Je déteste mourir dans les jeux vidéo. Je vous l’accorde c’est sans doute quelque chose de commun à beaucoup de joueurs mais je prends vraiment la chose trop à cœur. Pour moi, la mort d’un ou de plusieurs des personnages que je contrôle est un affront personnel à mes qualités de joueur. Mais depuis que j’ai pu jouer à Rage in Peace, plateformer par le tout jeune studio Rolling Glory Jam, la mort n’a plus d’emprise sur moi (ou alors je suis mort à l’intérieur…).
Vers la fin des années 1920, avoir un réfrigérateur représentait un gros risque : la moindre fuite des gaz circulant à l’intérieur pouvait entraîner la mort de tous les habitants de la maison. Arriva alors Thomas Midgley et ses bonnes intentions. Il mit au point le premier des Chlorofluorocarbures (très classe à placer dans un dîner) à savoir le Fréon. Résultat : de meilleures performances et surtout adieu la toxicité ! Ce n’est que des dizaines d’années plus tard qu’on découvrira l’effet dévastateur qu’a pu avoir le Fréon sur la couche d’ozone, faisant monter Thomas Midgley sur le podium des destructeurs de mondes à côté de Thanos et de la Tecktonik. Comme quoi on peut avoir une super bonne idée de départ pour un résultat catastrophique… Ça y est vous voyez où je veux en venir ?
Une belle journée pour mourir
Timmy Malinu est un employé de bureau tout à fait lambda (si ce n’est qu’il a une tête de chamallow). Alors qu’il s’apprête à commencer une journée de boulot de plus, débarque dans sa vie la (pas très grande mais toute mignonne) faucheuse et les nouvelles ne sont pas bonnes. Sortant son dossier (apparemment l’administration domine aussi l’au-delà) elle lui annonce qu’il s’agit de son dernier jour sur terre et qu’il va mourir décapité.
Notre héros prend plutôt bien la nouvelle, même s’il a un regret : son rêve était de mourir au chaud, tranquillement dans son lit, en pyjama. Bonne nouvelle pour lui, son dossier ne précise ni le lieu, ni l’heure à laquelle il va mourir. La mort lui laisse donc la possibilité de rentrer chez lui pour réaliser son rêve…enfin s’il arrive à rentrer chez lui en passant les innombrables pièges qui vont se dresser sur sa route.
C’est donc avec cette idée de départ originale que démarre l’aventure de Rage in Peace, un jeu de plateforme (extrêmement) mortel dans lequel votre personnage va devoir réussir à rentrer chez lui en passant par différents mondes (5 pour être exact) allant de l’immeuble de bureaux jusqu’à la jungle amazonienne en passant par la pyramide d’Egypte. Chacun de ces mondes est divisé en niveaux parsemés de nombreux checkpoints. Mais pourquoi autant de checkpoints dans un jeu qui se finit en 5 heures ? Parce que vous allez en avoir besoin pour ne pas devenir complètement dingue…
Du rire aux larmes de sang
S’il a fallu plusieurs dizaines d’années aux scientifiques pour découvrir que Thomas Midgley et son Fréon étaient responsables d’une belle catastrophe écologique, 10 minutes auront été suffisantes pour moi avec Rage in Peace. Faisons un petit comparatif avec Super Meat Boy, jeu de plateforme incroyable bien que (très) exigeant (je me permets de faire cette comparaison, le personnage principal citant lui même son homologue à un moment). Dans Super Meat Boy donc, vous essayez d’aller au bout du niveau en évitant les différents pièges sur votre route. Vos morts (qui seront nombreuses) ne sont que le résultat de votre manque de coordination (aucun jugement ici). Maintenant, imaginez un jeu similaire, mais avec des pièges qui n’apparaissent qu’à la dernière seconde.
Voilà le principal problème de Rage in Peace, sauf que c’est un peu la base du jeu. Vous allez mourir, encore, encore, et encore avant de pouvoir atteindre le checkpoint suivant et mourir à nouveau. Vous n’aimez pas le par cœur ? Passez votre chemin. Chaque niveau du jeu se présente de la même manière : un peu moins d’une dizaine de pièges dans lesquels vous allez tous (ou presque) tomber les uns après les autres avant d’atteindre le checkpoint suivant. Et parfois pour briser cette monotonie mortelle, un boss, que vous n’allez pas battre directement mais qu’il vous faudra éviter jusqu’à ce qu’il finisse par s’épuiser de lui-même.
