Metroidvania en pixel art aux idées simples, mais à l'exécution frénétique et fluide, Janosik 2 est l'une des excellentes surprises de cette toute fin d'année 2024.
Vous savez ce que j'aime dans les jeux vidéo ? Bon, en réalité, plein de trucs, mais j'aime notamment que les jeux soient produits un peu partout autour du monde. Et que certains développeurs de pays aux cultures moins connues que celles des Américains et des Japonais puissent injecter un peu de leur patrimoine dans ce grand bouillon mondialisé. Pour le studio Onix Games, édité par les polonais de Retrovibe, c'est par exemple l'occasion de mettre en avant le héros folklorique slovaque Juraj Jánošík, sorte de Robin des Bois combattant tyrans et sorcières dans l'Europe centrale du début du 18ᵉ siècle. Version revue et amplifiée d'un platformer très populaire (et désormais gratuit), Janosik 2 n'est pas juste la répétition d'une légende racontée des dizaines de fois au cinéma. C'est aussi une expérience particulièrement astucieuse dans sa manière de gérer le rythme de la progression dans un labyrinthe tortueux.
Bondis, Bandit !
Le véritable Juraj Jánošík n'a pas grand-chose à voir avec sa contrepartie folklorique. Plutôt qu'un bandit au grand cœur, il s'agissait davantage d'un enfant soldat, enrôlé dans le contexte des nombreuses guerres entre les Habsbourg et leurs ennemis dans cette partie de l'Europe. Après son départ de l'armée, réduit au vagabondage et au banditisme, Jánošík dépouille des marchands pendant quelques années, sans que l'on sache bien si les légendes de partage de son butin avec les nécessiteux s'avèrent réelles. Arrêté et exécuté à seulement 25 ans, il doit surtout sa légende à la plume de poètes nationalistes un siècle après sa mort. Et ces derniers ont raconté à son sujet à peu près tout ce qui leur passait par la tête, sans souci particulier de la véracité historique. Tantôt combattant les envahisseurs du pays, en Pologne, en Hongrie ou en Slovaquie, tantôt révolutionnaire aux côtés des damnés de la Terre, tantôt chevalier terrassant des abominations infernales, le Jánošík folklorique est extrêmement plastique par nature.
C'est un peu l'idée de ce Janosik 2 : tant que le bonhomme a les attributs habituels (un grand chapeau, une ceinture, une hache et des compagnons un peu douteux), on peut lui faire faire n'importe quoi, ça passe. En l'occurrence : retrouver sa fiancée kidnappée, puis, en compagnie de cette dernière et d'une bande de brutes, casser la gueule à un méchant très méchant et à ses lieutenants tout aussi maléfiques. On explore une immense map aux segments interconnectés mélangeant zombies, soldats, vampires, fantômes, araignées géantes, piscines d'acide, gouffres de lave et j'en passe. Peu importe la cohérence : le bon héros et ses amis vont vivre de folles aventures, dans une ambiance baignée de folklore slave.
Et il faut reconnaitre que même si tout ceci est globalement très con, ça passe. Les événements s'enchaînent n'importe comment, les boss n'ont pas de cohérence particulière entre eux, et on ne nous expliquera jamais comment une jungle torride peut se trouver aussi proche d'une région de haute montagne jouxtant elle-même un paisible village médiéval. C'est n'importe quoi, mais un n'importe quoi raconté avec une certaine bonne humeur au service d'un gameplay axé davantage sur l'exploration que sur la bagarre.
Maraudeurs, à vous l'honneur
Les deux premières heures de Janosik 2, sympa sans plus, laissent un peu trop supposer qu'on va juste devoir sauter dans tous les sens pour ramasser des pièces et des potions. Le tout dans un ensemble de couloirs assez balisé, au level design correct, mais sans aspérités, avec pour twist de pouvoir switcher entre deux personnages : un rapide qui se bat de près, et un brutal plus lent, mais attaquant à distance. Il serait dommage de s'arrêter à ce démarrage un peu plan-plan.
