Journal de bord, rédacteur Shift. Je viens de recevoir le dernier jeu en date d’une saga mythique, déjà âgée de 19 ans : Pikmin 3 Deluxe. J’espère être de taille pour l’expédition qui s’annonce, car je suis parfaitement ignorant de ce qu’a pu produire cette licence jusqu’ici, mais je pars confiant – Voix du narrateur : « Cet idiot de Shift pensait encore à ce stade avoir demandé un jeu Lemmings. » – et plein de bonne volonté.
Exploration – Jour 1. Bonne nouvelle : finalement, j’ai déjà joué à Pikmin, ça s’appelait Overlord, et c’était très bien. Mauvaise nouvelle : j’y étais très mauvais, et n’avais à l’époque pas réussi à le terminer. Espérons maintenant que le Shift actuel soit meilleur que le Shift au collège, car pour les besoins de cette critique – et l’intégrité physique de mes petits compagnons – , il serait préférable d’atteindre la fin. N’ayant pas de point de comparaison avec la version d’origine – puisque, pour rappel, il s’agit d’un opus remasterisé et enrichi du Pikmin 3 sur Wii U de 2013 – je suis allé regarder des extraits de let’s play pour me cultiver un peu. La première remarque est que visuellement, la différence n’est vraiment pas flagrante, mais le Deluxe du titre n’est visiblement pas adressé à un polish technique. C’est du côté gameplay que le remaster prend plus de sens et à peine le jeu démarré, je suis ravi de pouvoir verrouiller mes cibles pour que mes Pikmins ne partent pas dans tous les sens. Je visualise parfaitement la débandade qu’aurait été un groupe mené par ma personne sans cette fonctionnalité. Débarquant complètement sur la licence, je suis également rassuré de pouvoir choisir mon niveau de difficulté, ainsi que de pouvoir demander des astuces au jeu quand je ne sais pas quelle tâche prioriser – deux autres ajouts de cette version Deluxe. Comme quoi, une nouvelle fois, il est possible de combler les attentes d’un public confirmé tout en étant accueillant pour les joueurs et joueuses occasionnel·les ou débutant·es.
Exploration – Jour 2. Note à moi-même : pour le bien de ma santé mentale, il faut baisser le son quand tous les Pikmins attaquent en même temps. Quelle cacophonie des enfers, ils ne la bouclent jamais.
Exploration – Jour 3. J’ai rencontré mon premier boss. Attendez, quoi, il y a des boss dans Pikmin ? Mes deux premiers jours ont consisté à progresser dans l’histoire – mon petit aventurier s’est crashé sur la planète dont il comptait piller les ressources et doit maintenant retrouver ses coéquipiers dont il a été séparé et réparer son vaisseau à l’aide des Pikmins, créatures autochtones – à savoir résoudre de simples énigmes à l’aide des deux sortes de créatures contrôlées (les Pikmins rouges font la bagarre, les Pikmins noirs cassent des trucs) et récolter des fruits pour ne pas mourir de faim. Une progression assez chill donc, dans laquelle le seul élément perturbateur pour l’instant avait été la perte de deux Pikmins lors de la deuxième nuit, et dont la cinématique les montrant se faire dévorer par de grosses grenouilles m’avait brisé le cœur. L’apparition de ce mille-pattes géant a donc été un choc, particulièrement quand ladite bestiole a boulotté la moitié de mon groupe pour son déjeuner. La logique reste cependant la même, les combats de boss conservent la même structure que le reste de la progression, à savoir jongler entre les différents groupes de Pikmins selon leurs capacités propres. Je rentre au vaisseau avec le cadavre de l’insecte géant pour pleurer mes pertes.
Exploration – Jour 4. J’ai décidé de ne pas suivre la suite de l’aventure et de retourner dans une région déjà explorée pour ramasser plus de fruits, car l’état de mes ressources m’inquiète : je n’ai qu’une faible marge de manœuvre pour l’instant, puisque mes aventuriers boivent une bouteille de jus par jour. J’aurais dû écouter les conseils du jeu : mon équipe n’est pour le moment pas en état de progresser outre mesure dans ce niveau, il me manque encore très certainement des types de Pikmins pour avancer. Fort heureusement, il est possible d’annuler la sortie du jour pour reprendre comme si de rien n’était. Il est même possible de retourner plusieurs jours en arrière si les décisions se sont avérées trop moisies, c’est bon à savoir en cas de gestion digne d’un certain gouvernement.
