Alors qu’on se languissait d’un nouveau titre de jeu de combat qui vaille le coup, The King of Fighters XV s’est enfin présenté malgré plusieurs retards dus aux conditions de développement délicates avec lesquelles les équipes de SNK ont jonglé durant les premiers temps du COVID. Sans être purement et simplement inhospitalier, cet opus est dans la droite lignée des précédents : technique et exigeant. Il faudra du temps pour l’apprivoiser.
L’attente fut longue, depuis The King of Fighters XIV, pour revoir les différentes équipes participant au tournoi en 3D disgracieuse censé départager le King of Fighters (j’aime quand le titre des œuvres va droit au but). En six ans, les graphismes ont bien sûr évolué, mais sont restés dans cette espèce de vallée dérangeante loin de la patte visuelle de la licence jusqu’au treizième opus. Sans être un inconditionnel de la saga, j’avais hâte de voir ce qu’avait à proposer de nouveau ce titre par rapport à ses prédécesseurs. Et si les bases et la philosophie du gameplay sont bien les mêmes, quelques ajouts sont les bienvenus pour donner un peu de fraicheur à l’ensemble. On regrettera tout de même un manque de pédagogie qui pourrait aider à séduire un nouveau public.
Royalement bagarreur
La licence King of Fighters prenant ses racines dans les jeux de baston de salles d’arcade des années 1990, les personnages des différentes franchises de SNK (Fatal Fury et Art of Fighting, Psycho Soldier et des meilleurs) ont eu le temps de se mettre des mandales pour de bonnes ou de mauvaises raisons. Ainsi, de l’aventure assez simple de deux gamins qui souhaitaient venger leur père adoptif, l’histoire a pris une toute autre tournure avec une escalade des enjeux quelque peu exponentielle, le tout soutenu par une pelletée d’adaptations sur différents supports au cours des années. De méchants mégalos caricaturaux, le danger s’est mué en la menace du retour d’un démon longtemps emprisonné, de lignées maudites, de possessions, de dérèglements temporels, jusqu’à King of Figthers XV qui vient chatouiller la fabrique même de l’univers.
Dans cet opus, la menace du dernier tournoi, Vers – une entité capable de ressusciter les pires antagonistes de la saga – est sur le point de se manifester encore une fois à cause de la quantité de combattant·es réuni·es au même endroit. Mais alors que cet ennemi semble vaincu, un autre se présente pour mettre le boxon, pas de bol quand même. Vite fait bien fait, le grand méchant est réexpédié d’où il venait sans plus d’explications sur les implications que cela pourrait avoir dans cet univers, et une cinématique de type visuel novel un peu cheap conclut l’affaire pour ce coup-ci. Tout est bien qui finit bien, mais il faudrait peut-être interdire ce tournoi à l’avenir, vu que des catastrophes se déclenchent à chaque édition. On ne va pas se cacher que l’histoire est pliée bien rapidement et nous laisse immanquablement sur notre faim. Les motivations des personnages eux-mêmes sont nébuleuses, comme s’ils étaient là un peu par hasard, ce qui n’aide pas lorsqu’on découvre la saga. Pour avoir quelques détails supplémentaires, il faudra se rabattre sur les cinématiques de rencontres entre les différents personnages au hasard des combats, mais ça reste léger pour un mode solo.
Trois, trois, mon trois
Heureusement que le public est plus là pour la bagarre que pour les longs monologues explicatifs car, si le contexte laisse à désirer, le gameplay, lui, est au rendez-vous. Si vous n’êtes pas familiers avec la licence, l’objectif est d’enchainer les coups sur son adversaire sans lui laisser le temps de réagir à l’aide de Cancels (nous y reviendrons) et d’un mindgame savamment dosé. Le cœur du gameplay ne diffère pas vraiment de ce qui se fait dans les autres titres du genre, la particularité de la licence réside plutôt dans ses affrontements par équipe de trois. Pas de nombre de rounds prédéfini ici, il suffit juste de mettre les trois adversaires KO pour gagner le match. Une mécanique très intéressante qui oblige à planifier une stratégie entre ses personnages, lesquels partagent la même barre d’énergie (à différencier de la barre de vie), qui monte au fur et à mesure des coups. Il est alors avisé de choisir des combattants avec une bonne synergie, entre ceux efficaces en début de partie avec leurs attaques de base et ceux possédant des attaques spéciales puissantes mais gourmandes en énergie.
