Cette fois-ci dans Partie Rapide, Noodles vous parle de Survive the Blackout, difficile jeu de survie narratif, et Zali vous parle de Metal Unit, un rogue-lite nerveux prometteur, mais dont le statut d’Early Access pourra frustrer.
Survive the Blackout
Développer un premier jeu n’est jamais chose simple. Développer un projet aussi radical que Survive the Blackout l’est peut-être encore moins. Baby Bison Games et ses 5 employés polonais sont tout de même allés au bout de leur vision d’un jeu narratif de survie hardcore. Si cela ne semblait pas forcément bien parti au début, il faut avouer qu’il se dégage quelque chose d’intéressant de ce petit titre imparfait sorti sur PC la semaine dernière.
On y incarne un groupe de trois survivants prenant la Route pour rejoindre la Lumière, terre d’espoir suite au Blackout survenu quelques mois plus tôt. L’électricité s’est arrêtée brutalement et tous les appareils électriques de la planète ont cessé de fonctionner, laissant les habitants dans un chaos total et faisant ressortir leurs pires penchants pour survivre. Survive the Blackout est un jeu de survie narratif donc. À chaque étape du trajet pour rejoindre cette fameuse Lumière, des événements aléatoires se déclenchent. Une attaque de pillards, une femme blessée, un bâtiment à looter… Il faudra dans chaque cas choisir parmi plusieurs options l’action à effectuer. Ce bâtiment qui semble sûr à première vue mérite-t-il le coup d’être exploré pour essayer de récupérer de TRÈS précieuses ressources au risque de tomber sur un pillard violent ? Faut-il donner une trousse de soin à ce bébé mal en point alors que les membres du groupe en auront sûrement besoin plus tard ? Chaque décision est à prendre après un moment de réflexion important. Et, souvent, la décision prise affectera d’une manière ou d’une autre les statistiques de nos personnages : santé, faim, énergie et moral. Une seule de ces stats arrivant à zéro et c’est la mort définitive du personnage. Les trois personnages morts et c’est la fin de la partie, plus qu’à tout recommencer en espérant être plus chanceux.
Un jeu qui ne vous veut pas que du bien
La chance. Peut-être le plus gros problème de Survive the Blackout. Comme tous les événements ou les ressources à récupérer arrivent de façon aléatoire, le facteur chance est très important dans la réussite de notre partie. Un trop mauvais enchaînement d’événements pourra très rapidement y mettre fin. Et ne comptez pas forcément sur le fait d’apprendre par cœur les différentes décisions à prendre pour optimiser les bons choix. Leurs effets dépendent des trois personnages que l’on contrôle, mais deux de ceux-ci nous sont désignés automatiquement parmi les 6 persos du jeu. Le joueur ne peut en choisir qu’un seul avant le début de sa partie, et chaque personnage dispose de ses caractéristiques et spécificités propres (ouvrir des portes facilement, se débrouiller en combat, avoir plus d’éloquence pour les discussions avec les personnes rencontrées, etc). Bref, si la réflexion et l’optimisation sont nécessaires pour bien avancer, sans un minimum de chance (ce que je n’ai pas eu pendant mes 5 premières runs) il est très difficile de bien avancer.
Mais selon les développeurs, tout est fait exprès, tout cela est voulu. Survive the Blackout s’inspire de classiques du genre post-apo et de la survie, allant de La Route de Cormac McCarthy à This War of Mine avec un brin de The Walking Dead pour le côté psyché et social de certaines rencontres. Mais surtout, Survive the Blackout se veut hardcore et désire mettre en avant le désespoir du monde dans lequel on se trouve. Et là dessus, mission accomplie. Que ce soit un enchaînement de mauvaises rencontres, le racket de notre loot juste après avoir fait une jolie razzia dans un magasin ou encore la mort d’un de nos personnages, les occasions sont nombreuses pour nous faire dire « bordel, j’y arriverai jamais à cette foutue Lumière ! » Et finalement c’est très bien ainsi. La destination importe peu, à mon sens. Ce sont les épreuves que l’on traverse qui définissent notre état d’esprit tout du long de notre run. On peut se manger les pires saloperies pendant plusieurs jours, parfois, au détour d’un simple sentier, nos personnages peuvent rencontrer des gens biens et vivre un événement qui augmentera enfin toutes leurs stats à pleine balle, nous permettant d’espérer un tout petit peu. Une espérance bien rare dans ce jeu, je l’ai dit, mais qui arrive parfois, et qui aide à continuer son chemin. Ce que pensent les personnages et ce qu’on pense nous-même est finalement bien lié et on se prend petit à petit d’affection pour eux, on s’identifie à eux. Cela rend les prises de décisions encore plus difficiles (je vous conseille d’ailleurs d’enlever dans les options le quick time event, une barre qui s’active lorsqu’on fait une rencontre peu amicale et qui laisse très peu de temps pour prendre une décision, pour vos premières runs) et leur impact très fort. La bande-son de Survive the Blackout, bien qu’épurée, aide à ressentir tout cela et accentue ce sentiment général de désespoir.
