Dans le Backlog de TPP, les rédactrices et rédacteurs du site dépoussièrent leurs bibliothèques virtuelles et viennent vous parler tous les mois de jeux, récents ou anciens, enfin sortis de leurs backlogs et qui les ont séduits. En ce mois d'avril, Zali s'attaque enfin aux Midnight Scenes d'Octavi Navarro, Murray cherche les secrets des secrets d'Animal Well, Shift lui cherche son chemin dans Little Kitty, Big City et Ory a voyagé à dos de pigeon dans Small Saga.
Zali : Midnight Scenes
[musique angoissante et objets qui flottent dans l'air de manière bizarre] Vous vous avancez dans la nuit. Une ombre vous regarde. Est-elle réelle ? Ou un reflet de votre imagination fébrile ? Bienvenue dans un voyage terrifiant, aux frontières des dimensions et du possible. Attention, derrière vous, un spectre non euclidien vous pose son tentacule spectral sur l'épaule et vous force à regarder... La Zali Dimension.
Bon, ok, j'avoue, j'ai peut-être une obsession un peu trop poussée pour les œuvres qui s'inspirent à fond la caisse de Twilight Zone. Mais malgré ça, je n'avais jamais pris le temps de jouer aux jeux de la série de nouvelles vidéoludiques Midnight Scenes du développeur Octavi Navarro. C'est désormais chose faite.
À peu près chaque année, Octavi Navarro sort un jeu horrifique court (entre 15 minutes et deux heures pour voir le générique de fin). Certains de ces titres prennent la forme d'un épisode d'une anthologie d'épouvante classique, les Midnight Scenes : de courts contes macabres centrés sur un ou deux personnages aux prises avec un événement particulièrement perturbant. Et souvent très gore. Et, bon sang, que c'est bien écrit ! Que l'on découvre l'histoire d'un accident de voiture aux causes surnaturelles, d'un bois abritant un spectre vengeur ou d'un passager d'avion se réveillant seul à bord, la terreur est à chaque fois au rendez-vous.
Ce qui frappe particulièrement quand on enchaîne les épisodes rapidement, c'est à quel point Navarro s'améliore de manière de plus en plus évidente à chaque itération. D'un minuscule point and click un peu gauche, mais plein de bonnes intentions, on passe lentement à de vraies nouvelles horrifiques vidéoludiques ambitieuses qui trouvent peu à peu une personnalité propre. La série est souvent proposée en bundle pour une bouchée de pain, et chaque épisode ne coûte que trois à cinq euros : il serait donc dommage de s'en priver.
Murray : Animal Well
Alors, désolé, mais je n'ai vraiment que quelques paragraphes à vous accorder dans mon temps libre. J'aimerais retourner rapidement à ma 50ᵉ exploration du monde d'Animal Well. Je n'ai pas encore tout trouvé, et je viens de débloquer un taille-crayon qui va révolutionner ma vision du jeu.
Le taille-crayon mis à part, tout ce que je viens de dire est vrai et je ne regrette pas un seul moment les heures que j'ai pu passer à redécouvrir encore et encore le monde du jeu. Dans Animal Well, vous incarnez une petite créature qui a pour but de collecter les flammes d'animaux mystiques. Si son histoire n'est pas folle, l'univers lui est incroyable (et beau !).
Dans ce que j'appelle un puzzle-platformer metroidvania, vous allez parcourir 4 zones comprenant chacune un objet du quotidien à la fonction première très utile (par exemple un yoyo qui vous permettra d'atteindre des boutons hors de portée). Mais vous finirez toujours par lui découvrir une à plusieurs autres utilités qui vont changer votre vision du jeu et de ce que vous pouvez y faire.
Vous craignez les allers-retours ? Plus maintenant ! Chaque décor que vous avez déjà vu 20 fois cache un mystère auquel vous n'aviez pas fait attention. Si je devais le comparer à un autre titre, j'irais du côté du plaisir des énigmes de Tunic (les combats emmerdants en moins).
Le jeu de base, déjà très réussi, peut se faire en l'espace de 5 heures. Vous pouvez multiplier plusieurs fois cette durée de vie pour espérer trouver tous les mystères du titre. Mais rien ne vous oblige à le faire ! Bon, c'est pas tout, mais je dois y retourner, j'ai regardé mon dossier de captures d'écran ce matin et j'ai un truc à tester...
Shift : Little Kitty, Big City
Il y a des jeux comme ça que l’on attend de pied ferme. Ils sont présentés un jour dans une conférence quelconque, puis les mois et les années passent, on les revoit régulièrement de showcase en showcase, une date se présente enfin après moult reports et badaboum, ça sort la semaine du shadowdrop de Hades 2. Moche (bon, surtout pour nous, car il s’est tout de même très bien vendu). Il y a deux raisons qui ont motivé cette attente. La première réside dans le titre, Little Kitty, Big City : évidemment que l’on souhaite incarner et aider cet adorable chaton égaré dans la grande ville. La seconde, c’est le nom du lead du studio Double Dagger, à savoir Matt T. Wood, ancien de Valve ayant bossé sur rien de moins que Left 4 Dead 2, Portal 2, Half-Life 2 ou encore CS:GO, bref, quelqu’un qui a plus que fait ses preuves en termes de conception de jeux vidéo.
