Partie Remise est notre nouvelle chronique où nos rédacteurs revisitent des jeux après plusieurs mises à jour et vous donnent leur avis actualisé. Aujourd’hui, Shift a remis les mains sur Overcooked! 2, jeu qui l’avait déçu à sa sortie.
Je vais tout avouer maintenant : je ne suis pas très bon aux jeux vidéo. Pas dramatiquement mauvais, mais c’est quand même pas bien glorieux, et il me faut en général quelques heures de plus que tout le monde pour terminer le mode solo d’un jeu. C’est pas grave, avec de la persévérance ça finit par passer, mais ça me bloque pour une chose : les jeux multijoueurs. Après des années à squatter les bas de classements de Team Fortress 2, Awesomenauts ou League of Legends, j’ai fini par me lasser de la défaite compétition et ne jouer avec des gens que dans une seule configuration : en coop, locale de préférence.
Et c’est la raison de cet exutoire, puisqu’en 2016 sortait l’une de mes nouvelles références en matière de jeu en coopération : Overcooked, un jeu de cuisine absurde et nerveux, forçant les joueurs à s’entraider pour préparer et servir un maximum de plats dans un temps imparti. Le jeu misait sur un bon nombre de cuisines et de situations différentes (et débiles) pour varier et corser sa progression ; en arriver à bout demandait beaucoup de communication et de planification entre les joueurs, ainsi qu’une bonne gestion du stress et des priorités. Il nous a longuement tenus en haleine ma complice de jeu (alias ma petite sœur) et moi, et après l’avoir poncé à 100% nous attendions bien évidemment la suite.
This too-oown is coming like a Ghost Town ♪
Et elle est arrivée cette suite, co-développée par Ghost Town et Team 17, avec moult promesses derrière : plus beau, plus fou, plus grand, de nouvelles fonctionnalités ; nos yeux brillaient d’excitation, naïfs que nous étions. Car Overcooked! 2 est sorti dans un bien triste état et nous a fait déverser une quantité astronomique de sel en bien peu de temps. Alors certes, c’est plus joli qu’avant. Oui, la nouvelle possibilité de se jeter les ingrédients à la figure est très drôle (et fortement imprécise). La bande-son est adorable et entrainante (je vous en conjure, allez écouter son OST), il y a du multijoueur en ligne, oui oui très bien. Mais bon, par où commencer.
Déjà, par l’absence de créativité des niveaux. Overcooked! 2 n’arrive jamais à atteindre le niveau d’inventivité du premier, tout est trop sage, trop attendu ou déjà vu. Là où Overcooked premier du nom nous balançait à bord de camions lancés à toute blinde sur l’autoroute, dans des bateaux de pirates, stations spatiales, volcans, maisons hantées, sa suite se contente de reproduire les mêmes idées, la folie en moins. On ne s’ennuie pas pour autant, ça reste rigolo, coloré et bien fichu, mais les niveaux s’enchaînent sans trop de surprise et en atteignant le dernier niveau du jeu, on attend toujours, en vain, cette étincelle de folie. Mais cette absence d’innovation et de prise de risque n’est même pas le pire problème dans Overcooked! 2.
Non, là où le jeu part à 160 sur l’autoroute de la déception, c’est sur son système de points. Je ne suis pas particulièrement attaché à la difficulté dans les jeux, j’ai même tendance à passer en mode facile quand le challenge est trop élevé et que je veux juste profiter de l’histoire ou de l’ambiance. Le souci n’est pas qu’Overcooked! 2 soit trop facile, ce n’est même pas vraiment le cas d’ailleurs : les niveaux sont truffés d’éléments perturbateurs et pièges en tous genres (tables qui se déplacent toutes seules, niveaux sur la glace, feux qui se déclarent dans la cuisine), non le problème est qu’il est frustrant. Pour la quasi-totalité des niveaux, nous les avons commencés en nous disant « Pour le moment on se fiche des points, on va tenter des trucs pour voir comment est agencé le niveau et développer une stratégie. On le refera ensuite pour essayer d’avoir le maximum de points », ce qui a eu pour résultat, de hé bien, décrocher le maximum de points du premier coup, y compris pour le boss de fin.
