New York, octobre 1929, le Vador News est au bord de la faillite. Touché par la crise économique et victime d’une gestion désastreuse, son dernier espoir réside dans le neveu de son patron actuel. Népotisme aveugle ou bouffée nécessaire d’oxygène, News Tower, le premier jeu du studio néerlandais Sparrow Night, nous donne pour le moment entre 6 et 8 h d’une expérience de jeu solide pour le définir.
Ce qu’il faut que le lecteur assidu sache, c’est que l’avenir du Vador News dépend aussi bien d’une gestion au cordeau et de choix éditoriaux astucieux que de la réussite de la suite de cet accès anticipé. Car si la gestion du Vador News fin 1932 (fin du contenu disponible en accès anticipé) laisse présager un avenir radieux dans le paysage médiatique, il faut que Sparrow Night tienne sa part du marché en suivant sa feuille de route (prometteuse) pour étoffer l’expérience et transformer la période d’essai en contrat à durée indéterminée. News Tower semble donc promis à un bel avenir, si toutefois il arrive à éviter le côté très mécanique et, à la longue, un peu répétitif de ce type de simulation économique.
Première impression en 4 000 exemplaires
Gérer un journal, chers lecteurs, c’est du travail. Il faut disposer de locaux suffisamment grands pour accueillir le matériel d’impression, des télégraphistes, des journalistes, des éditeurs, des compositeurs ainsi que le personnel d’entretien indispensable à la tenue des locaux. Il faut aussi embaucher du personnel compétent et lui offrir des conditions de travail décentes et faire des choix éditoriaux pour garantir à la fois une bonne information et plaire à son lectorat. Il faut également ménager les susceptibilités et choisir avec soin ses associations : la mairie et sa soif de propagande ? La mafia et ses magouilles ? On peut bien sûr choisir de garder les mains propres, mais alors comment gagner suffisamment d’influence pour obtenir de meilleurs objets, conditions et professions indispensables à la croissance de son empire médiatique ? Heureusement, chers lecteurs, que dans les premiers temps la secrétaire de rédaction est là pour nous aiguiller, car sinon nous serions bien perdus dans cette entreprise, mais une fois les bases apprises, il faudra voler de ses propres ailes et jongler entre choix éditoriaux et aménagement des locaux, sans oublier de commander du papier et du charbon pour faire fonctionner la machine.
Une fois la machine lancée, on peut se laisser aller à un peu de complaisance et penser que tout roule, mais vous le savez, chers lecteurs, les procès, les intimidations et la versatilité du public menacent à chaque instant de gripper les rouages de l’imprimerie. Il faut donc désormais embaucher des avocats et des agents de sécurité, et se rappeler que ne pas honorer ses engagements auprès des différentes factions, c’est prendre le risque de se voir rappeler à l’ordre par le biais de procès ou d’hommes de main armés de battes de baseball. Tout ça bien sûr, sans oublier que chaque dimanche, il faut choisir quoi mettre dans les pages de son journal (enfin, les pages, une page d’abord, plus ensuite si notre gestion le permet). Ce scoop de la semaine dernière est juteux, mais déjà un peu daté et notre lectorat cible préfère les histoires inspirantes, et que dire de la mairie qui souhaite ne voir aucune publication politique cette semaine ? Peut-être alors qu’une première page axée sport et vie de la communauté serait un choix plus judicieux, mais que faire de cette enquête économique passionnante qui sera dépassée la semaine prochaine ? Que de choix, chers lecteurs, mais informer le public est un sacerdoce et déjà une nouvelle semaine commence.
Doutes éditoriaux
Vous aurez compris, chers lecteurs, tout ça n’est pas une mince affaire et dans ce tumulte et cette course permanente à l’information, il ne faut pas perdre de vue l’objectif. C’est vrai pour la direction du Vador News comme pour Sparrow Night, et c’est peut-être là que les choses peuvent se compliquer. Sparrow Night possède une direction claire et une feuille de route cohérente, qui rajoutera un an durant des factions, des objets et des nouvelles mécaniques qui nous permettront à notre tour de proposer à notre précieux lectorat des reportages internationaux, des publicités, de la météo, des mots croisés et d’embaucher d’autres professionnels dont les talents vont devenir indispensables à notre expansion. Mais alors, pour le Vador News, quel est l’objectif ? Je sens que vous vous le demandez, chers lecteurs, et vous avez raison. En substance : la croissance économique, rien de moins, mais rien de plus non plus, en tout cas pour ce que nous pouvons apercevoir du futur, car telle est l’époque dans laquelle nous vivons.
Certes, ce travail d’équilibriste et de croissance est prenant et devrait nous occuper jusqu’à la retraite en nous octroyant en plus la satisfaction du travail bien fait, mais une fois la mécanique comprise et les avantages débloqués, quel intérêt y a-t-il à se compromettre avec différentes factions ? Composer un journal, n’est-ce donc rien d’autre qu’un puzzle mécanique dont les mots-clefs ont plus d’importance que le contenu rédactionnel ? Y aurait-il un intérêt à tenter de faire autre chose qu’un choix purement mécanique en fonction des demandes de la semaine ? C’est difficile à dire et c’est un risque inhérent à ce type de jeux, et peut-être, pour que cela soit tout à fait satisfaisant sur la durée, faudrait-il avoir plus d’imagination et de curiosité que n’en possède la direction du Vador News, qui au Monopoly comme à Prison Architect, se lasse une fois la boucle de gameplay comprise, faute d’objectifs ou de scénario qui permettraient de conserver son attention, indépendamment de la qualité intrinsèque de la mécanique. Bien sûr, chacun voit midi à sa porte, comme dit le proverbe, et ce manque de direction éditoriale pourra séduire, le genre des « tycoon » plait à un grand nombre de personnes et la direction du Vador News tient à rappeler que la diversité des contenus et des lignes éditoriales est vitale à l’information et à la démocratie. Quand bien même d’ailleurs, chers lecteurs, une fois l’avenir du Vador News assuré, la direction se trouverait lassée de son rôle et souhaiterait passer le flambeau, elle aura passé plusieurs années très satisfaisantes à développer et gérer son empire dans un environnement vibrant et coloré et, en ces temps troublés, c’est déjà une très bonne chose.
News Tower a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur.
News Tower est un accès anticipé qui possède une base très solide, malgré quelques faiblesses sur la fin du contenu disponible qui seront vite réglées, et Sparrow Night semble avoir une vision claire de la suite des évènements. C’est déjà à l’heure actuelle un jeu solide, qui devrait donc être de plus en plus satisfaisant à mesure de l’avancée de l’accès anticipé. Il faut maintenant voir si l’équipe a prévu suffisamment d’objectifs et de défis pour contrer l’aspect répétitif de ce type de jeux de simulation économique, qui mise souvent plus sur la mécanique que sur le scénario.
Les + | Les - |
- Une expérience de base très solide | - Un gameplay très mécanique parfois un peu répétitif |
- Une très chouette DA autour du New York des années 1930 | - Quelques bugs et une lisibilité moyenne sur certaines interfaces |
- Une feuille de route prometteuse |
BatVador
Traductrice ascendante topiaire qui aime les city builders, les dystopies et les jeux avec des gens déprimés dedans.
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