C’est d’ailleurs sur ce point que brille tout particulièrement Little Kitty, Big City. Car, évidemment qu’il est mignon ce jeu, bien sûr qu’il est parfaitement feel good : on peut miauler, ronronner, casser des pots de fleurs, embêter les passant·e·s, attraper les oiseaux (mais sans les manger) et devenir pote avec toute la faune de cette grande ville, mais ça n’a jamais suffi à faire un bon jeu, comme en témoigne bien malheureusement une tripotée de jeux étiquetés Wholesome. Et le vrai gros point fort du titre, qui permet d’ailleurs d’apprécier à sa juste valeur cet adorable enrobage, c’est son level design.
Little Kitty, Big City est un minuscule monde ouvert, dont la zone explorable est réduite à un petit quartier dont on fait le tour en à peine deux ou trois heures (comptez plutôt sept ou huit si vous souhaitez faire toutes les quêtes, ce que je recommande fort). Et si ce scope très resserré peut inquiéter quant à l’intérêt du titre, il n’en est rien. Dès la première heure, on se rend compte que chaque ruelle, chaque immeuble a été conçu avec la plus grande finesse. L’exploration est ainsi incroyablement organique : c’est tout simplement grisant de découvrir ce petit quartier segment par segment, d’en comprendre les recoins, les raccourcis, la verticalité, de le voir s’ouvrir à mesure que les quelques compétences se débloquent, toujours de manière naturelle et fluide.
Je n’aurais jamais imaginé passer un aussi bon moment sur un titre d’une apparence aussi modeste et à la taille aussi réduite, et c’est entièrement grâce à cette conception quasiment irréprochable qui permet à la fois de profiter de l’ambiance chill, mignonne et souvent drôle, et d’excuser les deux/trois couacs techniques pouvant survenir dans la plateforme. Une attente fort bien récompensée ! (Aucune pression pour Silksong, bien sûr).
Ory : Small Saga
Dans Small Saga, j'ai rencontré un couple d'écureuils gays, sauvé une princesse taupe irlandaise et affronté un écureuil (gris celui-là, une espèce invasive) qui m'expliquait, en tirant sur sa cigarette électronique, que les antifascistes sont les nouveaux fascistes. Tiens, et j'ai aussi voyagé à dos de pigeon, ce qui devrait être le transport par défaut dans n'importe quel jeu vidéo.
Développé en solo par Darya Noghani (et financé grâce à un Kickstarter), Small Saga est un RPG qui se déroule dans une société médiévale composée de rongeurs en tout genre, située en dessous de Londres et constituée d'à peu près tous les déchets humains possibles et imaginables. Vous incarnez Verm, une souris bien décidée à se venger des dieux eux-mêmes (les humains) après avoir perdu sa queue et gagné une grosse épée (un couteau suisse) au paradis des souris (un supermarché). Tout un programme.
En revanche, je dois évacuer un point important : Small Saga n'est pas un très bon RPG. La faute à un équilibrage aux fraises qui rend les combats beaucoup trop faciles et ne rend pas justice à son système au tour par tour, ni à l'originalité des ennemis qu'on affronte. Ennemis qui ont au moins l'intérêt d'être prédéterminés, ce qui évite de se perdre dans des combats aléatoires pénibles. Est-ce que c'est grave ? Eh bien, pas vraiment, et si ça m'a fait souffler au début, je me suis quand même laissée embarquer dans cette histoire de rongeur énervé avec une grosse épée qui répète tout le temps "whatever" (On te voit, Cloud).
Aussi parce que Small Saga est bien écrit, se permet même un sous texte malin sur l'écologie et le traitement des minorités, et tient parfaitement son histoire sur les 8/10h qu'il faut pour en voir le bout et faire les quelques quêtes secondaires qu'il propose. Chaque ville, chaque niveau est bourré d'idées visuelles brillantes, les personnages sont attachants (je sais, je suis le public cible pour un barde gay). Et la musique ? Eh bien disons que si vous n'avez jamais affronté un boss avec en fond sonore un documentariste anglais qui parle d'extinction humaine, c'est une expérience.
Small Saga est le genre de jeux que j'aime bien trouver de temps en temps. Ce genre de jeux qui raconte une chouette histoire, pas forcément parfait, un peu bancal peut-être, mais profondément attachant. Ce genre de jeux qui me fait dire après coup : en vrai, ce serait super cool de voyager à dos de pigeon, non ?
Retrouvez nos avis sur d'autres jeux du mois de mai
zalifalcam
J'aime les jeux double A, les walking simulateurs prétentieux et les JRPG, et plutôt que de me soigner, j'écris à leur propos.
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