Il y a des tests plus difficiles que d’autres. Total War Warhammer 2 en fait partie. A la fois nouvel épisode plein de bonnes idées mais qui propose un contenu quelque peu maigre pour justifier son prix, c’est un jeu bon mais terriblement compliqué à apprécier à sa juste valeur. Décortiquons le machin.
On va poser vite fait les bails : Total War Warhammer 2 est donc la suite d’un jeu sorti l’an dernier. Ça vous étonne un Total War qui sort aussi vite après le précédent ? Moi de même. Si le premier se déroulait sur le « vieux monde » de Warhammer, correspondant en gros à l’Europe, le second décolle vers le nouveau monde, les Amériques et l’Afrique pour comparer. Au programme de ce nouvel opus : 4 nouvelles races (les Hauts Elfes, les Elfes Noirs, les Hommes Lézards et nos vermines favorites les Skavens) et une toute nouvelle campagne unique pour la licence. Une campagne scénarisée, plus renfermée que ses ancêtres, mais gardant tout de même l’ADN de Total War, voilà un défi à la mesure du talent de Creative Assembly. Succès ou échec ? On va voir ça, patience.
Battre la campagne (littéralement)
Parlons tout d’abord de cette campagne, l’énorme nouveauté de Total War Warhammer 2. Si dans le premier vous n’aviez comme seule mission de renforcer votre empire en attendant que le Chaos arrive et foute le zbeul sur le vieux monde, ici vous avez de multiples objectifs, qui devront tous converger vers un seul et unique point : contrôler le Vortex. Le Vortex c’est ce tourbillon de magie qui trône au milieu d’un continent rond et qui retient le Chaos. Pas de pot, il faiblit. A vous d’en prendre le contrôle au moyen de 5 rituels à exécuter, déclenchables en accumulant une nouvelle monnaie : les tablettes.
Évidemment vos opposants chercheront également à exécuter ces rituels, et ça sera à vous de les empêcher de vous doubler. Sans oublier qu’EN PLUS le Chaos débarque, de plus en plus puissant, lorsque vous commencez vos incantations magiques, et essaiera de vous prendre une des trois villes indispensables à la bonne exécution du machin. S’ils ne le peuvent pas, ils se contenteront de ravager la campagne autour. Vous allez avoir du travail, car en plus vous devrez bien évidemment faire du Total War : aka vous étendre, vous développer, et taper sur vos voisins les plus faibles. Pour ralentir vos ennemis, plusieurs solutions : laisser le Chaos faire, envoyer vos armées directement, ou envoyer une force d’intervention, qui prendra la forme d’une armée indépendante contrôlée par l’IA et dont la force dépendra du pognon que vous mettrez dedans.
Entre Total War et XCOM 2 (pour l’aspect course contre la montre, sauf que là vous avez 3 factions qui vous mettent des bâtons dans les roues) cette campagne apporte un vrai vent de fraîcheur à la formule habituelle de « Construire, recruter, conquérir » typique des Total War. Et c’est probablement pour ça que j’ai dû m’y prendre à trois fois avant de faire une vraie bonne campagne. Les automatismes des autres épisodes que j’avais acquis à force d’expérience ne faisaient que me ralentir et finalement je me faisais doubler par tout le monde. Il ne faut pas attendre de se permettre d’attaquer, ou d’être sûr d’être en supériorité totale, il faut immédiatement foncer dans le tas, grappiller le maximum de territoires tôt, et au passage chopper un maximum des villes qui produisent le plus de tablettes pour les rituels. Pour quelqu’un qui, comme moi, passait son temps à peser chacune de ses décisions, ça change.
Le jeu n’est pas forcément plus difficile mais il est certainement déstabilisant si vous avez de l’expérience dans la licence, en particulier sur les épisodes historiques. Pour compléter sur la campagne on y retrouve les nouveautés introduites dans le précédent jeu : les batailles de quêtes (que j’oublie systématiquement à force de me concentrer sur mes objectifs), les ruines que vous pouvez coloniser (ou, nouveauté, explorer pour trouver des trésors), la corruption (Chaotique, Vampirique et Skavens) et vos héros, qui ont les mêmes fonctions que dans le 1. La gestion des villes n’a pas changé d’un iota, avec toujours le concept de région introduit dans Rome 2 et les tiers de bâtiments à améliorer. Dommage, mais ce système est robuste, donc pourquoi s’embêter.
Entre modernité et tradition (cliché numéro 125 du journalisme) la campagne de Total War Warhammer 2 est un magnifique exemple de changement d’une recette éculée qui commençait à montrer ses limites depuis déjà deux-trois épisodes. Bâtissant sur les bases saines du premier opus, on a le droit à une campagne fraîche, mais surtout nerveuse, qui ne vous laisse que peu de répit. A la manière d’XCOM 2, la campagne est une constante course contre la montre, sauf qu’ici la montre c’est trois autres supers puissances, prêtes à vous rouler dessus dès que l’occasion se présente. Et pour ceux à qui ce concept déplaît, The Creative Assembly vous laisse l’opportunité de jouer une campagne normale (en attendant la méga campagne liant les deux épisodes).
