Dernière production du micro-studio maltais Steelkrill Studio, The Voidness vient de commencer son accès anticipé avec un concept intéressant : vous plonger dans une obscurité absolument totale. Votre seul ami dans les ténèbres est un flingue à projeter des particules de lumière pour tracer votre chemin.
The Voidness n'est pas le premier jeu à utiliser un LIDAR portatif pour vous faire révéler des cavités obscures en peignant de la lumière par-dessus. À vrai dire, c'est à ma connaissance le deuxième, quelques années après un certain walking simulator du nom de Scanner Sombre dont il reprend en bonne partie l'esthétique et le rythme. Il faut d'ailleurs l'évoquer immédiatement : davantage qu'un studio de développement de jeux à proprement parler, Steelkrill est aussi un producteur d'assets pour des projets tiers. Les propres projets du mystérieux Ryan Portelli, supposément unique employé du studio, sont jusqu'ici restés particulièrement confidentiels. À l'exception peut être de The Backrooms 1998, un poil plus remarqué. Mais ce dernier partage avec tous les autres jeux de Steelkrill une série de points communs retrouvés également dans The Voidness : c'est toujours très court, c'est bourré de jump scares un peu faciles, et les bonnes idées foisonnent, mais ont toujours l'air d'avoir été piochées ailleurs. Et si The Voidness a le mérite de bien présenter son idée centrale dans ce début d'accès anticipé, ses propositions périphériques, son aspect purement technique et sa difficulté à trouver un rythme ne poussent pas à un optimisme délirant.
C'est toi là-bas dans le noir ?
Nous voici quelques années dans le futur. Le Void, mystérieux vide noir et impénétrable, est apparu, immédiatement cerné par des bases scientifiques destinées à savoir ce qu'il y a dedans. Oui, c'est une mauvaise idée d'essayer de savoir ce qu'il y a dedans. Un beau jour, vous vous réveillez sur le billard dans une de ces bases, absolument tout autour de vous semble avoir été dévasté, et oui, vous allez devoir aller dans le Void pour essayer de comprendre. Et oui, il est peuplé de trucs qui veulent vous dégommer.
La particularité proposée par The Voidness par rapport à n'importe quel jeu d'horreur SF vous confrontant à des trucs dégoûtants, c'est ce fameux espace vide à traverser, plongé dans une obscurité totale. Vous aurez beau attendre que vos yeux s'habituent aux lieux ou monter le contraste de votre écran, rien à faire : vous êtes totalement aveugle. On vous colle très rapidement dans les mains le fameux LIDAR, qui projette (temporairement) des particules de lumière en spray, laissant vaguement entrevoir ce qui se trouve devant vous. Plus loin dans le jeu, ce dernier sera amélioré pour projeter des choses plus loin, de manière plus précise, ou via un rayon plus ou moins concentré. C'est très satisfaisant.
Au début, tout parait donc assez simple : on balance de la lumière comme s'il n'y avait pas de lendemain et on évite de se prendre les murs, les pièges grossiers et les précipices parsemant l'univers. Sauf que contrairement à Scanner Sombre, The Voidness n'est pas tout à fait un simple walking sim : il y a bel et bien quelque chose qui cherche à vous buter dans le vide. On apprend alors au fil du jeu à identifier différents types de signaux lumineux. Certaines surfaces sont davantage bruyantes que d'autre, les créatures vivantes laissent une signature thermique temporaire, et ainsi de suite. L'idée ne sera ainsi pas uniquement d'avancer d'un bout à l'autre de la carte sans se perdre. Il faudra aussi comprendre les déplacements de la faune locale en la traçant à coups de lumière et en évitant de se retrouver coincé dans une impasse au pire moment.
Noir c'est Noir (mais pas longtemps)
The Voidness a beau avoir une réalisation modeste, il ne ménage pas ses efforts pour créer une ambiance de tension et de paranoïa. Si dans ses premières minutes, on se croit assez puissant puisqu'on peut facilement dessiner et éviter tous les dangers qui nous font face, la réalisation se permet quelques vilaines surprises pour nous faire perdre nos repères. Vous venez de finir un puzzle et vous voulez revenir sur vos pas ? Hop, on vous balance soudainement dans un espace inconnu. Vous pensiez suivre les traces d'une bestiole qui était juste devant vous ? Perdu, les grognements viennent de derrière, à présent. Des événements majoritairement scriptés et parfois un peu prévisibles, mais qui font leur effet.
Dans l'ensemble, la mise en scène fonctionne bien dès que The Voidness joue à plein pot sur cette peur du noir et sur la perte de repères géographiques. C'est beaucoup moins convaincant dans les moments (assez courts) qui nous font revenir dans la lumière palote et déprimante du laboratoire dévasté, où l'on constate surtout que le personnage incarné est assez rigide et que ramasser le moindre objet est une gageure. La faute à un gameplay assez mou et à des environnements assez étriqués qui se prêtent mal à diriger un camion humanoïde qui se cogne dans les tables et les bureaux en marchant au ralenti. Un défaut forcément moins présent dès lors qu'on est dans le noir complet, dans des environnements plus ouverts.
On regrettera aussi que pour le moment, The Voidness ne propose qu'un contenu assez chiche qui tient presque plus de la note d'intention que de l'accès anticipé. Moins de deux heures et déjà pas mal de recyclage de contenu : on aurait aimé avoir une idée plus précise de ce que le développeur entend finalement proposer. Plus irritant encore, on note une absence complète d'options de confort de base, comme des sous-titres pour les quelques scènes de dialogue... ou l'absence quasi complète de support manette. Cela a beau ne pas être très grave pour un FPS pensé pour le jeu à la souris, c'est tout de même assez rare, même en accès anticipé. J'ai également eu à déplorer quelques vilains retours Windows, ce qui n'est jamais bien agréable quand les points de sauvegarde manuelle sont aussi éloignés les uns des autres.
The Voidness a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur.
Il reste beaucoup à faire pour que The Voidness devienne une expérience horrifique vraiment originale. Pour le moment, il me semble que le jeu ne s'écarte pas assez de la proposition de Scanner Sombre, si ce n'est par l'ajout de trucs ineffables qui veulent vous manger. Les qualités du jeu de Steelkrill Studios se concentrent pour le moment dans sa gestion de l'obscurité complète, tout le reste de la proposition venant plutôt parasiter cette idée que la soutenir. Des décors de laboratoires génériques, une IA adverse assez mécanique, des jump scares un peu faciles... Tous ces moments où le jeu essaye de faire autre chose qu'éteindre la lumière ne fonctionnent pour le moment pas très bien.
Les + | Les - |
- Un concept rarement exploité dans les jeux horrifiques | - Contenu un poil chiche pour le moment |
- Le level design qui rend parano | - Commandes un peu rigides |
- Les changements d'ambiance assez malins | - Il manque encore trop d'éléments de confort (sous-titres, support manette, etc.) |
- Il me semble que ça ressemble quand même beaucoup-beaucoup à Scanner Sombre |
zalifalcam
J'aime les jeux double A, les walking simulateurs prétentieux et les JRPG, et plutôt que de me soigner, j'écris à leur propos.
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