Développée par Amplitude depuis maintenant plus de dix ans, la série Endless accueille un nouvel opus avec Endless Dungeon, revisite de la formule Dungeon of the Endless. Et je le confesse immédiatement : je n’aime pas trop cette série. Je n’aime pas les 4X, ce qui me coupe d’office des Endless Space et de Endless Legend, et si les mécaniques et l’esthétique de Dungeon of the Endless avaient tout pour me plaire, je n’ai jamais accroché à son game feel. Ça se joue parfois à vraiment pas grand-chose. Autant dire que Endless Dungeon n’était pas franchement dans mon radar, surtout dans une année qui comporte déjà tant de titres plus proches de mes intérêts.
Et pourtant. Et pourtant, les quelques présentations du titre ont dévoilé un jeu qui semblait enfin apporter la patate et le fun qui me manquaient dans Dungeon of the Endless, la refonte visuelle était de toute beauté, et les premières previews se montraient particulièrement enthousiastes et positives, au point de m’embarquer dans la hype à quelques mois de sa sortie. Grand bien m’en a fait : Endless Dungeon est absolument brillant, que ce soit en tant que twin-stick shooter, tower defense ou roguelite, en solo comme en coop.
Goûter au mélange interdit
Je ne sais à vrai dire pas par où commencer pour encenser Endless Dungeon, tant il est solide sur ses mécaniques principales. Même son scénario un peu prétexte est complètement compensé par des dialogues rigolos, une chouette ambiance pulp de western spatial, une bande-son americana signée Arnaud Roy et Lera Lynn qui n’aurait pas détonné dans Hardspace: Shipbreaker et une direction artistique franchement inspirée, que ce soit dans le chara design de nos héros et héroïnes, le bestiaire ou les environnements. Parlons-en, d’ailleurs, de nos personnages jouables. Coincés dans une station spatiale dont ils vont devoir traverser les différents quartiers pour escorter un robot-cristal jusqu’au noyau qui permettrait de s’en échapper, nos protagonistes vont former des équipes de deux ou trois personnes (on recommande trois, en solo comme en coop), mettant en avant dès la composition du groupe l’aspect central de Endless Dungeon : la complémentarité.
C’est un point qui coule complètement de source pour un jeu coop/multi impliquant d’affronter et repousser des vagues répétées d’ennemis : l’équipe doit être équilibrée au maximum entre des rôles clés (tank, DPS, support, etc), et le roster de personnages répond totalement à ce besoin, en proposant des personnages très différents et tous très agréables à jouer. Mais Endless Dungeon est très loin de se résumer à un twin-stick shooter en coop, et apporte cette complémentarité dans sa partie roguelite, remplaçant avec succès les synergies habituellement au cœur du genre. Comme dans n’importe quel roguelite, la progression de nos personnages et de leur équipement se fait de deux manières : via des améliorations liées à une partie et qui seront perdues à la fin de chaque run et des améliorations permanentes, qui s’achètent au hub principal grâce à des méta-monnaies collectées durant les parties. Classique.
Ce qui peut faire peur, c’est que ces améliorations, définitives ou provisoires, ne synergisent pas ou très peu. C’est généralement signe d’un roguelite sans vraie profondeur de jeu – on a déjà oublié des trucs comme Death or Treat, ArcRunner ou Deflector pour cette raison – mais ce serait ignorer qu’Endless Dungeon est également un tower defense. C’est ce qui rend compliqué de s’intéresser à chacun de ses aspects individuellement, tant ils sont intrinsèquement liés, et c’est ce qui fait toute sa richesse : l’aspect tower defense se marie incroyablement bien avec la structure de roguelite et permet de remplacer des éléments aussi importants que la synergie sans faire perdre d’intérêt au titre. Car cette partie tower defense va impliquer beaucoup de choses, à commencer par des types d’ennemis assez variés et qui demandent finalement moins de skills de combat que de capacité d’adaptation.
Le syndrome de la tourelle
Globalement, un niveau de Endless Dungeon se déroule de la manière suivante : notre équipe et son robot-cristal arrivent dans un quartier de la station, qu’il va s’agir d’explorer tout en protégeant le robot, jusqu’à trouver sa sortie pour accéder à l’étage suivant. L’ouverture d’une nouvelle pièce est loin d’être un acte anodin : en plus d’éventuels ennemis/bonus/malus comme dans n’importe quel roguelite, cette action risque de faire apparaître un point de spawn et provoque l’augmentation du niveau de danger, lequel déclenchera une vague s’il est trop haut, faisant sortir des hordes de monstres, spectres ou robots desdits points de spawn. Et il va falloir être bien préparé : les ennemis sont costauds, nombreux, se dirigent vers différentes cibles (le robot-cristal, les personnages, les générateurs) et disposent de résistances et faiblesses qu’il est impossible d’ignorer si vous souhaitez survivre.