Des rats et des hommes (lézards) et des elfes (hauts et noirs)
Dans Total War Warhammer les races jouables avaient toutes une petite spécificité. Rien de bien transcendant, ça donnait plus dans le gimmick qu’autre chose. Visiblement les équipes de Creative Assembly ont appris les leçons des DLC du premier et ont accouché de races uniques, très démarquées les unes des autres. Les Hommes Lézards et leur filet géomantique qui vous octroie des bonus en fonction des villes contrôlées, les Elfes Noirs et leurs esclaves qui font tourner leur économie, sans oublier leurs généraux, loyaux jusqu’à un point au-delà duquel ils n’hésiteront pas à vous trahir (sans oublier les Arches Noires, d’immenses navires servant de villes mobiles), les Skavens (les plus rigolos) et leurs villes cachées dans les ruines, profitant de leur réseau de tunnels pour se déplacer à travers la carte et, au final, les Hauts Elfes et leur diplomatie habile permettant d’influencer les factions.
Je ne vais pas détailler outre mesure. Ces factions sont donc bien plus différenciées que dans le premier épisode et se jouent (de ce que j’ai vu en ayant testé les Hommes Lézards et les Elfes Noirs) très différemment. En tout cas sur la carte de campagne. Niveau carte de bataille, je sens moins de différences, avec moins de gimmick comme les Vampire qui n’avaient pas d’unités à distance dans le un. Je pense que les différences sont plus subtiles que ce genre de chose, les Hommes Lézards me semblant, par exemple, plus tanky que des Skavens (qui compensent par le nombre).
Évoquons vite fait les batailles, qui ont été sensiblement améliorées depuis le un. Les cartes sont plus variées, moins plates, offrant des reliefs propices au placement stratégique, ou des goulots d’étranglement rigolos à exploiter. Et y’a des dinosaures. Et les dinosaures rendent tout mieux. Point. Mais bon. Malgré tous les points positifs que j’ai évoqué vite fait, malgré le fait que Total War Warhammer 2 soit une nette amélioration du premier, il y a tout de même un truc qui me chiffonne.
Était-ce vraiment nécessaire d’en faire un second opus, vendu plein pot ? Le contenu ne justifie que très peu son prix. Un mois après la sortie d’une extension de XCOM 2 qui faisait presque figure de nouveau jeu, nous avons ici l’effet inverse : un jeu complet qui ressemble plus à une grosse extension. Ce qui en soit ne serait pas si grave, si précédemment The Creative Assembly et Sega ne nous avaient pas abreuvé de DLC pour le premier, ce qui sera inévitablement le cas pour cet épisode.
Là nous sommes donc face à un jeu qui peine à justifier pleinement son prix, qui arrive alors que le premier est toujours à 60€, plus 70€ de DLC. Et n’oublions pas que les deux seront nécessaires pour jouer à la grande campagne qui fusionnera les cartes des deux jeux (qui devrait arriver sous forme de DLC gratuit sous peu). Et en plus un troisième épisode est prévu.
Résumons donc : pour l’instant si tu veux faire une mega campagne il te faudra au moins 120€ de jeu. Et si tu veux avoir toutes les races il t’en coûtera 190€. Ce qui commence à faire une somme.
Du coup il m’est difficile d’apprécier réellement ce titre. Malgré le fait d’avoir eu une copie donnée par l’éditeur, je me mets à la place du joueur lambda, et ce prix commence à devenir un petit peu excessif pour ce que c’est. Il aurait été judicieux d’adopter un concept à la Paradox qui augmente peu à peu ses jeux via des DLCs à 10/20 €, qui offrent tout de même des améliorations gratuites si on ne veut pas payer.
Mais ne nous limitons pas à la politique commerciale douteuse pour juger le jeu. Total War Warhammer 2 est un vrai bon, très bon même, Total War. Chaque aspect est peaufiné, amélioré, modifié, pour offrir une expérience nouvelle. Les batailles ne changent certes peu, mais ça fait déjà 10 ans que The Creative Assembly a maîtrisé la recette, nul besoin de réinventer la roue. Les 4 factions, très différentes, sont également une nouveauté bienvenue, loin du reskins à peine caché des Total War historiques, et c’est une évolution des petits gimmicks de factions du premier Total War Warhammer. Certains trouveront, comme d’habitude, la diplomatie extrêmement légère, mais dans un titre nommé Total War c’est un détail (on est là pour taper sur ses voisins, pas pour boire du vin et manger des petits fours à l’ambassade Skaven).
Total War Warhammer 2 est le meilleur jeu de la série. Point. La formule a été peaufinée, améliorée, modifiée, pour sortir cette saga de ses problèmes historiques. Le jeu développe les nouveautés du premier, tout en rajoutant ses propres gimmicks qui changent totalement la manière d’aborder la campagne. Hélas, toutes ces petites nouveautés ne justifient pas le prix de 60€. Le jeu est généreux comme une grosse extension, mais quelque peu radin pour un titre plein prix. Espérons que lorsque le troisième épisode sera sorti, The Creative Assembly et SEGA feront une offre regroupant les deux premiers à pas trop cher, mais je ne compterais pas là-dessus. En attendant c’est dommage d’avoir fait un si bon jeu quelque peu gâché par une politique commerciale discutable.
Critique réalisée à partir d’une version fournie par l’éditeur
Tritri
Paradox, trains, Paradox, city builder, Paradox, espace, Paradox. Je suis un homme simple, aux goûts simples. Paradox.
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