Quelques années après l'original, mais très hermétique Labyrinth of Refrain: Coven of Dusk, Nippon Ichi Software livre un second Dungeon-RPG situé dans le même univers. Labyrinth of Galleria: The Moon Society nous met ainsi à la tête d'une bande de marionnettes missionnées pour explorer les tréfonds d'un donjon fantasmagorique. Cette critique contient de légers spoilers sur les premières heures du jeu.
Un beau jour, la jeune Eureka de Soleil répond à une offre d'emploi un peu bizarre : devenir la femme à tout faire du manoir d'un noble excentrique, situé à l'écart d'une petite ville. Une fois rendue sur place, la voici placée aux bons soins de Madame Martha, une sorcière étrange qui lui confie une lampe magique, la Lanterne de Fantasmagorie (en français dans le texte). Cette dernière va permettre à Eureka d'être les yeux et les oreilles d'une escouade de pantins chargés d'explorer le labyrinthe surréaliste, dangereux et visiblement infini caché au fond d'un placard magique. Votre objectif : y récupérer des "curios", de puissants artefacts disséminés dans ce dédale infernal. Et c'est parti pour une cinquantaine d'heures de joies et de souffrances à arpenter ce qui s'avère être un des meilleurs donjons du genre depuis l'incroyable Undernauts. Une aventure non sans défauts, mais qui tient sa promesse d'être Coven of Dusk en beaucoup, beaucoup plus abordable.
Je ferai de toi, ma poupée de bois
Labyrinth of Galleria: The Moon Society, c'est d'abord l'histoire d'une longue chaîne de responsabilité et de hiérarchie : le propriétaire du manoir donne des ordres à Martha, qui supervise Eureka, qui utilise la Lanterne de Fantasmagorie pour diriger des pantins eux-mêmes divisés en escouades spécialisées. Une véritable petite organisation qui dessine autant de strates de gameplay : distribuer des objectifs, gérer des boutiques et du stock, construire des soldats, et aller concrètement se taper sur le terrain.
Ce fonctionnement très organique a l'avantage de pouvoir dessiner une narration relativement fluide et bien rythmée, ce qui n'est pas toujours le point fort de ce type de jeux. Puisqu'on est la plupart du temps en train d'avancer sur tel ou tel aspect de ce que l'on nous a demandé de faire, Labyrinth of Galleria: The Moon Society distribue largement les récompenses sous forme de petites avancées scénaristiques, de nouveaux menus à explorer, de bonus à débloquer, etc. Il est aussi livré avec son inconvénient miroir : c'est tout de même un peu le bazar, les amis.
En théorie, le jeu nous demande "juste" de piloter des soldats et de les envoyer dans un labyrinthe, façon RPG au tour par tour. En pratique, chaque expédition va se subdiviser en une pléthore de petits moments de préparation découpés en autant de menus et de sous-menus. Crafter des choses, acheter et vendre des objets, ajuster les pouvoirs de la lanterne, réparer les poupées, optimiser l'équipement, les groupes et les sous-groupes, utiliser des consommables chargés de booster l'expérience… Après quelques heures, et alors que l'on n'a pas encore débloqué toutes les possibilités du jeu, on se retrouve avec une quantité parfois un peu irritante de choses à faire entre chaque expédition. Néanmoins, c'est infiniment plus simple à comprendre que dans Coven of Dusk, le tout étant par ailleurs fondu dans une expérience largement moins austère et hardcore.
Elles sont jolies, les mignonnettes
Les premières heures de Labyrinth of Galleria: The Moon Society peuvent avoir un côté extrêmement âpre, limité et frustrant, tant l'aventure va se refuser à vous lâcher la main le temps que vous ayez bien compris tout ce qu'elle a à vous dire. Et elle a beaucoup, beaucoup de choses à vous dire. Entre le placement de vos troupes, les différents types de coffres, l'infinité de sous-menus à optimiser et à trier, le titre de Nippon Ichi essaye visiblement de vous filer à la fois le tournis et la migraine.
