Battletech était sur mon radar depuis quelques temps. La promesse de combats tactiques à la XCom, mais avec des mechas géants, devrait suffire à convaincre les plus dubitatifs.
Mais avant toute chose remontons dans le temps à l’époque merveilleuse des années 80. C’est en 1984 que FASA lance Battletech, jeu de plateau et de stratégie inspiré par les mechas à la japonaise, sorti tout droit de l’esprit de L. Ross Babcock III et Jordan Weissman (qui créera plus tard Shadowrun). Dans un univers futuriste féodal, où les secrets des technologies avancées se perdent de plus en plus, des bandes de mercenaires aux commandes de mechas antiques s’affrontent pour la suprématie au nom de grandes maisons nobles dans un jeu de pouvoir incessant. Ce jeu de plateau a depuis engendré de multiples extensions, des jeux vidéo (dont la série des Mechwarriors), un jeu de cartes et des tonnes de romans. 34 ans plus tard la licence est de retour sous la forme d’un jeu de tactique au tour par tour par Harebrained Schemes, studio de Weissman, et créateur des Shadowrun Returns. Autant dire que c’est un peu un retour aux sources pour la licence, qui reviendra également cette année avec Mechwarrior 5.
Mon mech à moi…
Battletech se présente donc comme un XCom like, c’est-à-dire : une couche stratégie et gestion de votre vaisseau, de vos mechwarriors et de leurs machines de guerre, mais surtout un aspect tactique où vous jouerez les batailles au tour par tour. Passons vite fait sur l’aspect gestion, qui n’est clairement pas le point fort du jeu. Tout juste vous devrez faire monter de niveau vos guerriers, entretiendrez vos mechas, qui morfleront pas mal, et améliorerez votre vaisseau qui servira de camp de base pour votre petite compagnie de mercenaires, qu’il faudra faire grandir. Vous serez de temps en temps interrompu dans vos voyages par des évènements aléatoires où il vous faudra prendre des décisions qui auront une influence sur le moral de l’équipage, ou vos finances. C’est très anecdotique, mais on retrouve l’ADN RPG du studio. ADN qui est également présent dans l’histoire. Ainsi, si le scénario est le classique « redonnez le trône à une reine destituée qu’elle est gentille alors que le nouveau est un méchant », il se présente comme un RPG, avec dialogues et tout le toutim. Alors attention on n’est pas face à l’histoire du siècle mais c’est sympa.
Mais bref le cœur de Battletech n’est pas là de toute façon : ce que l’on veut ce sont des combats tactiques de mechas. Et là le jeu brille. Nous avons affaire à un jeu profond. Et quand je dis profond ce n’est pas « compliqué ». En soi c’est simple : on peut tout à fait s’en sortir en se contentant de balancer les plus gros mechas qu’on a et tirer jusqu’à plus soif sur les adversaires jusqu’à que mort s’en suive. Mais on peut également réfléchir. Et là le jeu prend tout son sens. Par exemple : vos mechas sont équipés de jetpacks, ce qui leur permet, entre autres, de se placer d’un coup d’un seul derrière un groupe d’ennemis, le tout sur une corniche, pour profiter à la foi du malus d’armure sur l’arrière des mechas, mais aussi du bonus de précision conféré par la hauteur.
Il faut également prendre en compte à tout instant le positionnement de vos troupes, surtout en rapport avec les dommages sur leur armure. Il pourrait être profitable de perdre un tour à replacer un mecha lourd lourdement blessé sur le flanc droit, pour exposer son flanc gauche, sous peine de le voir sauter au prochain tour alors qu’il aurait pu sauver la situation. En effet les dommages sont localisés : tête, bras, flancs, jambes, les tirs frappent aléatoirement ces endroits en fonction de l’orientation de la cible. Occasionnellement, quand votre jauge de moral sera remplie, vous aurez le droit à un tir « précis » : c’est-à-dire que vous pourrez sélectionner l’endroit où se concentrer sur l’adversaire. C’est généralement le moment où vous balancez tout ce que vous avez sur un mecha déjà bien endommagé, le tout sur son torse (car quand vous détruisez le torse ça met hors jeu la cible). Les combats tactiques sont bourrés de ce genre de micro décisions qui peuvent faire virer le cours d’une bataille. Et c’est le signe d’un grand jeu tactique quand vous pouvez gagner juste avec les bons choix.
