Cette fois-ci dans Partie Rapide, glau et ses enfants se sont ennuyés dans leur parc à dinos et Shift a affronté loups-garous et vampires dans le sous-sol d'un motel texan.
Paleo Pines
Faut-il en vouloir à un jeu de recopier point par point les principes d’un jeu qui a bien fonctionné ? C’est un exercice dangereux : encore faut-il pouvoir justifier de l’intérêt de la copie. Prenez Stardew Valley : c’était un pari osé que de s’inspirer autant des Harvest Moon. Et pourtant le résultat est un vrai plaisir, porté par une touche personnelle. À la question "y a-t-il un intérêt de jouer à Stardew Valley plutôt qu’à Harvest Moon", la réponse est clairement oui. Et ainsi de suite : on pourrait continuer le fil en reprenant, au hasard, Stardew Valley, mais avec des dinosaures mignons. En tout cas, c’est ce que s’est dit Paleo Pines.
Pas vraiment un diplo docu
Soucieux de trouver sa niche, Paleo Pines vise clairement un public plus restreint : peu de personnages, une "vallée" initialement toute petite, et surtout une direction artistique arrondie clairement orientée vers les 3-7 ans. Sur le dos de mon parasaurolophus bleu qui pousse de petits miaous — contredisant des générations de paléontologues tendant à prouver que leur corne tonnait comme un trombone, mais je suis prêt à passer cette approximation — je fais rapidement le tour des possibilités. Les moyens techniques, trop pauvres, ne permettent pas d’insuffler grand-chose à ce village moins passionnant que celui de Oui-Oui. Rapidement, je lève les yeux au ciel devant les dialogues mièvres et les limitations mal récupérées de l'autre Valley : mon personnage est par exemple toujours limité par une barre d'endurance qui cette fois-ci ne remonte jamais. Reste un tableau de quêtes aléatoires à faire en boucle : apporter le carnet de Pippin à Mari, 3 morceaux de bois à Owynn, 10 patates à Mamie, répéter, encore et encore.
On objectera que mes yeux d’adulte fatigué par la vie, l’abus de café et l’écoanxiété ne sont peut-être pas les meilleurs juges d’un jeu clairement calibré pour les moins de 7 ans. Ça tombe bien, j’ai sous la main quelques bambins qui feront de parfaits cobayes. Attention, il ne suffit pas de les lâcher avec la manette et en profiter pour préparer le dîner. D’une part, le titre lâche parfois des tartines de texte… pour des dialogues pas bien passionnants. D’un autre côté, certaines mécaniques ne sont ni évidentes ni tutorialisées, voire complexes pour les petites mains. Apprivoiser des dinosaures, probablement la meilleure idée du titre, se fait en jouant plusieurs notes de durée variable : sans être inaccessible, l’opération nécessite une bonne coordination manuelle ou l’aide du parent.
Une fois qu’on a pris le rythme, Paleo Pines permet de passer quelques bons moments de complicité. Les enfants, ces créatures étonnantes, résistent mieux aux opérations répétitives et à la niaiserie. Mais il ne faut pas confondre naïveté et stupidité, et ils sont fort capables de débusquer une coquille vide ; la ferme est à peine déblayée que la lassitude se fait sentir. Or Paleo Pines, par peur de griller ses cartouches trop vite, cache la suite derrière une barrière temporelle. Casser les grosses roches qui barrent le passage nécessite de monter un styracosaure. Mais pour avoir le droit de lui mettre une selle, il va falloir lui faire beeeaucoup de câlins. Touuuus les jours.
Paleo Pines a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur.
Non, il ne suffit pas d’ajouter des dinosaures à un concept éprouvé. En tout cas, pas ici : la tentative de récupération mal calibrée ne trompe même pas les plus jeunes. Au bout de quelques heures, le verdict est tombé. "Papa, on peut rejouer à Stardew Valley ?"
El Paso, Elsewhere
Mené depuis quelques années par l’infatigable et talentueux scénariste Xalavier Nelson Jr. (Hypnospace Outlaw, Can Androids Pray, SkateBIRD), le studio Strange Scaffold a su se faire une place dans la niche des jeux étranges à high concept, avec des curiosités comme Space Warlord Organ Trading Simulator, Sunshine Shuffle ou An Airport for Aliens Currently Run by Dogs. Des titres aussi inventifs que bizarres – parfois un peu bancals – mais surtout destinés à un public de niche, bien plus habitué aux recoins d’itch.io et des game jams que du magasin Steam et des conférences de l’E3. El Paso, Elsewhere, nouvelle production du studio, ne détonne pas avec le reste du catalogue Strange Scaffold.
