20 ans déjà que Gran Turismo fait vrombir nos consoles. Après avoir permis à beaucoup de découvrir les joies de la conduite sportive sur les précédentes générations de Playstation, il débarque enfin sur PS4. Le genre est moins populaire que lors de la sortie du premier mais il reste suffisamment de passionnés à vouloir parcourir l’asphalte pour que la licence soit importante pour Sony. Face à un Forza au rythme de sortie bien plus constant, que vaut le nouveau « driving simulator » de Polyphony Digital ?
La première impression est bonne, l’écrin est soigné avec une vidéo d’introduction sur fond de Liszt qui enchaîne images d’archives et modèles 3D de qualité dans un très beau montage. Les menus sont bien pensés avec en arrière plan des images de voitures dans des paysages bien réalisés ou des événements importants avec leur date. Et puis c’est ici que commencent les déboires.
Pas le Dark Souls du jeu de caisse
Tel un réflexe je commence les épreuves du permis habituelles, qui n’en sont plus puisqu’ici elles ne servent qu’à débloquer des voitures pour le garage et plus des compétitions comme ce fut le cas pendant longtemps. Bon ok, c’est pas si grave, et la première épreuve commence… l’objectif est d’atteindre la ligne d’arrivée en ligne droite… non, pas de zone de freinage, même pas de freinage en fait. La seule question qui m’a traversé l’esprit étant : comment on fait pour rater la médaille d’or ? Passé cet étonnement c’est la facilité de ces épreuves qui me trouble. Obtenir l’or sur chacune ne me demande pas de trouver la trajectoire parfaite comme ça pouvait être le cas auparavant, une trajectoire correcte suffira. Le niveau d’exigence est donc à la baisse sur cette partie mais les sensations sont bonnes.
La suite du mode solo est un enchainement d’épreuves variées, dans lesquelles on peut faire connaissance avec l’IA du jeu. Alors comment dire… l’IA a un peu évolué en 20 ans mais ce n’est pas suffisant, les réactions sur rails sont toujours présentes. Et après tant d’années d’essais, pourrait on enfin se dire que, non, le rallye dans les Gran Turismo ça ne marche pas. L’adhérence inexistante, la sensation de conduire sur de la glace mais sans les pneus, c’est plus possible. Il y a beaucoup de choses à améliorer dans ce jeu, alors abandonnez ce gâchis de temps qu’est le mode rallye (ah et pensez à retirer le drift aussi, si si j’insiste). Ici aussi, obtenir l’or ne sera pas trop difficile. Beaucoup de choses à améliorer donc mais les sensations sont là pour le pilotage.
Une autre possibilité offerte (avec encore des médailles accessibles si on se donne un minimum de peine), est d’apprendre chaque circuit par morceau sur du time attack pour ensuite les faire en entier. Bonne idée pour mieux connaître les difficultés des tracés proposés par le jeu. Bonne idée, et de bonnes sensations pour se préparer pour les courses.
Passons donc aux compétitions … ah non … disparues ? Ah mais c’est à dire que j’aimais bien moi avoir un grand choix de courses avec des difficultés variées, des catégories différentes et tout le truc habituel … bon du coup regardons la partie en ligne.
Pêche à la ligne
C’est donc ici que le jeu se passe, en ligne. Regardons ce qui est proposé de ce côté là alors : ça sonne un peu creux, 3 courses quotidiennes, 2 championnats hebdomadaires et des parties créées par les joueurs dans un grand salon. Voilà voilà, … c’est un peu court tout ça. Si à ce marasme on ajoute le faible nombre de voitures différentes disponibles, mon petit cœur d’amateur de Gran Turismo ne va pas tenir longtemps. Vous la sentez l’odeur de DLC qui arrive ? La foire aux contenus et aux season pass réguliers pour lisser les revenus sur le long terme … oups désolé je reparle d’argent. Mais quand même, on voit bien venir le « game as a service » qui devient le modèle économique de beaucoup de gros éditeurs. Je dois voir le mal partout à force de lire des bilans comptables.
Parlons du reste de ce mode avec une bonne idée : les réputations. Deux notations qui permettent de classer les pilotes et de les faire jouer avec des gens aux classements comparables. Une première note pour les résultats en course très classique, et une seconde qui juge du fair play des pilotes. Bonne idée oui, mais la réalisation est hasardeuse. Un exemple pratique : je suis premier d’une course, je garde une trajectoire propre et au milieu d’un virage, un poursuivant venant de l’extérieur se rabat sur moi et me fait sortir de la piste, je perds 3 places, je prends une pénalité de temps pour ma sortie de piste (oui oui) et en bonus mon rang de fair play diminue, elle est pas belle la vie ? Cet exemple n’est malheureusement pas isolé et courir « fair » est parfois synonyme de défaite face à des bourrins.
Money for nothing
C’est donc en ligne et avec un moteur de classement un peu pété qu’il faudra faire des courses pour gagner des crédits et se constituer un garage. Ok cool je vais pouvoir avoir ma collection de caisses, mais :
- On récolte un grand nombre de voitures en faisant les épreuves solo
- Chaque jour il suffit de parcourir l’équivalent d’un marathon pour glaner un véhicule
- Le nombre de modèles différents est très réduit
- Et avec ceci, ce s’ra tout ?
L’utilité des crédits est assez limitée. Ajoutez une deuxième monnaie qui permet elle aussi d’acheter des voitures dans un autre magasin et voilà comment désintéresser les joueurs des magasins constructeur. Mais bon, les sensations sont bonnes une fois sur la piste…
Les sensations, voila ce qu’il reste de l’empreinte Gran Turismo. Une conduite de qualité avec ses habitudes et peut être quelques lourdeurs, mais les fans trouveront leurs marques. Les différences entre les voitures sont perceptibles, et trouver le modèle qui nous convient est toujours un plaisir pour s’essayer à taper du chrono sur le bitume. Les réglages de la boite, des suspensions et tous ces détails qui font que replonger dans le garage d’un GT est un bon moment. Mais voilà la magie d’un Gran Turismo n’est pas que dans sa conduite et faire un trait sur tant d’éléments qui définissaient la série depuis ses débuts (nombre de courses et de véhicules, épreuves exigeantes, …) reviens à casser le jouet de beaucoup trop d’enfants en une seule fois.
La qualité du fond n’a donc pas changé, ceux qui aiment le style de conduite que proposent les Gran Turismo ne seront ni dépaysés ni déçus. Mais si pour vous, Gran Turismo c’est un choix de véhicules pléthorique et des compétitions variées, alors celui-ci ne vous conviendra pas. Changer radicalement un jeu avec une si longue histoire est troublant. On peut y voir une prise de risque, je vois surtout un autre exemple de la frilosité dans la production des titres AAA. Garder le nom d’un jeu connu pour en faire quelque chose de très différent, ce qui limite les risques grâce à la notoriété. Que le business model du moment soit en ligne et avec des contenus additionnels réguliers est une chose, mais plutôt que de tordre les licences pour les faire rentrer dans ce modèle, il serait peut être temps d’essayer de prendre des vrais risques en créant des nouvelles licences. Cela évitera les comparaisons avec l’ancien pour se concentrer sur ce qui a été fait, mais peut-être serait-on moins indulgents si le nom ne résonnait pas …
JoK
J'aime les chiffres, tous les chiffres, et aussi les jeux vidéo mais pas tous
Articles similaires
Miniatures - La poésie du souvenir
nov. 20, 2024
Rogue Flight - Monte dans le robot, Zali !
nov. 16, 2024
Great God Grove - Queer et élastique
nov. 11, 2024