Le large choix de personnages disponibles dans le roster de départ (trente-neuf ! On est loin des seize de Street Fighter V) permettra à tout le monde trouver le style qui lui correspond pour mettre en application la dernière spécificité de King of Fighters XV, le Shatter Strike. Cette contre-attaque très spécifique a le potentiel de renverser la situation en prenant la priorité moyennant un peu d’énergie, ou continuer un combo en annulant une animation censée ne pas pouvoir l’être.
Le jeu est techniquement solide, avec l’implantation du rollback netcode qui permet de réduire les problèmes de latence et la frustration des joueur·ses accros au mode en ligne, mais on peut difficilement survoler les gros ralentissements dont souffre la version PC. Une manipulation à réaliser directement dans les fichiers du jeu a été partagée sur les forums de fans, mais elle ne règle pas le problème à tous les coups et c’est bien dommage pour une licence aussi suivie.
Cancel culture
On dit parfois que les jeux de combat sont destinés à un public de niche, un groupe d’initié·es capable de comprendre des termes obscurs tels que crush counter, combo, clash, cancel, anti-air, qui laissent les néophytes sur le bord de la route. J’aurais aimé que The King of Fighters XV fasse exception à la règle et soit aussi accueillant pour les débutants que retors pour les vétérans, mais il n’en est rien. Si le premier tutoriel est bien là pour nous apprendre les commandes de base (se déplacer, sauter, taper, garder), le tutoriel des « mouvements offensifs » semble nous faire passer de la classe de CM1 à la thèse de physique nucléaire sans prévenir, tant les concepts parfois complexes sont expédiés par-dessus la jambe.
Le gameplay de King of Fighters est en effet basé sur le concept de « Cancel », c’est-à-dire l’annulation de l’animation d’une attaque en en déclenchant une autre pour gagner de précieux dixièmes de secondes et enchainer un combo pour ne pas laisser de répit à l’adversaire. Même si elle est présente dans d’autres jeux de combat, cette mécanique est ici centrale, et c’est bien dommage qu’on s’y intéresse à peine alors qu’elle mérite toute notre attention.
L’approche du tutoriel de Guilty Gear, par exemple, est beaucoup plus pédagogue, avec la mise en conditions de chaque concept et des répétitions pour les faire rentrer dans la tête et les doigts. Heureusement, le·a joueur·se n’est pas lâché·e dans la nature hostile du versus fighting sans piste pour s’améliorer : même s’il n’apprend pas la théorie qui pourrait être bien pratique, le mode « Missions » de KOF XV, disponible pour chaque personnage, fait office d’entrainement pour maitriser les combos utilisés par l’ordinateur.
The King of Fighters XV a été testé sur PC via une clé fournie par l’éditeur. Le jeu est également disponible sur PlayStation 4 et 5 et Xbox Series.
Fidèle à la réputation de la licence, King of Fighters XV est un jeu au gameplay technique dont la maitrise ne peut s’acquérir qu’avec les heures d’entrainement. Malgré un mode solo qu’on aimerait un peu plus consistant, le titre ne pèche réellement que par son manque d’accessibilité aux novices des jeux de combats, de par un tutoriel trop léger qu’il faudra compenser avec un investissement important. King of Fighters XV reste tout de même un jeu qui en vaut la chandelle grâce au support de la communauté.
Kalkulmatriciel
Cc c Kalkul. J'adore parler à tous les PNJ, mettre des mandales et saboter les coop.
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