Exploration – Jour 7. Je commence à enfin bien comprendre les mécaniques de Pikmin 3 et ce que le jeu attend de moi. Avoir le contrôle de plusieurs personnages permet d’être multi-tâches : un groupe peut ainsi progresser dans l’histoire, tandis que l’autre récolte des fruits, des fleurs – qui font pousser de nouveaux Pikmins – ou tape des monstres. La gestion de différentes sections a pu me faire peur au début, car mon cerveau n’est certainement pas câblé pour traiter différentes infos en même temps, mais l’interface et les notifications rendent le processus plutôt aisé et je m’en sors finalement pas mal. Cet aspect me fait néanmoins regretter d’être confiné seul chez moi, car cela m’empêche de profiter d’un des ajouts majeurs de cette version Deluxe : le mode coopération, qui permet à deux joueurs de progresser en écran splitté, ce qui m’aurait évité le stress du multitasking. Connard de virus. Mais pas le temps de m’apitoyer sur mon sort : j’ai vaincu le deuxième boss dont je ramasse victorieusement la carcasse – après un échec la veille – et ce grâce aux Pikmins jaunes découverts au jour 5 et qui peuvent notamment conduire l’électricité, donnant lieu à de sympathiques énigmes basées sur la lumière. Mes stocks de fruits commencent à être acceptables, je suis plus confiant pour la suite de la mission.
Interlude : L’épopée d’Olimar. Nouvel aspect de la version Deluxe dont je peux au moins profiter tranquillement : des missions annexes, mettant en scène Olimar, personnage principal des deux premiers jeux, faisant office de prologue à l’aventure de Pikmin 3, ce dernier s’étant également planté sur la planète PNF-404 avec son coéquipier Louie. Ces niveaux conservent la même structure que le reste du jeu – je n’espérais pas une refonte du système de toute manière – en mettant tout de même en place un système de notation, le seul objectif de ces missions étant de récolter un maximum de fruits dans un temps limité et avec les Pikmins mis à disposition – voire de tous les récolter pour obtenir une médaille de platine, que j’ai remporté non sans fierté. C’est également l’occasion pour moi de rencontrer les Pikmins bleus avant leur apparition dans l’histoire. Un choix un peu curieux en termes de progression pour une personne découvrant la saga, puisque l’on se retrouve avec une phase de tuto pour un élément indispensable du jeu… dans une mission annexe – vers laquelle le jeu nous pousse, certes, mais qu’il reste complètement possible d’ignorer – et qui donne à ces niveaux un petit goût de cadeau aux fans, à côté duquel je passe un peu. Néanmoins, cette petite pause dans l’histoire pour récolter des fruits sans pression ni enjeux est bienvenue et, je dois dire, le point pivot qui m’a fait réellement m’impliquer dans le titre.
Exploration – Jour 15. Deux boss vaincus de plus, et autant de types de Pikmins découverts – les bleus, déjà rencontrés avec Olimar et les roses, qui peuvent voler. Mon équipe est désormais au complet et les combats de boss, tout comme les énigmes, se sont significativement complexifiés, requérant toujours plus de savoir jongler entre les différentes capacités des bestioles et le multitasking – mais toujours en étant parfaitement au niveau de la quiche en gestion que je suis : question difficulté, le mode normal de Pikmin 3 me va comme un gant, je ne reste jamais bloqué trop longtemps, sans non plus rouler dessus, me procurant autant de séquences de stress que de fierté. À ce sujet, ma vitesse de croisière sur le titre est enfin passée à l’étape supérieure. Jusque-là, ma progression dans Pikmin 3 s’était vue aussi lente que régulière : je n’arrivais pas à avoir envie d’y jouer à un autre moment de la journée que le soir dans mon lit, niveau par niveau, comme les petites pastilles sucrées qu’ils étaient avant d’aller dormir – et alors que je m’étais déjà brossé les dents, ah ben bravo. Je ne sais si c’est l’accélération du scénario sur sa dernière ligne droite, avec une prise d’importance des enjeux, une meilleure maîtrise et compréhension des mécaniques de ma part, une prise de confiance subite, ou un peu de tout cela à la fois, mais une chose est certaine : je viens d’y passer mon dimanche. Et j’en ressors fier comme Olimartaban.