À aucun moment Overcooked! 2 ne laisse le temps aux joueurs de comprendre les niveaux et d’essayer différentes tactiques : en faisant n’importe quoi de façon complétement désorganisée, la très grande majorité des niveaux se bouclent dès le premier essai. Ça pourrait paraître anodin comme point, après tout le jeu fait de son mieux pour être attrayant, drôle, coloré, rythmé, mais cette histoire de scores trop faibles est à mon sens dramatique, car elle retire tout sentiment d’urgence. Overcooked est drôle car tout est constamment urgent : il faut faire attention aux différents plats qui cuisent tous à des vitesses différentes et qu’il ne faut surtout pas laisser brûler, il faut faire la vaisselle pour ne pas être à court d’assiettes, chaque plat doit être servi à temps et il y a bien sûr le compte à rebours de fin de partie et tout ceci est à prendre en compte pour atteindre le score attendu. De ce sentiment d’urgence naît très rapidement de la panique chez les joueurs et, je crois, tout l’amusement qui en découle. Couper des oignons dans le jeu n’est pas franchement drôle en soi, en revanche hurler « VIIIIIIIITE LES OIGNONS, MOI JE FAIS LA VAISSELLE, AAAAAAAH LA SOUPE BRÛLE, PRENDS L’EXTINCTEUR, LAISSE TOMBER LES OIGNOOOOONS », ça pose tout de suite une autre ambiance. Et en retirant l’urgence des situations, Overcooked! 2 perd une très grande partie de son intérêt. À quoi bon s’émouvoir devant sa cuisine en feu, quand on sait que le niveau est tout de même gagné. Tant pis si ce plat est raté, on le jette à la poubelle et on en refait un autre, on a le temps. Et c’est terrible, d’avoir le temps dans Overcooked.
L’arrivée des rois màj
Bon mais alors, pourquoi déverser autant de sel sur un jeu sorti il y a plus de six mois alors que je pourrais le laisser prendre la poussière dans ma bibliothèque Steam et passer à autre chose ? Déjà parce qu’il fallait que ça sorte, je suis meurtri, vous m’entendez ? Meurtri. Et ensuite parce qu’un petit miracle s’est produit ces derniers mois et que Ghost Town a sérieusement retapé son jeu tout cassé. Ils ont commencé par me faire grincer des dents très fort en sortant le DLC payant Surf’n’Turf, qui s’avère être très bon, mais débourser cinq euros de plus pour un jeu avant même la moindre mise à jour, ça me faisait mal. Pourtant, avec Surf’n’Turf, le studio allait déjà dans le bon sens. Les points requis pour gagner un niveau sont de nouveau raisonnables et les nouvelles recettes apportent enfin de la variété dans le gameplay, avec les barbecues sur lesquels il faut régulièrement souffler pour réguler leur température, les cuisines sur la plage soumises aux aléas de la marée ou encore l’arrivée de pistolets à eau pour éteindre les incendies ou faire la vaisselle.
Mais le vrai salut d’Overcooked! 2 est arrivé avec sa deuxième mise à jour (cette fois-ci gratuite), apportant une révision de l’interface (je ne me suis pas étendu dessus, mais c’était pas terrible non plus de ce côté) et surtout, le Sacro-saint New Game +. Ce mode ajoute une quatrième étoile à gagner dans chaque niveau, et donc un nouveau maximum de points à atteindre. Le jeu devient instantanément génial, et tant pis si les nouveaux scores requis sont parfois trop élevés, l’essentiel est là : il faut de nouveau planifier minutieusement chaque niveau, et le sentiment d’urgence jusque là cruellement absent est de retour. La promenade tranquille que se trouvait être la campagne d’Overcooked! 2 redevient cette exaltante course contre la montre tant attendue. Notre nombre d’heures sur le jeu a depuis triplé, nous sommes loin d’en voir la fin, mais nous nous amusons enfin dessus, et c’est probablement la seule chose qui compte. Il est également agréable de noter que Ghost Town continue de sortir de nouvelles mises à jour saisonnières gratuitement (la dernière datant du mois de février) avec quelques niveaux supplémentaires à chaque fois (douze à ce jour, d’autres arriveront dans l’année) ainsi que de nouveaux modes de jeu plutôt classiques mais sympas, comme le Practice Mode (sans minuteur, très utile pour s’entraîner au NG+) ou le Survival Mode (chaque plat servi redonne du temps au compte à rebours et il faut tenir le plus longtemps possible).
Overcooked! 2 est l’archétype (un peu trop récurrent à mon goût) du jeu tout pété à sa sortie (probablement prématurée) et rafistolé progressivement par le studio à grands coups de patchs et mises à jour. Il s’en est fallu de peu pour que le titre de Ghost Town et Team 17 soit un désastre, mais ça y est, je peux enfin affirmer qu’Overcooked! 2 est recommandable, peut-être même plus que son prédécesseur, et qu’il va encore s’améliorer pendant quelques temps. Sur ce je vous laisse, je retourne crier avec ma frangine, une sombre histoire de pizzas qui brûlent.
Shift
Camélidé croisé touche de clavier et militant pro-MS Paint. J'aime les jeux indés à gros pixels, les platformers sadiques et les énigmes.
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