Metroidvania minimaliste imaginé par un développeur solo, Astronite est, hélas, une catastrophe sur pattes qui aurait mérité une meilleure supervision de la part de son éditeur.
Car oui, Astronite, même s'il en a l'air, n'est pas « juste » un projet individuel balancé à titre de portfolio sur itch.io, c'est aussi un jeu édité par une société bien installée, JanduSoft, avec sortie du jeu en support physique à 30 € et tout le toutim. En toute logique, le genre de logiciel qui aurait dû bénéficier d'un accompagnement, qui ne l'aurait pas laissé aboutir à un résultat qui rate systématiquement tout ce qu'il essaye de faire. La démo, parue en septembre, était par ailleurs très encourageante. Mais non, rien à faire, ça ne fonctionne pas du tout. La faute à un level design raté, à la volonté de marier des mécaniques empruntées un peu partout de manière pas très heureuse, ainsi qu'à une pléthore de problèmes d'équilibrage et de bugs critiques.
Pourquoi est-ce que tu me détestes, jeu ?
Il me semble utile de rappeler qu'au Pixel Post, on adore globalement les jeux difficiles : Shift y consacre ses lundis sur Twitch et je suis moi-même un idolâtre de Celeste, Shovel Knight et Dark Souls. C'est précisément pour cette promesse d'une rencontre entre un jeu FromSoftware et un metroidvania minimaliste à la Gato Roboto que je me suis positionné pour écrire un article sur Astronite. Gato Roboto qui était d'ailleurs, à mon sens, une des meilleures propositions de 2019. Seulement voilà, il y a « difficile », et il y a « injuste », et j'ai très vite compris qu'Astronite allait être un jeu qui préférait me voir échouer que progresser.
Formellement, il s'agit d'un jeu d'aventure et d'exploration tout ce qu'il y a de plus classique. Comme dans un bon vieux Super Metroid, vous arrivez sur une planète où on vous chipe votre équipement (fusil, jetpack, tuba, etc.), et vous allez devoir explorer un labyrinthe pour retrouver tout ça. Et au passage, battre une palanquée de monstres et de boss, récolter des bonus, gagner en compétence, trouver des passages secrets, etc. On a déjà vu ça assez de fois pour connaître parfaitement les codes du genre. Sauf qu'il est assez évident qu'Astronite a multiplié les choix de design destinés à transformer ces codes en autant d'épines dans votre manette.
Un exemple : Astronite fait le choix de mettre une bonne partie des upgrades disponibles pour votre personnage dans une boutique où le moindre objet est fort cher et vous demandera de longues et fastidieuses séances de farming. Un monstre de base rapporte entre 5 et 7 pièces, les upgrades les plus solides sont à plus de 3000 pièces. Et si vous mourez deux fois avant l'achat, vous perdez tout. Pourquoi pas, sauf qu'Astronite fait non seulement le choix de dissocier les modules de sauvegarde des téléporteurs permettant de se rendre à la boutique, mais a placé ces derniers dans des zones généralement lointaines du cœur de l'action… Et les a rendus payants. En gros, le simple fait de se rendre à la boutique vous coûtera (du moins en début de partie) beaucoup d'argent, du temps et vous fera grosso modo toujours prendre des risques inconsidérés. Il vous faudra ainsi farmer non seulement pour les upgrades, mais aussi pour le coût du voyage aller ET retour.
Ajoutez à cela que les salles de sauvegarde comme de téléporteurs sont parfois situées assez loin des salles de boss et que les boss ont des patterns si meurtriers et si illisibles qu'il est mécaniquement impossible de les battre sans au moins cinq ou six essais, et vous obtenez un cocktail difficile à avaler. Qui a envie de retraverser encore et encore et encore la même série de salles après avoir perdu toutes ses économies pour se faire dégommer par la phase 3 d'un adversaire capable de vider votre barre de vie en cinq secondes ? Et le placement plus qu'étrange des salles de sauvegarde et des téléporteurs est loin d'être le seul problème qui vient parasiter Astronite.
Attention, nouvelle règle !
