Le premier épisode de Life is Strange 2 est sorti ce 27 septembre 2018, et si vous avez aimé l’histoire de Max et Chloé, vous ne serez pas dépaysé, bien que l’aventure ne soit pas tout à fait la même. Ici, on suit le voyage de deux frères, Sean et Daniel, qui, poussés par une scène tragique (je vais tenter de ne pas spoil), doivent quitter Seattle vers une destination qu’ils espèrent plus accueillante. Ça se passe trois ans après la destruction (ou non) d’Arcadia Bay, et cela n’a pas une réelle importance. Alors, est-ce que ce premier épisode vaut le coup ou pas ?
On ne change pas la recette d’un bon gâteau au chocolat
DontNod a bien compris la chose, c’est donc avec plaisir qu’on retrouve les mêmes mécaniques de jeu du premier opus : une bonne ambiance mélancolique, de beaux dessins imitation aquarelle, une excellente bande son, des références à la pop culture qui vous immergent rapidement dans l’histoire, et la violence du cruel virage narratif qui vous coupe le souffle, malgré le fait que ça soit annoncé dès le départ. L’uppercut ressemble fort à celui qu’on avait reçu pour Max quand elle se baladait gentiment dans son bahut, les écouteurs dans les oreilles, QUAND SOUDAIN !
Dans Life is Strange 2, on incarne Sean, un ado de 16 ans dont la passion est le dessin (on peut faire des crayonnés intéressants au lieu des photos), qui discute avec sa meilleure amie pour savoir comment draguer la jolie fille qui sera à la fête ce soir. Son petit frère, Daniel, 9 ans, arrive ensuite dans l’histoire, visiblement en quête de reconnaissance fraternelle et probablement amoureux de la meilleure amie de Sean. Puis le papa vraiment bienveillant, qui aime le Seigneur des Anneaux, et qui aime ses enfants. Bref, une histoire d’ados, avec un peu de cigarettes (« hey ! les athlètes ne fument pas ! »), de cannabis, d’alcool, de fantasmes à propos du sexe, de parents, et beaucoup d’amours innocents.
Pour peu qu’on se souvienne de nos propres émois amoureux, ou qu’on soit un tant soit peu empathique, on est donc très rapidement plongé dans l’ambiance, d’autant qu’au moment où j’écris ces lignes, on subit les assauts de l’automne et que le jeu se déroule justement au moment d’Halloweeeeeeeeen. Ce qui était déjà le cas avec Max.
Petit plus : le choix final effectué dans Life is Strange vous est quand même demandé, à titre indicatif, pour vous lancer quelques allusions au court de l’histoire, et ça, c’est plutôt sympa parce que ça vous relie directement à votre première expérience du jeu. Mais attention, la ressemblance de l’expérience s’arrête là.
Dolto or not Dolto à la sauce DontNod
En effet, Sean n’a pas de pouvoirs. C’est Daniel qui en est pourvu, et quand un petit garçon de 9 ans dispose d’un truc pareil… Bah ça ne donne pas grand chose de bon au départ. Et voilà tout l’enjeu de Life Is Strange 2 : l’éducation.
Les développeurs nous ont promis des fins alternatives, mais ce qui compte le plus, ce sont les choix éducatifs qu’on fait pour Daniel, et non la résolution d’une enquête. Mais attention, ce n’est pas aussi simple que ça y parait. Franchement, y a des moments où les alternatives sont réellement difficiles, d’autant qu’on ne sait pas ce que ça va impliquer chez le petit frère. Enfin… On se doute bien que raconter des trucs qui font peur la nuit en pleine forêt, c’est peut-être pas une bonne idée quand on est en cavale. Je dis ça, je dis rien. Si, je l’ai dit. Tant pis.
De même, il y a des trucs qu’il ne faut pas faire, comme manger des baies sauvages sans savoir si elles sont réellement comestibles. Vous êtes en forêt ! Youhouuuuuuuuu ! Il faut faire attentiooooooooooooon !! Et il y a des ours aussi, bordel !