C’est probablement là toute la force de Endless Dungeon, cette incroyable maîtrise du rythme de ses parties : les moments calmes servent à poser des tourelles, acheter des armes et améliorations et analyser au mieux le terrain et les types d’ennemis présents sur la carte pour mettre en place la meilleure stratégie possible, tandis que les séquences de combats impliquent une immense réactivité – et communication dans le cas de la coop – de la part de l’équipe pour appliquer le plan et l’adapter en cas d’imprévus ou débordements – quasi à chaque vague, donc.
L’exécution est brillante, puisqu’elle réussit à la fois à mettre l’équipe sous pression constante (même quand on n’ouvre pas de portes, le niveau de danger augmente tout doucement, mais sûrement) et à lui donner un sentiment de contrôle, puisqu’elle peut tout de même décider du déclenchement de la majorité des vagues (voire en cumuler deux d’un coup, pour les plus téméraires qui pensent pouvoir gérer une vague renforcée) et du chemin emprunté par les ennemis (en ouvrant ou non certaines portes) et ainsi s’y préparer au mieux. Là où les Endless Space et Legend misaient sur le "one more turn" bien connu des joueurs·euses de 4X, Endless Dungeon réussit parfaitement à susciter le "encore une pièce" et "encore une partie" qui caractérise un bon roguelite.
Endless Fun
Car oui, Endless Dungeon est de ces roguelites qui parviennent à nous inciter à le relancer encore et encore, pour tester les nouvelles améliorations définitives et nouvelles recrues récupérées au hub entre deux runs, pour la perspective de grinder encore plus de méta-monnaies qui permettront de s’améliorer encore plus fort la prochaine fois, pour la promesse que toutes ces améliorations, mais surtout notre expérience personnelle, nous mèneront un peu plus loin dans la station, et, plus important, pour le simple plaisir de manier ses armes et personnages et mitrailler du monstre par paquets de cent.
C’est ce qui me manquait dans Dungeon of the Endless et qui me ravit dans Endless Dungeon : le game feel est fantastique, et le simple fait de parcourir les quartiers de la station en dézinguant tout ce qui passe à coups de pétoire est un plaisir en soi, plaisir largement amplifié par un vrai sentiment de progression. Les automatismes en termes d’achat et placement de tourelles, de gestion des ressources, d’apprentissage de patterns face aux excellents combats de boss, d’ouverture de portes, de création de chemins pour forcer les monstres à emprunter des couloirs truffés de pièges, de timing de déclenchement de vagues s’acquièrent très vite et donnent bien plus l’impression de s’améliorer que n’importe quelle augmentation des dégâts ou rapidité du robot.
Des améliorations pourtant très efficaces et originales, qui permettent vraiment de spécialiser ses personnages et d’aller à fond dans la complémentarité, avec des héros dédiés à certains types de dégâts élémentaires, au soin, à la réparation et amélioration des tourelles, bref, la possibilité de se construire une équipe très polyvalente et en capacité de s’adapter à un maximum de cas et de dangers. C’est cependant sur ce point que se dirigent mes deux petits reproches. Déjà, car la sauvegarde de ces améliorations se fait de manière parfois incertaine, il semblerait qu’il faille relancer une partie pour les conserver, ce qui me fait penser que le "Sauvegarder et quitter" depuis le hub principal ne fonctionne pas spécialement bien, et qu’en plus, la gestion de ce qui est conservé ou non entre les parties solo et coop est plutôt floue, pouvant provoquer la perte un peu soudaine de pans entiers de progression. Enfin, quand un gameplay est à ce point basé sur la complémentarité entre les personnages, le jeu à deux joueurs·euses, ou en solo avec une équipe de deux héros s’en retrouve fatalement déséquilibré, plus difficile – voire injuste – et moins intéressant. Des défauts légers, facilement contournables une fois pris en compte, et qui ne plombent en aucun cas ce qui est, à mes yeux, une des expériences coop (mais aussi solo) les plus amusantes de l’année.
Endless Dungeon a été testé sur PC via une clef fournie par l'éditeur. Il est également disponible sur PS4, PS5, Xbox One, Xbox Series et Nintendo Switch.
Je n'en attendais rien et j'ai été incroyablement séduit par la proposition d'Endless Dungeon, qui réussit avec brio à mêler des mécaniques de twin-stick shooter, de tower defense et de roguelite sans qu'un pan de gameplay ne vienne en parasiter ou atténuer un autre, le tout en rendant l'expérience aussi fun en solo qu'en coop. On lui pardonne ainsi facilement son manque d'intérêt à deux joueurs et ses quelques toussotements de sauvegardes : on reviendra très, très souvent sur ce Endless Dungeon, seul ou avec les copains et copines.
Les + | Les - |
- Les gameplay de tower defense, shooter et roguelite se combinent à merveille | - Quelques soucis de sauvegarde de progression |
- Des combats funs, variés et pêchus | - Moins intéressant avec une équipe de deux personnages |
- Le sentiment de progression est très gratifiant | |
- Fonctionne aussi bien en solo qu'en coop | |
- Une atmosphère réussie grâce à sa DA de western spatial et sa BO americana |
Shift
Camélidé croisé touche de clavier et militant pro-MS Paint. J'aime les jeux indés à gros pixels, les platformers sadiques et les énigmes.
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