C’est ici que l’héritage du jeu de plateau se fait évidemment le plus sentir. Beaucoup plus que dans Xcom certaines mécaniques font très tabletop. Par exemple : plus vos méchas avanceront durant un tour, plus ils accumuleront de l’esquive, qui se présentera sous la forme de petits symboles qui annuleront certains tirs qui auraient fait mouche sinon. On imagine parfaitement le joueur mettre trois jetons à côté de son mecha sur le plateau de jeu, qu’il utilisera pour annuler certains jets de dés. Notez bien que je ne connais pas le jeu Battletech en lui-même, mais on retrouve ce type de système dans le jeu X-Wing par exemple. L’ordre de jeu des mechs est également un probable héritage du jeu original : ici vous ne jouerez pas toutes vos unités en premier, et l’ennemi en second, mais les tours alterneront en fonction des classes de vos mechs, et de la compétence de pilotage des mechwarriors. Par exemple : un mech léger de catégorie 4 avec un pilote au niveau maximal jouera avant le même mech piloté par quelqu’un de moins expérimenté. Ce même système se retrouve encore une fois dans d’autres jeux, comme le X-Wing sus-mentionné.
… il est un peu lent
L’aspect tactique bénéficie énormément de l’autre point fort de Battletech : la personnalisation des mechas. Vos machines de guerres sont toutes différentes : certaines seront rapides, mais peu armées, d’autres lourdes et suréquipées, et vous devrez prendre en compte tous les défauts et avantages de votre roster de mechs. Chaque machine vient avec un nombre de slot pour armes prédéterminé par son modèle. Armes qui se divisent en 4 types : laser, missile, projectiles, et soutien. Chacun a des avantages et des inconvénients, et il faudra équilibrer. Par exemple les lasers sont généralement mortels à longue distance mais produisent beaucoup de chaleur, ce qui endommagera votre mecha, et risquera même de le mettre KO pendant un tour (toujours une mécanique qui semble hérité du jeu original).
Avant de prendre une mission, il faudra également veiller à bien regarder dans quel type d’environnement vous serez : il serait peut-être judicieux d’éviter les armes qui produisent beaucoup de chaleur (comme les lasers donc) dans un environnement désertique ou dans le vide, tandis que si vous débarquez sur une planète polaire vous pourrez vous lâcher niveau spectacle de Jean-Michel Jarre. Encore une fois tout est une question de bonnes décisions et d’équilibrage, et envoyer les bons mechas, au bon moment, avec les bons pilotes (qui profitent de bonus avec l’expérience) pourra vous faire gagner une bataille que vous auriez perdue autrement.
Mais aussi sympathique soit-il, Battletech souffre d’un défaut qui en fera rager plus d’un : son rythme. Alors que l’on soit clair : je ne m’attends pas à ce qu’un jeu avec des mechas soit super rapide, mais nous sommes ici face à un jeu qui prend trop son temps pour la moindre action. Au-delà de la vitesse de déplacement des unités (ce que je peux comprendre, vu la taille des machines), on a quand même parfois plusieurs secondes entre chaque déplacement de l’IA et l’affichage des dégâts sur les tirs réussis. Accumulé sur plusieurs heures, on doit bien perdre 10 minutes qui pourraient être consacrées à jouer si le jeu voulait bien s’activer un peu. Dans les options on peut déjà se débarrasser de la caméra cinématique, qui elle aussi prend parfois son temps, mais pour plus de dynamisme, notamment sur l’enchaînement des actions, il faudra passer dans les fichiers du jeu et les modifier à la main.
Le jeu accuse également quelques ralentissements lors des chargements, qui d’ailleurs sont parfois bien trop longs, dépassant aisément la minute sur mon ordinateur. Dernière chose : attendez-vous à beaucoup save scum. Parfois le jeu vous balance des pics de difficulté assez dingues, qui peuvent vous rendre une mission impossible. Là où ça devient amusant, c’est qu’en rechargeant avant de prendre la mission et en acceptant le même contrat, vous vous retrouverez face à une carte et des ennemis totalement différents. On est ici sur un léger souci d’équilibrage du moteur de génération des missions. Pour être parfaitement honnête : Harebrained Schemes compte apporter un patch sur la vitesse et l’équilibrage d’ici juillet, mais en attendant il faut garder à l’esprit ce paragraphe quelque peu dur si vous comptez passer à la caisse.
Ce dernier paragraphe peut vous paraître dur et rebutant mais ne vous y méprenez pas : Battletech est un grand jeu de tactique, digne de son héritage tabletop (ne serait-ce que dans certaines de ses mécaniques), et certainement tout à fait dans la ligne éditoriale de son éditeur Paradox. Profond, complexe, sans être inaccessible (même si un tutoriel plus complet aurait été de bon ton), vous pourrez passer des heures à personnaliser vos mechas, puis à les lancer sur le champ de bataille, où vous aurez parfois l’impression que la moindre décision sera déterminante pour vos hommes. Et c’est ce que l’on veut d’un jeu de tactique de type XCom. En ça Battletech est une réussite, que ne peut totalement entacher une technique parfois discutable, et un rythme lent, très lent.
Tritri
Paradox, trains, Paradox, city builder, Paradox, espace, Paradox. Je suis un homme simple, aux goûts simples. Paradox.
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