J’ai bien eu une lueur d’espoir avec l’existence d’un mode “amnésie”, a priori plus facile. Mais mon espoir fut de courte durée puisque son seul intérêt est de rajouter des checkpoints supplémentaires, ne vous empêchant ainsi pas de tomber dans tous les pièges des niveaux traversés.
Et ce n’est malheureusement pas l’originalité des différents trépas que vous allez rencontrer (de la langue de crapaud jusqu’à la fourchette géante) qui va calmer la colère qui va monter en vous petit à petit devant toutes ces morts injustes, d’autant plus que certains éléments sont parfois piégés, parfois pas et parfois juste pas de la même manière. Oui, à l’image de Timmy, notre héros chamallow, vous allez pleurer des larmes de sang.
Dans l’incompréhension la plus totale, j’ai cherché à savoir quel était l’intérêt de ce type de gameplay, ma seule hypothèse étant la possibilité pour un Youtubeur de se montrer en train de jouer et de s’énerver devant des spectateurs hilares. Et il se trouve que j’ai visé juste. En effet, j’ai découvert que le jeu tire ses origines d’une Game Jam sobrement intitulée “IndieVsPewDiePie” dont le but était de créer des jeux amusants à streamer même si cela se faisait aux dépens du célèbre Youtubeur.
Raide dead sans rédemption
Malgré tout ça, on essaye de s’accrocher, de finir le jeu et de lui trouver des qualités…mais ce n’est pas toujours évident. Rien à redire sur la maniabilité, on trouve en plus des flèches directionnelles un simple bouton de saut (qui sera doublé plus tard dans l’aventure) et le jeu est précis juste comme il faut. Aucun reproche à faire non plus sur les graphismes : c’est très joli notamment lorsque la caméra s’éloigne du personnage principal pour montrer de grands espaces, ça ressemble à une production de The Behemoth (Castle Crashers, BattleBlock Theater), c’est fluide et les quelques personnages que l’on croise se vendraient sans doute très bien en version peluche.
Mais c’est surtout l’histoire avec son point de départ original, qui nous invite à continuer malgré tout pour connaître son dénouement. D’autant plus qu’on comprend rapidement lors des différentes discussions pendant les niveaux, mais aussi lors des quelques cinématiques entre les mondes, que notre héros, s’il n’aura peut être bientôt plus d’avenir, a eu un passé. Le tout est malheureusement trop convenu. On comprend un peu trop rapidement ce qui a pu se passer dans la vie de Timmy et c’est toujours gênant de comprendre avant le personnage que l’on contrôle les tenants et aboutissants de son histoire (surtout quand il faut attendre une ou plusieurs séances de torture supplémentaires pour qu’il en arrive au même point que nous).
Concernant enfin la musique, si le studio se targue d’avoir pu collaborer avec de nombreux artistes indépendants, il n’a malheureusement pas réussi à conjuguer les belles chansons qu’il a pu récupérer avec les cinématiques qu’elles illustrent. A croire que le responsable a juste tapé “indy music bitter sweet” dans Spotify avant d’appliquer la playlist au jeu.
Rage in Peace a été testé sur PC via une clé fournie par l’éditeur
J’aurais tellement voulu aimer Rage in Peace, mais lui ne semble pas vouloir être aimé. Ne restent que les regrets d’un jeu qui n’a aucun problème de gameplay, qui est beau, qui a un synopsis rempli d’originalité et d’humour mais qui n’a jamais su quoi faire de tout ça…Ah si, il me reste un dernier fun fact tout à fait à propos : ce cher Thomas Midgley a été retrouvé mort dans son lit comme Timmy l’a toujours voulu (mais empêtré dans le système de poulies qu’il avait inventé pour combler ses problèmes de santé l’empêchant de bouger…)
Murray
J'aime me prendre la tête, mais uniquement quand c'est dans un jeu vidéo. Sinon j'aime aussi la vie, mais ce n'est pas un amour réciproque.
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