Absolument tous les aspects d'Astronite semblent être victimes d'une sorte d'arbitraire qui, je pense, est le témoignage d'un jeu pas assez testé et sur lequel le développeur n'a pas eu assez de retours critiques. J'ai déjà évoqué le prix grotesque de certaines updates, mais il y a tout un tas d'éléments plus bizarres encore : une salle dont la configuration change à chaque point de vie perdu qui empêche d'apprendre son level design ; des combats dans des couloirs où il est presque impossible d'esquiver les coups ennemis ; des obstacles qui une fois vous téléportent au début du niveau, une fois vous font juste tomber dans le vide ; un tir concentré qui dispose d'un fort recul, ce qui le rend inutilisable dès que vous êtes sur des petites plates-formes, etc. Tout ceci s'accompagne par ailleurs de problèmes de lisibilité étranges. Le compagnon volant que vous récupérez en milieu de partie qui se fout dans votre champ de tir, des stalactites qui ne sont que de simples éléments de décor à côté d'autres qui vous prennent un point de vie. Le tout complété par des masques de collision et des frames d'invincibilité absolument pas clairs qui n'aident pas à savoir si vous allez toucher un ennemi ou au contraire vous prendre un gnon. Des séquences confuses qui ne devraient pas arriver dans un jeu en pixel art minimaliste en noir et blanc.
Pire encore, alors qu'on commence à s'habituer à tout cela et à apprécier les qualités du jeu (comme son joli boss design) Astronite finit au beau milieu de l'aventure par se mettre une énième balle dans le pied. Après avoir vaincu la première série d'antagonistes, votre ennemi juré va brutalement décider de rehausser le niveau de difficulté et de simplement doubler le nombre de PV de tous les monstres de la carte. Tout ce que vous avez farmé pendant les premières heures de jeu s'en retrouve donc quasi caduc et vient nier la sensation de progression et de montée en puissance. Un comble dans un jeu qui vous demande de collecter autant d'or pour se payer le luxe d'avancer sans mourir en boucle.
Astronite demandant énormément d'allers et retours, on se retrouve donc à devoir recommencer encore et encore des sections entières du labyrinthe, mais en piétinant dans les niveaux du début de l'aventure où la moindre araignée est devenue un sac de frappe increvable. Une initiative qui ne sert à rien, sinon à vous ralentir, et à créer d'autres problèmes de level design : certains ennemis qui attaquent en meute ont désormais trop de PV pour être éliminés avant de vous toucher. Super.
Pour compléter ce tableau pas très agréable, la version PC du jeu sur laquelle j'ai effectué ma run souffrait de bugs invraisemblables pour ce type de production, à commencer par des ralentissements constants. Et pas une simple baisse de framerate : un passage du jeu complètement au ralenti, façon bullet time, me forçant à relancer complètement Astronite pour retrouver des déplacements fluides. Le tout évidemment accompagné de quelques crashs aléatoires qui vont bien, et de mon bug préféré de tout le jeu, à savoir la désactivation aléatoire, mais régulière, de la touche start de la manette. Oui, oui, celle qui permet de quitter le jeu.
Astronite a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur. Le jeu est également disponible sur PlayStation 4 et 5, sur Nintendo Switch et sur les consoles Xbox.
J'espère sincèrement que des mises à jour vont venir corriger Astronite après sa sortie. Il ne faudrait pas grand-chose pour qu'il devienne un oubliable, mais sympathique metroidvania mâtiné de mécaniques à la Dark Souls et Shovel Knight. Cependant, il nous faut bien faire avec ce que nous avons sous la main, en l'occurrence une version dont la finition ne semble pas du tout refléter l'intention de son créateur de livrer un jeu amusant. Avec ses masques de collision imprécis, ses ralentissements invraisemblables, son économie mal pensée et sa difficulté injuste, il constitue hélas en l'état un produit faiblard et frustrant.
Les + | Les - |
- Quelques séquences annexes amusantes | - Level design très moyen et approximatif |
- Les boss sont très beaux | - La boutique du jeu nécessite de farmer énormément |
- Des ralentissements et des plantages inexplicables pour un jeu du genre | |
- Beaucoup, beaucoup trop d'allers-retours | |
- Absence totale d'équilibrage de la difficulté | |
- Les ennemis qui deviennent des sacs à PV en milieu d'aventure |
zalifalcam
J'aime les jeux double A, les walking simulateurs prétentieux et les JRPG, et plutôt que de me soigner, j'écris à leur propos.
Articles similaires
Miniatures - La poésie du souvenir
nov. 20, 2024
Rogue Flight - Monte dans le robot, Zali !
nov. 16, 2024
Great God Grove - Queer et élastique
nov. 11, 2024