Voilà près de quinze ans que le studio turc Taleworlds propose régulièrement des RPG immersifs dans de grands bacs à sable nous permettant de vivre une vie de soldatesque médiévale. Cinquième épisode de la série, Mount & Blade II : Bannerlord a récemment terminé son accès anticipé et me laisse un peu dubitatif. D'un côté, rien ne semble avoir vraiment bougé depuis le début de l'accès anticipé du jeu, qui n'est lui-même qu'une évolution paresseuse du Mount & Blade de 2008. De l'autre, le studio livre l'une des expériences les plus immersives et les plus fascinantes de l'année.
Vis ma vie de cowgirl
Mount & Blade II : Bannerlord n'a pas à proprement parler de scénario. Oh, il y a bien une trame principale à suivre dans la campagne : une sombre histoire de bannière à reconstituer et d'empire à sauver ou à détruire. Mais pour l'essentiel, il s'agit surtout d'un gigantesque continent divisé en plusieurs factions qui s'allient, se battent, s'envahissent et se trahissent et de vous, simple petit personnage au milieu de tout ça qui cherche sa voie.
Alors, on se lance. Mon personnage est une jeune femme, Crayon Falcam, balaise en tir à l'arc et en stratégie et un peu nulle dans tout le reste. Munie d'un petit pécule, j'ai recruté trois paysans pour me servir d'escorte et j'ai commencé à chercher un moyen de me nourrir et de mettre un peu de sous de côté. Très vite, je comprends que tant que personne ne me connaîtra un minimum, mes options seront limitées. On m'a alors demandé de conduire un troupeau de vaches d'un village à un autre. Je ne sais pas trop où je suis. La carte ne m'aide pas beaucoup, mais en tâtonnant, je m'en sors. En route, une horde incommensurable de trois pillards me tend une embuscade. Je m'en sors grâce à mes talents d'archerie incroyable, mais un de mes paysans se prend une flèche perdue. Oups, désolé Hervé (j'imagine qu'il devait avoir un prénom comme ça).
On me paye pour mes vaches et on m'apprend que les notables du coin m'aiment désormais un peu plus. Comme j'ai gagné en charisme et en notoriété et que j'ai à présent de beaux habits arrachés à des cadavres de bandits, je décide d'accepter une meilleure mission. On me demande de nettoyer un repaire de gredins à proximité et on me souligne qu'il faudrait que ma petite bande compte au moins une dizaine de membres. Je recrute davantage d'agriculteurs, dont certains me signalent qu'ils sont montés en grade. Les fourches sont remplacées par des lances, et je comprends qu'il va falloir les payer et les nourrir plus et que je ne suis pas sortie de l'auberge. J'attaque le camp de bandit, et je tue tout le monde, avant d'accepter un duel contre leur chef. Je suis une personne pleine d'honneur. Après avoir perdu le duel de manière lamentable parce que le système de combat n'est pas très précis, je suis prisonnière d'un bandit. Ce n'est pas le début d'une histoire d'amour.
Une offre que je ne pouvais pas refuser
Gontran le Bandit (je ne peux pas m'empêcher de donner des noms quand je m'attache) m'a trimbalée un peu partout, sans me piquer ni mon or ni mes provisions. C'est sympa. J'ai réussi à me sauver le troisième jour et à me traîner jusqu'à la ville voisine. J'ai recruté un Compagnon, qui est un genre de super paysan avec un nom, un prénom et une fiche d'inventaire, et divers grouillots pour venir avec nous. On a acheté du pain et des armes contondantes et j'ai passé les jours suivants à taper des bandits pour me venger. C'était pas un moment désagréable.
De temps en temps, certains bandits se rendaient, et devenaient mes prisonniers qui mangeaient mes réserves de fromage. J'en ai recruté certains et vendu d'autres, dans une taverne auprès d'un rançonneur, pour qu'ils arrêtent de manger mes réserves. Quel beau métier que rançonneur. Au bout de quelque temps, j'ai commencé à avoir une troupe d'une quinzaine de gugusses sous mes ordres. Alors, j'ai proposé à un seigneur local à la barbe fleurie de rentrer à son service. Il m'a dit non, parce que j'étais juste une meuf bizarre qui tapait des gens sur la route avec un bâton. Un jour, ma notoriété a passé 50 à force de taper des bandits et de vendre des vaches et j'ai croisé un autre seigneur local à barbe fleurie, probablement prénommé Gothric. Cette fois-ci, il m'a dit oui, et m'a engagée comme mercenaire.
