Après deux courts jeux narratifs, le tout petit studio Party for Introverts se lance dans un RPG narratif hyper ambitieux. Vraiment trop ambitieux en fait.
Vous savez ce que chez TPP on aimerait le plus au monde ne plus avoir à écrire à propos d’un jeu ? Que le jeu aurait été vraiment très très cool, s’il n’avait pas été tout buggé, comme ici par exemple. Ok, Cabernet n’est pas aussi cassé que l’était 30 Birds, mais néanmoins assez pour que je vous recommande d’attendre encore quelques patchs avant de vous lancer, et ce, dès l’intro, c’est vous dire. Et ça m’embête beaucoup de commencer comme ça, parce que fondamentalement, j'ai beaucoup aimé Cabernet.
Libre comme une chauve-souris
Franchement, ça commençait très bien. Une DA et un univers très chouettes inspirés du folklore slave, un casting vocal très convaincant et une histoire de vampires dans une ambiance un peu gothique avec de jolies robes de bal, écoutez, moi, j'étais à fond. J’étais encore plus à fond quand au bout de quelques minutes un hussard aussi sassy que fondamentalement sympa m’apprend les bases de ma nouvelle condition à savoir hypnotiser les humains, se nourrir et surtout se transformer en petite chauve-souris pour voleter dans les airs. Il n’en fallait pas beaucoup plus pour me faire plaisir. Bref, j’étais très contente de suivre la vie, enfin la mort, enfin l’après vie de Liza après sa mort et sa résurrection en tant que vampire. Liza se retrouve dans une petite ville gouvernée par une très puissante comtesse représentante d’une société secrète de vampires. Elle n’a d’ailleurs pas été transformée en vampire par hasard. Première femme à obtenir son diplôme de médecine dans le pays, elle est vouée à devenir l’assistante du docteur Volkov. Bien sûr, les circonstances de la transformation sont un peu floues, mais le docteur le dit, ça va revenir. Il est docteur et il a l’air sympa dont on va le croire. En plus, c’est lui qui nous loge donc on ne va pas se fâcher tout de suite histoire de ne pas frire au soleil.

Quelques rencontres, un drame et quelques échanges pimentés plus tard, Liza s’habitue à sa nouvelle vie et commence à découvrir la ville, ses habitant·e·s, ses mystères, et à explorer sa condition de vampire, avec l’aide sarcastique, mais utile du Hussard. D’un point de vue gameplay, outre quelques QTE un peu pénibles et de deux trois phases « d’infiltration » si faciles que même moi, je n’ai pas trop galéré, il s’agit surtout de se déplacer soit à pied, soit dans les airs et d’interagir avec objets et êtres vivants et choisir l’orientation du personnage dans les dialogues. Est-ce que Liza va conserver son humanité ou s’orienter plutôt vers le nihilisme ? Plus on avance, plus on sent le potentiel de rejouabilité en penchant dans un sens ou dans l’autre et en choisissant différentes issues aux quêtes.
Le principal attrait de Cabernet c’est évidemment de découvrir la ville, ses habitant·e·s, leurs secrets, les créatures et coutumes du folklore slave et… la lutte des classes. Malgré l’abolition du servage à l’époque où se déroule l’histoire, on ne peut pas dire que la vie soit très fun pour les paysans et Cabernet développe autour de ce sujet un fil rouge qui nous guidera tout au long de l’histoire.

Du plomb dans les poches
Et pendant les deux premiers chapitres, en vrai, malgré un ou deux bugs légers, ça va. Et puis, petit à petit, certains boutons d’interactions ont cessé d’apparaître ou apparaissaient uniquement selon un angle précis. J’ai ainsi raté plusieurs QTE par impossibilité de trouver le point d’interaction et j’ai dû recharger la partie parce qu’il m’était impossible de ressortir d’une pièce. En parlant de recharger, le point de sauvegarde unique est relativement mal placé et chaque rechargement fait perdre de longues minutes de jeu. Mais, si ça n’avait été que des bugs purement fonctionnels, je crois qu’il aurait été plus facile d’en faire son parti. L’ennui, c'est que cela s’étend à l’histoire et aux interactions avec les personnages. Outre les personnages dotés d’un impressionnant don d’ubiquité leur permettant de se trouver à trois endroits différents au même moment (alors même que les vampires ne comptent pas ce talent parmi leurs nombreux pouvoirs), on compte aussi nombre de personnages qui oublient qu’ils vous ont rencontré alors même que vous avez discuté avec eux dans leur salon. D’autres semblent ignorer vos liens avec d’autres habitant·e·s alors qu’ils se connaissent entre eux, des personnages qui ont quitté la ville mais s’y trouvent encore, embrouillant sacrément les quêtes des personnages.

En parlant de quêtes, elles semblent fonctionner en vase clos. Ce que vous faites dans une quête ne parait avoir aucune incidence sur le village et l'histoire, ce qui devient franchement ridicule s’il se trouvait que vous assassiniez quelqu’un, ce qui je l’admets m’est arrivé et absolument personne n’avait même l’air de savoir qu’il était mort. Même les romances n’ont pas beaucoup de conséquences puisque vous pouvez romancer plusieurs personnes à la fois et tout le monde s’en fiche (je suis pour qu’on assouplisse les normes en matière de relations, mais j’ai tendance à penser que c’était moins le cas au XIXe siècle). La conclusion de certaines quêtes n’avait rien à voir avec les actions que j’avais effectuées, rendant tout ça un peu frustrant et un peu vain, et ce, alors même que j’étais attachée aux personnages et que j’étais investie.
Je mentirai toutefois en disant que j’ai passé un mauvais moment. Je me suis beaucoup amusée à chercher le chat et à voleter dans tout le village et dans les cheveux des passant·e·s pour les faire râler. Je me suis attachée aux personnages, à ces questionnements sur la mort, l’addiction, le capitalisme, l’éternité, le sens de la vie et la place de la science, de la littérature et de l’histoire. Cette communauté d’humain·e·s et de vampires vivants en étrange autarcie dans ce village où il est normal que la moitié de la population fasse ses courses fort tard dans la nuit est attachante même avec le manque de cohérence entre les quêtes et les réactions des personnages. J’avais envie d’explorer toutes les pistes, malheureusement, ça n’a pas été possible en raison des bugs qui m’ont empêchée d’aller au bout de quelques-unes. J’attends maintenant que le jeu soit patché pour relancer une partie et faire d’autres choix et possiblement terminer les quêtes que j’ai laissées en suspens.

Cabernet a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur.
Cabernet c'est le cas d'école d’un jeu dans lequel on sent l’ambition et même le talent pour écrire des histoires. Le problème, c’est que faire un jeu avec des narrations qui s’entrecroisent, c’est très ambitieux, peut-être un peu trop pour un premier grand jeu, en tout cas à cette échelle. Il aurait sans doute fallu plus de temps et surtout faire tester le jeu au-delà des deux premiers chapitres de manière beaucoup plus exhaustive pour éviter de sortir un jeu vraiment attachant, mais difficile à recommander en l’état. Il a toutefois été patché plusieurs fois depuis sa sortie et certainement que dans quelque temps, il sera beaucoup moins frustrant. Je doute néanmoins que la copie finale obtienne la très bonne note qu’elle aurait méritée.
Les + | Les - |
- Un univers et des personnages attachants | - Des bugs récurrents |
- De nombreuses histoires à découvrir | - Des quêtes en vase clos |
- L'exploration du folklore slave | - Pas de version française |
BatVador
Traductrice ascendante topiaire qui aime les city builders, les dystopies et les jeux avec des gens déprimés dedans.
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