Cette fois-ci dans Partie Rapide, Zali se penche sur les dioramas relaxants de Garden In! et Shift a joué des ânes qui pètent dans l'accès anticipé du roguelite-tactical médiéval Inkulinati.
Garden In!
Je pense qu'il n'y a rien que je déteste plus (toutes proportions gardées) que les débats de type "est-ce que tel ou tel truc est un jeu vidéo ou non". Je crois n'avoir quasiment jamais rien entendu d'intéressant sortant d'une telle conversation. En l'occurrence, le sous-genre du jeu de diorama qui a émergé depuis quelques années ne vous propose certes pas de devoir appréhender des heures de tutoriels et de développer des compétences cognitives et des réflexes poussés, mais fait appel à votre sens de la créativité et de l'observation. C'est déjà bien, et c'est ce que propose Garden In!, la dernière production du studio transalpin Dramatic Iceberg.
Je vous fais une fleur
Quelques minutes suffisent à comprendre tout ce qu'il y a à comprendre dans Garden In! : vous devez placer des pots, du terreau et des graines dans ces pots pour décorer plusieurs pièces d'un appartement. Voilà, c'est tout. Bon, évidemment, j'exagère un peu : il y a différents types de plantes, plusieurs types de sols, diverses façons de s'occuper des pousses, on peut hybrider des espèces… Mais dans l'idée, l'essentiel du gameplay tourne autour de l'idée de choisir où mettre un pot, quoi mettre dedans pour faire joli et améliorer la qualité de l'air de votre bureau.
Une petite particularité vient cependant enrichir le gameplay : les plantes y poussent en "temps réel", c'est-à-dire essentiellement quand vous n'êtes pas en train de jouer. Vous pouvez toujours fixer votre écran en attendant de voir un cactus surgir du sable, ce qui prend généralement quelques heures, mais le titre est davantage pensé pour se prêter à des petites sessions. Vous plantez quelques graines, vous choisissez où ranger les pots, vous fermez le jeu et vous revenez quelques heures plus tard pour admirer le résultat, avec la satisfaction de voir les pièces se végétaliser petit à petit.
À votre retour, vous aurez toujours un petit temps de quelques secondes consacré à traiter les plantes : un peu d'eau, un peu d'insecticide (oui, ce n'est pas le jeu le plus écolo du monde), et tout ce petit monde continuera à pousser dans la joie. Aucune possibilité de voir une plante mourir naturellement, puisqu'au pire, sa croissance se "fige" en attendant les soins. Vous pouvez tout de même choisir de "sacrifier" une plante en la mettant à la poubelle, mais à ceci près, Garden In! demeure dénué de toute forme de violence envers les végétaux. Pas besoin d'avoir la main verte ou de retenir grand-chose, l'interface étant d'une simplicité et d'une clarté confondantes.
On pourrait se lasser assez vite de ce mini-cycle planter/arroser/regarder et, on ne va pas se mentir, ce n'est pas spécialement le truc le plus révolutionnaire de ces dernières années. Néanmoins, Garden In! a la grande intelligence de ponctuer l'aventure en la ludifiant un peu via divers objectifs : faire pousser un certain nombre de végétaux, réaliser un hybride, sacrifier une plante fanée, etc. Un dispositif complété par un système de points livrant des récompenses sous forme de nouvelles semences, de nouvelles pièces à décorer, d'éléments esthétiques ou encore de rangements permettant de faire pousser encore plus de variétés de végétaux. C'est classique et minimaliste, mais ça suffit pour maintenir quelques minutes d'attention par jour, et le jeu n'a aucune autre prétention. On l'en remercie bien bas.
Garden In! a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur.
Garden In! est vendu comme une expérience peu chronophage et relaxante, et c'est exactement ce qu'il est. Il y a peu de choses à y faire sinon embellir lentement et paisiblement un appartement, mais c'est déjà très chouette. On comprend tout très rapidement, on est un peu pris par la main sans non plus être guidés de manière trop intrusive, et l'entretien des plantes ne prend finalement que quelques minutes par jour. Un petit jeu doux et agréable, donc.
Inkulinati
Quatre ans après son annonce initiale, suivie de moult reports et d’une démo présentée lors des Steam Festivals, Inkulinati, mélange de tactical et roguelite à l’ambiance médiévale, arrive enfin en early access. Malheureusement, les craintes soulevées par la démo se voient confirmées : malgré quelques bonnes idées, le titre de Yaza Games ne tient pas la longueur et s’essouffle très vite. Un avis qu’il s’agira cependant de nuancer, étant donné son statut d’accès anticipé : rien n’est encore gravé dans le marbre et du contenu reste à ajouter.
Dans Inkulinati, il y a cul
Inkulinati a surtout accroché l’œil durant ses différentes annonces pour sa direction artistique, reprenant les codes et l’esthétique des enluminures des manuscrits médiévaux – et pour ses ânes qui pètent et autres lapins qui montrent leurs fesses, avouons-le. Une DA finalement coiffée au poteau par le récent Pentiment, annoncé après Inkulinati, mais sorti quelques mois plus tôt. Pas de chance. La partie visuelle fonctionne tout de même très bien : le titre exploite très correctement son concept de dessins qui s’affrontent sur la page d’un manuscrit, tandis que les mains de leurs auteurs et autrices apparaissent régulièrement à l’écran pour dessiner, pousser ou écraser un personnage, et que la cinématique d’intro en prise de vues réelles nous montre un chevalier et une bonne sœur s’affronter autour d’un livre. Un aspect que le studio a également développé dans le gameplay, pas toujours pour le mieux.