Et puis, étrangement, après quatre ou cinq heures, ça passe. On comprend finalement ce que le studio voulait dire en affirmant avoir rendu ce second épisode plus simple et plus intuitif. À mesure que l'on progresse, des options de confort apparaissent : raccourcis clavier ou manette, passages secrets dans la carte permettant d'accélérer l'exploration, ou encore déblocage de pouvoirs permettant de changer la difficulté entre deux tentatives en cas de boss infranchissable. On réalise aussi assez vite une possibilité assez naturelle de diviser les menus entre ceux qui ont un intérêt permanent, et ceux où l'on peut se permettre de ne fouiner que très occasionnellement.
Après avoir passé les deux ou trois premiers ennemis majeurs et découvert les premiers secrets du labyrinthe, la progression s'accélère, ainsi que l'optimisation de notre bande de pantins. On sait parfaitement ce qu'on doit cibler et prioriser pour progresser vite, on apprend à lire la carte des donjons et leurs zones d'ombres, et on apprécie les options de confort permettant à l'envi de laisser des messages, surligner les coffres importants ou les zones à explorer plus tard. On nous lâche la main, et chaque expédition dans le labyrinthe devient mécaniquement de plus en plus satisfaisante.
Le bois dont on fait les héros
Il faut dire que, passé ce début très laborieux, Labyrinth of Galleria: The Moon Society s'efforce de faire en sorte que chaque promenade dans le donjon vous rapporte quelque chose, même une expédition ratée se terminant avec tous vos pantins désossés. Certes, dans un tel cas, vous aurez une perte de vos points de mana (une des monnaies du jeu) à déplorer, ainsi que quelques frais de réparation pour remettre votre équipe sur pied. Mais vous conservez vos niveaux, votre or, vos objets, et tout un tas de petits indicateurs de progression.
Une nouvelle zone explorée dans le donjon, même minuscule ? Vous progressez. Un objet un peu plus fort déniché dans un coffre ? Vous progressez aussi. Un peu de mana accumulé ? Vous pourrez débloquer un nouveau pouvoir permanent facilitant vos prochaines aventures, etc. Passé les premières tentatives, aucune expédition ne m'a jamais semblé inutile, puisque le moindre essai m'a rendu au minimum plus instruit, sinon carrément plus fort.
De plus, même si Labyrinth of Galleria: The Moon Society ne brille pas par son équilibrage, avec certains boss vraiment trop difficiles et au contraire trop de moments où l'on roule sur le jeu, on finit par pouvoir explorer le donjon vraiment librement. On apprend à casser les murs, à se déplacer plus vite, à traverser les zones empoisonnées, etc. Même face à un challenge visiblement insurmontable, il est ainsi très simple de faire un détour et d'y revenir plus tard, le tout sans jamais se retrouver perdu dans un level design très astucieux. S'égarer dans une dimension infernale a rarement été aussi agréable et aussi bien récompensé.
Labyrinth of Galleria: The Moon Society a été testé sur PlayStation 5 via une clé fournie par l'éditeur. Le jeu est également disponible sur Nintendo Switch, PC et PlayStation 4.
Bien entendu, Labyrinth of Galleria: The Moon Society ne s'adresse qu'à un public restreint, sensible à la fois aux JRPG à l'ancienne et aux jeux d'optimisation de menus. Mais quelle réussite ! Quelle belle courbe de progression ! Malgré son interface confuse, ses quelques fonctionnalités contre-intuitives et son début poussif, le dernier Nippon Ichi Software est une expérience particulièrement intelligente, bien conçue et faisant un maximum d'efforts pour vous mettre à l'aise. Les espoirs pour un futur troisième épisode de la série gommant encore davantage les petits défauts toujours présents sont désormais immenses.
Les + | Les - |
- Le level design du donjon est brillant | - Premières heures décourageantes |
- Scénario plutôt efficace et bien rythmé | - Interface toujours inutilement surchargée |
- Beaucoup plus abordable que son prédécesseur | - Quelques moments mal équilibrés |
- La difficulté assez modulable | - C'est quand même assez moche |
- La musique de Tenpei Sato, toujours efficace |
zalifalcam
J'aime les jeux double A, les walking simulateurs prétentieux et les JRPG, et plutôt que de me soigner, j'écris à leur propos.
Articles similaires
Miniatures - La poésie du souvenir
nov. 20, 2024
Rogue Flight - Monte dans le robot, Zali !
nov. 16, 2024
Great God Grove - Queer et élastique
nov. 11, 2024