Passés ses premiers niveaux, servant de gros tuto pour vous apprendre les fondamentaux du gameplay, Janosik 2 s'ouvre pas mal, et multiplie les astuces amusantes pour faire varier les plaisirs. On vous rajoute des personnages jouables et des consommables qui modifient le gameplay, on vous propose des cartes plus ouvertes, et les boss, au départ assez anecdotiques, se mettent à présenter des petites surprises bienvenues. Au départ assez sage, le level design se couvre de niveaux à gravité inversée, plongés dans le noir ou multipliant les chausse-trappes. Et le petit coup de génie là-dedans, c'est de proposer des environnements de plus en plus massifs sans jamais devenir illisibles ou confus.
Pour ce faire, Onix Games a misé sur un dispositif simple, mais au fond assez génial : si les ennemis sont régénérés après chaque mort (on meurt souvent, mais il y a des checkpoints un peu partout), ce n'est pas le cas des objets inanimés. Pièces d'or, potions et autres leviers disparaissent définitivement une fois passée la première interaction. Et à la manière d'un Petit Poucet inversé, les level designers ont tapissé la carte de milliers de pièces à collecter. Ce qui induit tout naturellement la chose suivante dans les niveaux les plus tortueux et les plus labyrinthiques : s'il y a des pièces d'or devant vous, vous n'êtes pour le moment jamais passé par là.
Slovaque à tes occupations
Loin de trop baliser le level design, ce système est plutôt là pour vous indiquer la direction générale à suivre, puisque dès la fin du premier tiers d'une aventure étalée sur une douzaine d'heures, le jeu va multiplier les secrets et les activités annexes. L'un des objectifs généraux de Janosik 2 est ainsi de libérer les 150 prisonniers capturés avec votre zouz par le grand méchant. Il va sans dire qu'une bonne partie des prisonniers en question est assez bien planquée, et qu'il faudra rivaliser d'ingéniosité pour retrouver tout le monde.
Idem pour le système de quêtes annexes permettant d'upgrader vos consommables et vos attaques de base. Il va vous pousser dans les derniers retranchements d'un set de mouvements permettant de faire énormément de choses une fois tous les personnages débloqués. Il devient assez vite possible de faire un double saut suivi d'un dash pour atteindre un bâton fiché au préalable dans un mur : aussi grandes que soient les maps du jeu, on a vite l'impression de pouvoir toutes les traverser en quelques secondes.
Cette expérience de mouvement ultra-fluide a d'ailleurs été pensée jusque dans le système de raccourcis, qui va connecter de manière très efficace non seulement tous les niveaux entre eux (via un hub très fonctionnel) mais aussi les différentes parties d'un même niveau. Retourner chercher des prisonniers oubliés une fois qu'on a débloqué les bombes, le dash ou la capacité d'illuminer des tunnels enterrés ne prend jamais plus de quelques minutes. Janosik 2 n'est pas pour autant un jeu facile, mais c'est un jeu confortable. Et bandit de grand chemin ou pas, croyez-moi, le confort, ça n'a pas de prix.
Janosik 2 a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur.
Janosik 2 fait partie de ces jolies surprises dont on n'attend rien de particulier, mais qui donnent énormément. Sans véritables défauts, si ce n'est un démarrage un peu lent et une courbe de difficulté parfois légèrement chaotique, le titre d'Onix Games nous fait vivre une aventure rocambolesque et variée, servie par un level design soigné. Juraj Jánošík, qu'est-ce qu'il y a sous ton grand chapeau ? Pas beaucoup d'oiseaux, mais beaucoup de joie, assurément.
Les + | Les - |
- Level design très malin | - Démarrage un peu poussif |
- L'aventure est beaucoup plus variée que prévu | - Le réglage de la difficulté manque de finesse |
- Le scénario est bête, mais ne manque pas de faire sourire | - Un ou deux boss franchement sans intérêt |
- La palette de mouvements et d'attaques des personnages est très riche |
zalifalcam
J'aime les jeux double A, les walking simulateurs prétentieux et les JRPG, et plutôt que de me soigner, j'écris à leur propos.
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