C'était bien : à chaque fois que je faisais un truc qui lui faisait plaisir, on me donnait des sous. Par contre, si je foutais rien, j'étais pas virée : on arrêtait juste de me payer. Le quiet quitting pour les nuls. Je me suis promenée au hasard. Maintenant, on était cinquante dans notre bande. J'ai même retrouvé ma famille (qui avait été kidnappée avant tout ça) et donné des conseils d'orientation à ma petite sœur. Elle est devenue marchande et hallebardière. On m'a aussi envoyé un message pour me dire qu'une fille qui s'appelait « La Fouine » me détestait, désormais. Je crois que c'est parce que j'avais accepté de lui apporter des sacs de farine et qu'après, j'avais oublié de le faire. Tant pis. Ma bande a continué à grossir, et un jour, mon patron a déclaré la guerre à un autre pays.
Passer par le siège
On m'a dit que je deviendrai très riche et très célèbre si j'acceptais un poste officiel de vassal. J'ai demandé quels étaient les avantages et il n'y en avait pas vraiment, mais j'ai dit oui quand même. On m'a demandé (sans pression) de rejoindre le siège d'un château, j'ai dit oui aussi. Pendant le siège, j'ai découvert que personne ne fournissait la bouffe pour mes troupes, et comme on était maintenant cent, eh bah j'ai dû me barrer et acheter du pain. Quand je suis revenue, on a attaqué le château. Je me suis mis dans un angle mort et j'ai tiré sur les défenseurs pendant que tout le monde courait partout. Quand j'ai plus eu de flèches, je suis montée sur une échelle, on m'a donné un coup de marteau et quand je me suis réveillée, on avait gagné et on m'avait donné 6 % du butin. C'était une bonne nouvelle.
J'étais désormais très riche, et j'ai pu acheter une boulangerie et une filature pour mes vieux jours. Tous les jours, je récupérais les bénéfices de manière magique dans mon inventaire. Alors, je suis restée dans l'armée et toutes les semaines, on attaquait un village, un château, etc. Bon, jusqu'à ce que les mecs en face rassemblent une armée quatre fois plus grosse que la nôtre. On s'est retrouvé face à une marée humaine de cavaliers en armure et je me suis sauvée. Personne ne m'a rien reproché. Un autre pays a déclaré la guerre au nôtre et il y avait des ennemis partout. J'ai décidé de prendre ma petite troupe et de faire un mouvement stratégique en pillant des villages dans l'arrière-pays d'un des royaumes ennemis en contournant le front. Une manœuvre qui n'a pas trop embêté les gens que j'attaquais et qui m'ont laissé faire pendant plusieurs jours.
J'ai découvert que je pouvais forcer des villageois à me vendre des esclaves, puis leur acheter des trucs comme si de rien n'était, puis brûler le village. À un moment, la situation sur le front s'est calmée et je suis retournée faire des sièges avec mon roi. Il commençait à bien m'aimer alors, je l'ai demandé en mariage. Il a dit non. J'ai redemandé. Il a dit oui, mais pas avec lui, avec un type que je connaissais pas et qui habitait très loin. C'est moi qui ai dit oui, cette fois, pour vous.
Tout semblait bien se passer dans ma carrière d'aventurière. Mais une nouvelle armée quatre fois plus grande est alors arrivée et on s'est tous fait tuer ou capturer. Mais comme j'étais définitivement très très riche, je savais qu'en sortant de prison, je pourrais me racheter des paysans, des vaches, de l'équipement et des amis. C'est le cycle de la vie.
Mount & Blade II : Bannerlord a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur.
Raide, mécanique, moche, fade, peu ergonomique et n'ayant fait aucun progrès, sinon des corrections de bugs depuis le début de son accès anticipé, on pourrait multiplier à l'envi les critiques sur Mount & Blade II : Bannerlord. Mais pas une minute dans les 25 heures et quelques que j'y aurais consacrées je ne me suis ennuyé. Il se passe toujours la même chose dans ce jeu, particulièrement après la constitution de votre clan, une fois que vous accédez aux sphères de pouvoir et que vous commencez à commander des troupes dignes de ce nom. Il faut cependant savoir que cela vous prendra beaucoup (trop) de temps. La pente est extrêmement raide : le début d'une campagne est si austère et vous y êtes si faible, que le concept est par nature décourageant. Mais en s'accrochant un peu, vous vivrez des choses que seule cette série sait vous proposer avec ce niveau de détail et cette qualité d'immersion.
zalifalcam
J'aime les jeux double A, les walking simulateurs prétentieux et les JRPG, et plutôt que de me soigner, j'écris à leur propos.
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