Cette fois-ci dans Partie Rapide, Fanny vous parle du premier épisode d’Orwell : Ignorance is Strength et Veltar de Rise of the Industry
Orwell : Ignorance is Strength Episode One : Thesis
Dire que j’attendais cette deuxième saison d’Orwell avec impatience est un euphémisme. Après avoir promis à mes collègues beaucoup de malheurs s’ils touchaient au jeu avant moi, me voici donc enfin de retour au service de La Nation, cette fois pour enquêter sur la disparition d’un soldat après un appel menaçant de l’une de ses connaissances.
Retour en terrain connu
Ce premier épisode commence simplement par un test de personnalité pour savoir si vous êtes fait pour le job, passage qui sert surtout à vous expliquer le principe des « datachunks » si vous n’avez pas joué à la première saison. En gros, il s’agit de cliquer sur les réponses qui vous semblent pertinentes et les déposer dans l’emplacement réservé, procédé à répéter par la suite pour les informations qui vous paraissent pertinentes dans votre enquête. Dès ces premières minutes, les thèmes de la saison vous sont présentés : racisme et patriotisme exacerbé. Après avoir totalement raté ce test, je suis invitée à le repasser. Et là, surprise, j’ai été prise dans le programme, malgré mes réponses pitoyables. Une petite déception m’a envahie à cet instant : j’espérais que le jeu vous force à repasser le test jusqu’à ce que toutes vos réponses aillent dans le sens de ce qu’attend La Nation de vous, pour vous obliger à répondre des choses qui ne vous plaisent pas. Mais peut-être qu’au final, le test est forcément raté dans tous les cas puisque vous ne serez jamais assez parfait pour eux et que c’est ça qui fait votre force dans ce travail.
Comme dit précédemment, vous devez enquêter sur la disparition d’un soldat qui a reçu un appel menaçant peu de temps avant d’arrêter de donner signe de vie. Si vous avez joué à la saison précédente, vous ne serez pas dépaysé : vous retrouvez l’interface familière d’Orwell, la possibilité de fouiller sur des sites internet, des PC et des téléphones portables pour rentrer dans le logiciel toute information qui vous paraît pertinente sur les sujets de votre enquête. Petite différence : à chaque fois que vous déposez un datachunks, le temps avance. Il faut donc éviter de mettre tout et n’importe quoi en espérant que le logiciel fasse une connexion qui débloque d’autres documents.
De nouveaux thèmes d’actualité
Si la Nation est toujours secouée par le terrorisme, il ne s’agit plus de retrouver les coupables de ces actes comme dans la saison 1, avec une critique en fond de la NSA, des réseaux sociaux et de la surveillance généralisée où tout le monde devient suspect à partir d’un emportement sur les réseaux sociaux (bien que cette critique soit toujours pertinente aujourd’hui lorsque l’on voit l’emballement à partir de quelques tweets d’une candidate de télé-crochet). Dans cet épisode, vous vous intéressez au destin individuel d’une personne, qui vous amène à de plus grands thèmes comme la crise des réfugiés, la guerre en Syrie (qui n’est pas la Syrie dans le jeu mais vous m’avez compris), le traitement qui leur est réservé et la peur du terrorisme reportée sur eux. Ca semble un peu trop familier ? C’est normal, Osmotic Studios est un studio allemand et un jeu aussi ouvertement politique ne pouvait pas passer à côté du sujet le plus important en Europe depuis quelques années et de la honte qui pèse sur le continent à ce propos.
Il était dit que cette nouvelle saison aborderait le sujet des « Fake News » (d’où le titre du jeu) mais je dois avouer que j’ai trouvé ça plutôt discret pour le moment. Bien entendu, il y a les articles du journal d’état, qui sont évidemment pleines de fake news mais qui sont plus de la propagande que ce qu’on entend aujourd’hui lorsqu’on utilise ce terme. On voit un peu de l’emballement des réseaux sociaux lorsque le rédacteur en chef d’un journal d’opposition (qui tweet un peu trop comme Donald Trump) est accusé d’un crime alors qu’il n’y a aucune preuve, mais rien de plus. Cependant, il y a une sorte de Wikileaks, sur lequel il est possible d’envoyer des documents. Je n’avais rien à leur envoyer pour le moment mais je pense qu’ils auront un rôle à jouer par la suite dans cette histoire de fake news, en espérant une critique de l’organisation qui ne brille pas par sa pertinence et son impartialité depuis l’élection de Donald Trump.
Bien évidemment, je conseille de jouer à cette nouvelle saison d’Orwell, qui s’annonce tout aussi intéressante que la première. Vous serez sûrement un peu frustré par la longueur des épisodes (à peine une heure pour le premier) et l’attente de deux semaines entre chacun mais j’ose espérer que l’on ne sera pas déçus par la suite. J’espère cependant que les prochains épisodes seront plus longs, vu qu’il n’y en aura que trois cette fois. Mais je vous dirai tout ça dans ma critique après la sortie du jeu complet.
Rise of the Industry
En cette ère macronienne de progrès et de croissance (oui bon, surtout pour les entreprises), la critique de l’early access de Rise of the industry m’a paru évidente. L’intitulé du jeu est clair : faire du fric, écraser la concurrence, croître, et dominer sur la durée. Une vraie publicité pour le MEDEF en somme. Mais les jeux de gestion, c’est souvent très cool, quel que soit le message porté. Malgré pas mal de faiblesses, le jeu s’en tire pas trop mal. Bienvenue dans le monde du profit roi.