Comme dans nombre de tacticals, Inkulinati nous place, niveau après niveau, dans une arène dans laquelle il s’agira de battre le boss adverse ou d’éliminer tous les soldats ennemis, dans des combats au tour par tour. Et avant de ronchonner, force est de constater que Yaza Games apporte un certain nombre de bonnes idées pour tenter de dynamiser et varier l’expérience. Notre mini-Inkulinati, projection dessinée de notre personnage, peut invoquer des combattants grâce à un stock d’encre vivante, dont la jauge se remplit en faisant peu d’actions dans son tour ou en plaçant ses unités sur des taches apparaissant de manière aléatoire sur le manuscrit. L’aspect intéressant, c’est que le coût de nos unités n’est pas fixe et pourra augmenter ou diminuer selon le niveau d’ennui de notre dessinateur·rice : plus un type d’unité est dessiné, plus l’ennui augmente et plus il coûte cher à invoquer (et inversement). Un aspect assez chouette, qui force un peu à varier la nature de ses combattants et donc la stratégie à adopter d’un niveau à l’autre.
Malheureusement, ça, c’est sur le papier, puisqu’en jeu, ça ne se passe pas toujours aussi bien que prévu. Inkulinati souffre en effet de gros problèmes d’équilibrage, notamment à cause de quelques mécaniques particulièrement puissantes, bien trop puissantes, qui désamorcent beaucoup de situations qui auraient pu être autrement intéressantes d’un point de vue stratégique. Presque toutes les unités peuvent par exemple pousser les autres, alliées comme ennemies, d’une case. Si la case d’à côté passe le bord de la carte ou la fin d’une plateforme, l’unité poussée meurt instantanément. Même s’il s’agit d’un boss, même s’il s’agit de notre mini-Inkulinati (dont la mort provoque la défaite immédiate). Si la case adjacente est déjà occupée, alors l’unité bougera jusqu’à la prochaine case vide, parfois (souvent) jusqu’au bord, et donc à la mort.
Une mécanique qui ne fonctionne pas très bien au vu du level design et de certaines maps un peu étriquées et en ligne droite, et qui peut faire basculer une partie dans un sens comme dans l’autre de manière assez brutale, parfois injuste. J’ai par exemple déjà one shot un boss très tôt dans la partie, car l’IA l’avait laissé à côté d’un brasier et j’ai vu plus tard, impuissant, toutes mes unités se faire jeter dans un trou par l’armée adverse sans que je puisse y faire grand-chose. Il est certes possible d’utiliser la capacité Prière, qui empêche momentanément de se faire pousser, mais il suffira par exemple d’un âne dans l’équipe adverse, dont le pouvoir permet d’assommer tous ses ennemis d’un coup en pétant dans un instrument, pour annuler cet effet et se faire annihiler toute son armée en un tour.
Encore une fois, il s’agit seulement d’équilibrage et le titre commence tout juste son accès anticipé. Ces différentes capacités ont le temps d’évoluer, peut-être par exemple en faisant se cogner les unités entre elles plutôt qu’en les faisant glisser jusqu’au bout de la carte quand elles sont côte à côte, ou en protégeant les boss et notre personnage principal des chutes mortelles. Cependant, un autre aspect m’inquiète un peu plus quant à l’avenir du titre, puisqu’il concerne directement sa structure. Inkulinati est, en plus d’un tactical, un roguelite. Les différentes parties permettent d’étoffer le choix d’armées et de pouvoirs en début de run afin d’ajouter un peu de variété et, passé la première zone, les arènes, évènements et combats sont tirés de manière aléatoire. Mais voilà : on suit toujours la même histoire, on répond toujours aux mêmes choix de dialogues (sans que les réponses choisies aient le moindre impact), on recombat les mêmes boss dans les mêmes arènes et, le tout cumulé au faible contenu pour le moment disponible, on finit par s’ennuyer très très tôt. Et si le contenu et l’équilibrage du titre peuvent effectivement s’étoffer et s’améliorer – ce dont je ne doute pas –, j’ai en revanche beaucoup plus de réserves quant à la structure de roguelite choisie, dont les limites semblent apparaître vraiment vite.
Inkulinati a été testé sur PC via une clé fournie par l’éditeur. L'accès anticipé est également disponible sur Xbox, et une sortie sur PlayStation et sur Switch est prévue.
Malgré quelques idées bien sympathiques et une direction artistique efficace à son actif, Inkulinati est pour le moment trop faible en contenu et trop déséquilibré pour être amusant plus de 3 ou 4 heures. Des aspects qui, j’espère, s’amélioreront au fil des mises à jour et des retours de joueur·euse·s au cours de cet early access pour le moment fixé à un an, mais qui, je le crains, risquent de ne pas rattraper le problème de répétitivité lié à l’aspect roguelite du titre, aspect qui vérolait déjà Othercide pour les mêmes raisons. À surveiller, tout de même.
zalifalcam
J'aime les jeux double A, les walking simulateurs prétentieux et les JRPG, et plutôt que de me soigner, j'écris à leur propos.
Articles similaires
Partie Rapide : Robot Detour et Chicken Police - Into the Hive
nov. 07, 2024
Partie Rapide : Two Falls (Nishu Takuatshina) et Mirthwood
nov. 06, 2024
Partie Rapide : Wilmot Works It Out et Looking Up I See Only A Ceiling
oct. 24, 2024