Aller simple pour l'enfer
Véritable patchwork d’influences, El Paso, Elsewhere vient surtout piocher dans Max Payne, autant pour le TPS à la sauce bullet time que pour la narration très film noir, tout en s’inspirant d’une esthétique paranormale bien pulp, avec ce qu’il faut de vampires, loups-garous, nonnes corrompues et autres biblically accurate angels, agrémentée d’un look résolument rétro PSX digne des productions HauntedPS1, sans oublier un poil de drame intimiste et introspectif. Le tout peut sembler terriblement indigeste et chargé présenté de cette manière, et pourtant, ce qui caractérise avant tout El Paso, Elsewhere, c’est sa grande simplicité, autant dans sa structure que dans son gameplay.
Le titre de Strange Scaffold ne propose finalement qu’une seule chose : dégommer des cochonneries de plus en plus monstrueuses et puissantes à l’aide d’un arsenal de plus en plus fourni et dévastateur. Tout juste aurons-nous quelques clefs à trouver pour débloquer la suite d’un niveau, quelques otages à sauver au détour d’un couloir, mais l’essentiel est là : vous allez passer quelque sept/huit heures à trucider du monstre à l’aide de pieux, fusil à pompe, uzi ou lance-roquette, tandis que James, notre protagoniste, narre de sa voix d’outre-tombe son idylle brisée avec la vampire Draculae, qu’il doit désormais empêcher d’accomplir un rituel apocalyptique.
Le succès ou l’échec de ce genre de titres ne tient qu’à peu de choses : quand on ne propose qu’une seule brique de gameplay, on a tout intérêt à ce qu’elle fonctionne parfaitement – c'était la théorie du triple I, notamment appliquée par The Game Bakers pour Furi. Dans El Paso, Elsewhere, deux caractéristiques me semblent essentielles : le game feel des combats et le rythme de la campagne. Côté game feel, toutes les armes ne sont pas forcément à égalité, mais si les petits flingues de début de partie n’apportent que peu de satisfaction aux affrontements, ces derniers deviennent très vite obsolètes face à l’arrivée d’un arsenal autrement plus pêchu, à commencer par un fusil à pompe envoyant valdinguer les cadavres ennemis à l’autre bout de la pièce. Le titre a, de plus, l’élégance de proposer un bestiaire certes pas très fourni, mais aux caractéristiques variées, obligeant les joueurs·euses à judicieusement utiliser l’intégralité des armes fournies pour espérer s’en sortir.
C’est cependant du côté du rythme que j’émettrai quelques réserves. El Paso, Elsewhere est efficace, nerveux dans ses affrontements et propose des niveaux assez courts, ce qui en fait un parfait jeu à picorer : deux ou trois niveaux par session m’ont toujours apporté la dose de fun instantané et de violence décérébrée que je venais chercher. Plus, et la lassitude commence à pointer son nez, la faute à un très grand nombre de niveaux, assez peu variés dans leurs environnements et objectifs et dans leur level design. Quelques segments sortent un peu du lot, avec des boss, des ennemis invincibles qui nous pourchassent à travers le niveau, des salles plongées dans le noir, mais sur la quasi-dizaine d’heures passées dans El Paso, Elsewhere, la variété s'est souvent fait désirer, heureusement contrebalancée par une mise en scène extrêmement efficace, et une bande-son au hip-hop expérimental parmi les plus lourds de l’année.
El Paso, Elsewhere a été testé sur PC via une clé fournie par l’éditeur. Il est également disponible sur PS4, Xbox One et Xbox Series.
Simple, nerveux, efficace et disposant d’une écriture, d’une mise en scène et d’une bande-son absolument exemplaires, El Paso, Elsewhere ne souffre finalement que d’une répétitivité relative, facilement évitable en se contentant d’une poignée de niveaux par jour plutôt que de tout binger comme les sagouins que nous sommes. Au milieu d’une année terriblement chargée en AAA, en RPG touffus et roguelites complexes, le titre de Strange Scaffold est la parfaite opportunité pour souffler le temps de deux ou trois niveaux sur un TPS fun et décomplexé.
glau
Se perd dans des mondes ouverts, dans les rouages de sa propre usine ou dans le fracas des chars, mais trouve toujours un petit chemin de fer pour rentrer.
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