Le process est bankable
Le jeu se veut à la fois accessible et complet. C’est déjà une belle ambition pour un jeu de gestion, un genre qui pousse trop souvent les développeurs à faire l’impasse sur l’un ou l’autre. L’écran principal propose plusieurs modes, un tuto, un mode de parties personnalisées aux paramétrages multiples (custom), un mode libre (freeplay) où tout est débloqué, et enfin un mode carrière. Les deux derniers possédant 3 niveaux de difficulté, facile, moyen et difficile, en gros.
S’agissant du jeu lui-même, il rappelle graphiquement un autre jeu de gestion, Kingdom and Castles du studio Lion Shield, sorti cet été. C’est plutôt agréable, ça fait pas mal jeu mobile d’ailleurs, même si j’imagine que les calculs de processeur réclamaient au moins du PC. La raison : l’évolution perpétuelle de la carte. Les villes évoluent aléatoirement, les entreprises, usines et fermes sont générées aléatoirement, et le tout est sur une map qui est générée de façon procédurale.
Ca fait pas mal minecraft grande échelle et industriel jusque-là. Et c’est de toute façon ce qui m’avait attiré dans la présentation qui était faite du jeu : liberté dans le choix de votre production, monde à chaque fois différent, et évolution permanente de l’univers dans lequel on évolue.
L’art d’être productiviste
On ne va pas se mentir, la prise en main est franchement balèze. Une difficulté largement accentuée par la présence de l’anglais comme seule et unique langue. Alors certes, les développeurs ont prévu de remédier à ça, mais en attendant, ça rend le jeu pas facile d’accès.
On pouvait s’attendre à une prise en main croissante, et la sensation de pouvoir après un certain temps maîtriser chaque détail de la production et de concevoir facilement des schémas efficaces, reproductibles et adaptables. En gros, tout ce qui forge la base d’un bon tycoon.
Et dans Rise of the Industry, autant le jeu nous laisse avoir une maîtrise totale de notre gestion, depuis la matière première jusqu’à la livraison du produit final, comprendre les rouages du jeu relève du véritable défi. Et pas le défi motivant mais plutôt le défi chiant. Et je me suis rendu compte alors que le tutoriel était beaucoup trop évasif. On ne comprend que moyennement l’intérêt de rajouter des flottes de camions pour les livraisons alors que vos bâtiments de production en possèdent déjà. On fait l’impasse sur les implications des besoins initiaux de chaque ville, sur le commerce extérieur, le délai de transport, la balance bénéfices/pertes, etc. Bref si vous n’avez pas un peu de connaissances en commerce de base, le jeu sera très long avant de devenir intéressant.
Heureusement, en mode libre, vous n’avez pas le problème de devoir débloquer de spécialisation pour vos technologies. Hé mais oui, j’ai pas parlé de ça encore. Vous devez plus ou moins vous spécialiser en mode carrière. Ca vous donnera des bonus, et ça se débloquera au fur et à mesure. Par exemple, les fermes, au lieu de ne pouvoir héberger que 3 champs, pourront en héberger 5. Ca paraît super complexe mais vu qu’en mode carrière c’est la galère au démarrage, ça force vite à suivre un schéma plus ou moins similaire à chaque fois, à savoir améliorer déjà les fermes. Vous pouvez aussi pour la récolte du bois, et l’industrie de l’ameublement, mais je trouve ça plus contraignant.
Mais le jeu n’est pas mauvais dans son aspect gestion. C’est assez plaisant, pour ceux qui aiment le genre, de gérer de A à Z la production. On se prend vite à étudier les fluctuations et des offres et demandes de chaque ville, à profiter des baisses de charges, ou encore attendre certaines périodes de fêtes pour changer sa production. C’est même agréable de savoir qu’à partir de la petite ferme de vaches qu’on contrôlait au départ, on a réussi à posséder un royaume de la manufacture textile, puis un empire pétrochimique. Mais ça, c’est mon égo qui parle.
Affaire pas encore à suivre
Derrière, le jeu atteint quand même vite ses limites. Déjà, quelques ralentissements lorsque mon empire tentaculaire a pris possession de la carte, alors même que graphiquement le jeu n’est pas gourmand.
Ensuite, et c’est le gros du problème, le fait que le jeu n’ait pas de narration. C’est pourtant ce qui fait souvent la force des jeux du genre. Partir de rien pour arriver au maximum, c’est marrant, mais c’est quand même mieux avec une histoire solide. On aurait pu imaginer un scénario avec des concurrents, un jeune prodige rival, une vieille entreprise historique sur le déclin, une société ultra technologique mais détestée des populations, il y avait matière.
Enfin le point final, c’est la direction prise par l’équipe de développement. On est en 2018, et, même si j’ai bien compris que le but c’était de se baser sur l’évolution de l’industrie au 20ème siècle, un petit peu de regard critique, ça a jamais tué personne. Le jeu ne se vend pas comme une reconstitution, alors proposer un mode « histoire alternative » par exemple, ça aurait pu être sympa. Une manière de vendre une idée d’industrie verte, ou de changer la manière d’échanger et vendre les ressources, ça aurait pu être des voies possibles.
Quoiqu’il en soit, le jeu est en early access, alors peut-être que certaines de ces idées sont prévues, mais à 20€, on est en droit d’attendre quelque chose de plus complet. A ce prix là, autant acheter Factorio.
Fanny Dufour
Rédactrice le jour et rédactrice en chef la nuit. J'aime qu'on me raconte des histoires, mais seulement dans les jeux.
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