La grande question du scénario reste quand même (pour ma propre expérience de jeu, évidemment) : comment faire une éducation bienveillante quand vous êtes en cavale ? Je ne suis pas certaine que Dolto l’avait prévu dans ses manuels, mais en même temps, il n’y a pas trente-six mille solutions, et j’ai hâte d’avoir la suite pour découvrir si mes choix ont changé le petit Daniel en fou furieux irrespectueux de tout, ou si j’en ai fait un good boy qui saura faire quelque chose de sa vie (comme si on savait réellement quoi faire de sa vie, en vrai… hahaha !) malgré ses débuts difficiles. Il n’y a pas de juste milieu (si).
Le seul bémol réside dans la cadence des choix à effectuer, un peu trop diluée dans une narration directive. Bien sûr, il y a beaucoup d’objets à inspecter dans les phases d’observations, et ça renforce l’immersion, mais paradoxalement, les longues phases narratives auraient une tendance à la briser, puisqu’on a parfois l’impression de juste regarder un dessin animé poignant. L’équilibre n’est donc pas fameux en ce premier épisode, bien qu’il reste très honorable, hein.
« Tout est question de politique, Sean »
Le scénariste Jean-Luc Cano a souhaité ajouter un deuxième enjeu à Life Is Strange 2 : la politique. Comme toute la production voulait évoquer des thèmes de société actuels, parlants, et importants, il y est donc question de racisme (les deux frères s’appellent Diaz. A Seattle. C’est un peu comme s’appeler Moussa en Alsace), d’exclusion, et comment on vit quand on est sur les routes, à côté de la société. Sans oublier la beauté de la nature et sa sauvagerie, que l’on retrouve calquée dans le comportement des personnages secondaires.
Les détails sont assez réalistes et politiques en ce sens : le soda est moins cher que l’eau (ça me choque toujours irl), il faut savoir gérer une cagnotte et sa propre conscience ainsi que celle de son frère… Le débat sur le partage des richesses est aussi caressé, et l’entraide familiale bien présente. Chaque rencontre apporte son lot de messages politiques, et c’est plutôt réussi sur ce point.
La phrase qui m’a le plus marquée, prononcée par quelqu’un de cool (à priori), je l’ai notée dans cet intertitre : « Tout est question de politique, Sean ». C’est tellement vrai que ça me fait du bien de le lire enfin dans un jeu vidéo, pour que ça touche autant de monde que possible et éveiller les consciences : oui, tout est politique, ou tout du moins, tout acte peut devenir politique puisque tout en découle dans nos sociétés. De l’éducation au fait de donner une pomme à quelqu’un qui a faim. De téléphoner à des secours quand une personne se fait agresser ou de la laisser dans les mains de ses bourreaux. De sa coiffure à ses vêtements. La politique, au sens large du terme, représente le cadre de la vie en groupe. Elle n’est pas uniquement liée à l’exercice du pouvoir, elle est affaire de tous à partir du moment où vous vivez dans un régime démocratique, et il est grand temps que ça soit rappelé un peu partout.
Au final, dans cette histoire, la politique joue un rôle primordial. Parce que sans ce cadre de société étasunienne, nos deux jeunes loups ne seraient pas obligés de fuir. Ils n’auraient pas été jetés sur les routes à la suite de cet événement dramatique qui m’a serré la gorge et fortement humidifié les yeux.
Ce premier épisode de Life is Strange 2 tient donc beaucoup de promesses malgré quelques petits défauts qu’on lui pardonne aisément. J’attendais d’être émue aux larmes, et ça a marché. Par contre, il vaut mieux le faire d’une traite (il dure 3 heures) pour garder l’immersion. Hâte de voir les prochains épisodes, et je vous reparlerai sûrement de tout ça une fois la saison finie ! Je saurai enfin si ma théorie sur Captain Spirit est fondée ou non : pour moi, ce n’est pas un préquelle. Ça se situe pendant la cavalcade des frères, voire même à la fin !
bob thebob
Mes parents ont trouvé ça drôle de m’appeler Bob, notre nom de famille étant Thebob. Ça vous en bouche un coin ? Moi pas. Pour une raison simple : je n'en ai pas, de coin. Du coup, même si je
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