Exploration – Jour 19. OUF. Boss final battu, après trois jours d’échecs cuisants et une course-poursuite particulièrement stressante, mais condensant à la perfection toutes les mécaniques apprises et rencontrées durant l’aventure. En cela, Pikmin 3 est une merveille de courbe de progression et de difficulté. Tout m’a semblé si logique et fluide, l’apparition de nouveaux Pikmins, obstacles, boss et environnements s’est toujours faite pile au bon moment – à condition de considérer L’épopée d’Olimar comme partie intégrante de la progression et non comme les missions annexes présentées par le jeu – et je ne me suis senti ni trop pris par la main, ni jeté dans le grand bain sans repères. Tout a été assimilé et exécuté avec douceur, grâce à la plus grande qualité que peut avoir un puzzle game de la trempe de Pikmin : son level design impeccable, qui fait comprendre instantanément au joueur ce qu’on attend de lui, ce qu’il sera possible de faire maintenant ou qu’il faudra revenir faire plus tard. Malgré tous les obstacles que le titre peut mettre sur notre chemin, la construction de ses niveaux est la meilleure alliée que l’on aurait pu espérer, qui, en étant aussi lisible et explicite, permet au joueur de se concentrer sur sa gestion de groupes et résolution d’énigmes, sans jamais se sentir débordé ou perdu.
Épilogue : L’épopée d’Olimar 2. Alors que l’histoire principale touche à sa fin, la cinématique de conclusion fait naître en moi une sensation plutôt désagréable – appuyée par ce petit carton annonçant le décès tragique de quelque 235 adorables Pikmins, paix à leurs âmes. Tellement pris dans le sauvetage de mes explorateurs, dans la récolte de fruits pour leur survie et réparation de leur vaisseau, que j’en avais oublié mon objectif principal, ainsi que ce qu’impliquait l’utilisation des Pikmins. La présence de mon équipe sur la planète PNF-404 avait pour but de piller les ressources, afin de les ramener sur Koppai, planète-mère des protagonistes, ce qu’ils ont fait, en exploitant et sacrifiant les autochtones, qu’ils abandonnent une fois leur mission accomplie. Mais Jean Castex va peut-être trouver qu’il n’y a pas de quoi s’en excuser. Débarquant sur une saga de 19 ans d’existence, je ne prétends pas apporter quoi que ce soit de nouveau à ce sujet et je n’invente clairement pas la réflexion sur le sous-texte colonisateur de Pikmin. Je me fendrai ainsi seulement d’un bref : c’est chaud quand même, non ? Non, me dit Pikmin 3 Deluxe, regarde, on renvoie Olimar sur la planète, car ses chefs ne sont pas contents qu’il ait laissé sa fusée sur place, c’est que ça coûte cher une fusée. Alors nous voilà repartis pour sept très chouettes missions annexes, elles aussi inédites, auxquelles pourront s’ajouter un end game dans lequel nous pouvons récolter l’intégralité des fruits dans les zones de l’aventure. Et si j’ai plutôt envie de retrouver ces lieux et ces énigmes quelques heures de plus, je crois qu’elles me laissent tout de même un arrière-goût amer.
Pikmin 3 Deluxe a été testé sur Nintendo Switch via une clé fournie par l’éditeur.
Bilan de l’expédition. La réputation de la saga le précédait : Pikmin 3 Deluxe est sans surprise l’excellent puzzle game que l’on m’avait promis, grâce à son level design inventif, sa courbe de difficulté maîtrisée et fluide et l’addition de mécaniques toujours à point nommé. Les ajouts de l’édition Deluxe sont judicieux, tant du côté de l’ergonomie et de l’équilibrage, que des modes de difficulté proposés, du mode coop et des missions supplémentaires. Seules les personnes possédant toujours une Wii U et Pikmin 3 (je crois qu’il en reste encore deux ou trois) ne verront peut-être pas l’intérêt de repasser 60 balles dans ce qui serait pour elles un gros DLC. Pour les autres, c’est un remaster de très bonne qualité, ainsi qu’une très bonne porte d’entrée pour les néophytes de mon genre. Cependant, j’ai tout de même beaucoup de mal avec le sous-texte de la licence qui sent malheureusement bon l’ode – volontaire ou non – au colonialisme, aussi mignonne et colorée soit-elle. Ce n’était déjà pas un très chouette message à faire passer en 2001, peut-être qu’en en faisant un remaster en 2020, il aurait été judicieux de l’adapter dans la foulée.
Shift
Camélidé croisé touche de clavier et militant pro-MS Paint. J'aime les jeux indés à gros pixels, les platformers sadiques et les énigmes.
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