréprochable, avec un pixel art fin, une musique entraînante, un rythme de jeu frénétique, un level design tout en verticalité astucieux… Mais il est assez difficile de dire s’il arrivera à séduire au-delà du petit cercle des nostalgiques de ce genre de titres.
Une réponse est peut-être à trouver du côté du système de score et de la petite dimension compétitive de Ganryu 2 : si le jeu est relativement facile, abondant en vies supplémentaires et en checkpoints et livrant des combats de boss très permissifs, il possède aussi un système de scoring assez difficile, toute vie perdue faisant repartir le compteur à zéro
Ganryu 2 a été testé sur Nintendo Switch via une clé fournie par l’éditeur. Le jeu est également disponible sur PC et PlayStation 4 et 5.
Ganryu 2, c’est beaucoup d’amour et de savoir-faire au service d’un projet très précis : donner l’impression de jouer à un jeu Neo-Geo qui n’aurait pas pu sortir à l’époque de la console de SNK. Il y a fort à parier que ce tourbillon de violence entre ninjas, samouraïs, onis et yokaïs saura séduire les nostalgiques des salles d’arcade de la fin du XXè siècle, mais difficile de savoir s’il pourra convaincre au-delà.
Winter Ember
Un beau jour, dans un univers victorien sombre et cruel, le riche Arthur Artorias, fils de bonne famille, voit des assassins massacrer sa famille sous ses yeux. Quelques années plus tard, Arthur revient pour zigouiller les conspirateurs : bienvenue dans Winter Ember, jeu d’infiltration immersif signé par Sky Machine Studios.
Marri s’infiltre
Winter Ember frappe dans un premier temps par son accumulation de bonnes idées très ambitieuses : héritier de la vénérable franchise Thief, il vous propose des séances d’infiltration en vue du dessus, dans des niveaux assez vastes jouant pleinement la carte du labyrinthique et de la verticalité. L’ambiance, très réussie, plonge dans une ambiance froide et poisseuse du meilleur aloi qui donne immédiatement envie de se transformer en ombre redoutable et d’éliminer tout ce qui se dresse sur sa route.
De plus, Winter Ember propose une vision de l’infiltration très orientée immersive sim : ici les ressources sont rares et doivent être managées avec précision, et la moindre erreur peut être fatale. Au cœur du jeu, on trouve notamment la gestion des sources de lumière, qu’il conviendra d’allumer et d’éteindre en fonction de votre besoin de vous orienter ou d’être discret, ainsi que la fabrication et la récolte de flèches, votre arme maîtresse pour faire face aux adversaires, déclencher des pièges à distance, etc. Le jeu fait ainsi comprendre très vite et très bien que votre principal atout sera votre capacité à rester caché, le moindre duel en face à face contre plus d’un garde tournant immédiatement à votre désavantage quasi automatique.
Le premier contact avec Winter Ember est donc plaisant, avec son petit côté Dishonored vu du dessus et sa capacité à présenter une variété de résolutions pour chaque situation : pure infiltration, assassinats, non violence, contournement de bâtiments, etc. Le problème, c’est que toute cette belle mécanique en théorie bien huilée se heurte très vite à une réalisation assez faiblarde, laquelle sera en réalité votre principal adversaire dans le jeu.
C’est le fun qu’on assassine
Winter Ember a deux défauts majeurs qui l’empêchent presque immédiatement et presque tout au long de l’aventure d’être vraiment amusant. D’une part, des problèmes de mise en scène et de structure de l’aventure : le jeu a un rythme assez mou, une gestion de ses checkpoints forçant à faire pas mal d’allers-retours dans des bâtiments déjà nettoyés… Et quelques séquences qui obligent à purement et simplement abandonner l’infiltration pour passer en combat frontal, probablement le point le plus raide et le moins intéressant du gameplay.
Ajoutons à cela des maps pas toujours lisibles et une IA ennemie extrêmement faible, et on finit vite par s’ennuyer entre deux séquences un peu mieux fichues. Car hélas, Winter Ember est aussi un jeu dont l’ambition sur le papier ne se traduit pas vraiment à l’écran par une réalisation à la hauteur : il est perclus de bugs de collision, de problèmes de sauvegardes corrompues, la caméra s’y bloque régulièrement dans les décors, et j’en passe.
Et tout est à l’avenant : les soldats adverses ont des rondes et des routines parfois idiotes ou incohérentes, le scénario peine à décoller et enchaîne clichés et doublages franchement ratés… Un constat encore compliqué par des choix ergonomiques discutables. Signalons par exemple qu’Arthur peut marcher à rythme normal ou à pas de loup mais pas vraiment accélérer, ce qui se traduit parfois par l’impression de diriger un bloc de ciment. Un ressenti particulièrement frustrant quand on doit retraverser un niveau pour, par exemple, en piller les trésors cachés, ce qui s’avère indispensable pour progresser correctement tout au long du jeu. Bref, on a un peu l’impression de jouer à un jeu dont le développement n’est pas tout à fait terminé, et c’est plutôt frustrant au vu des bonnes idées de départ.
Winter Ember a été testé sur PC via une clé fournie par l’éditeur.
Winter Ember est l’exemple parfait du jeu qui a peut-être visé un peu trop haut pour lui : il voulait être une sorte de Thief en vue du dessus, il termine en expérience d’infiltration plutôt poussive et assez mal calibrée. On le quitte à regret, en souhaitant que le prochain jeu du studio puisse proposer une expérience plus fluide et moins heurté. Et donc un poil plus immersive.
zalifalcam
J'aime les jeux double A, les walking simulateurs prétentieux et les JRPG, et plutôt que de me soigner, j'écris à leur propos.
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