Survive the Blackout a été testé sur PC via une clé fournie par l’éditeur.
Malgré de nombreux petits bugs et imperfections, Survive the Blackout, dans son style, peut être considéré comme un jeu de bonne facture. Sa difficulté fermera la porte à beaucoup je pense, mais son atmosphère et l’implication que l’on ressent dans chaque décision suffisent à vouloir s’y accrocher encore et à nous pousser à essayer d’aller le plus loin possible. La volonté des développeurs de nous proposer une expérience ardue, nous poussant au désespoir, est une bonne chose, mais cela les bloque quelque peu lorsque certains membres de la communauté présents sur leur Discord leur demandent de revoir ne serait-ce qu’un peu l’équilibrage qui mériterait un peu de peaufinage pour que le jeu paraisse parfois moins injuste.
Metal Unit
Un rogue-lite-metroid-dead-cells-like-en-early-access ? En France ? En 2020 ? Est-ce bien sérieux ? Et pourtant, le défi est relevé par les coréens de JellySnow Studio, qui envoient leur bébé en early access pour les deux trimestres à venir (on connait tous le langage des early : ça peut vouloir dire quatre ou treize). Et surprise : c’est pas mal ! Mais encore un peu jeune.
Si Metal Unit a bien un scénario (qui n’est encore que partiellement accessible), on ne va pas tourner autour du pot bien longtemps : on est là pour taper sur des trucs en masse, qui ont beaucoup de PV, et tenter d’aller le plus loin possible avant de recommencer. On n’est pas là pour faire dans la finesse ou s’interroger sur le sexe des Anges, la formule rappelle immédiatement une sorte de Dead Cells passé à la moulinette de la SF asiatique des années 90, avec ses méchas, ses armures moulantes et ses insectes répugnants.
Jusqu’au dernier
Metal Unit ne se contente pas de décalquer une formule qui marche, et c’est tant mieux, parce qu’en l’état de son développement, il n’a ni le polish ni la fluidité d’un Dead Cells, d’un Risk of Rain ou même d’un Rogue Legacy. Les contrôles sont un peu raides, les combats un peu imprécis et les armes manquent encore beaucoup d’équilibrage.
Non, les deux atouts de Metal Unit qui ont le potentiel pour en faire un grand jeu sont ailleurs que dans ses éléments empruntés. D’une part, les tableaux ne se résolvent pas ici en traversant le niveau de part en part, mais en exterminant les ennemis jusqu’au dernier. En résulte une gestion de la santé de l’héroïne assez différente dans son approche, qui pousse à se creuser la tête pour arriver à tuer un maximum d’ennemis en encaissant un minimum de dégâts. Et c’est là qu’entre en jeu l’autre tour de force de Metal Unit : son immense catalogue d’armes à récupérer, à distance comme au corps à corps, régulières comme spéciales, qui poussent à l’inventivité et au gameplay émergent.
Cent Deux Missiles Fixes
Dans Metal Unit, vous devez en permanence apprendre à gérer votre râtelier d’armes pour vous adapter au type d’ennemis rencontrés. Et JellySnow fait plus que le nécessaire pour permettre à chaque joueur de trouver plusieurs styles adaptés à sa manière de dégommer les ennemis : missiles, scies, épées, glace, feu ou coups spéciaux, à vrai dire le nombre de commandes et d’attaques différentes à prendre en considération est presque trop important pour un jeu de ce type, forçant parfois à des manœuvres de type « saut+attaque+attaque spéciale+dash+attaque vers le bas » qui plombent parfois un peu la fluidité de l’action. Il m’est souvent arrivé de me demander si mon principal ennemi était ce gros asticot qui me crachait du mucus ou mon incapacité à appuyer sur quatre boutons en même temps.
De l’aveu même des développeurs, il reste encore beaucoup à faire pour apprécier pleinement l’expérience. Ce que nous pouvons déjà apprécier, c’est une direction artistique et musicale qui, sous des aspects de généricité relative, sert l’action à merveille, en restant à tout moment lisible et au service de l’action assez débridée du jeu. Et c’est tant mieux, car en l’état actuel du jeu, avec ses checkpoints placés bizarrement et ses morts dues à des armes encore mal équilibrées, vous allez parcourir les niveaux un certain nombre de fois d’affilée avant d’arriver au premier boss. Si ce joli emballage pop et brut arrive à accoucher d’une version complète courant 2020, je serais enchanté d’en découvrir le résultat final.
Metal Unit a été testé sur PC via une clé fournie par l’éditeur.
Je ne suis jamais certain de devoir vous recommander l’achat de jeux certes prometteurs, mais qui nous sont envoyés dans des stades de développement encore si précoces. De Metal Unit, je vois l’énorme potentiel qu’il peut proposer en termes de gameplay émergent et de rejouabilité, mais je vois aussi tous les défauts qu’il pourrait embarquer avec lui si les développeurs ne le rendent pas plus accessible et plus équilibré dans les mois qui viennent. La sortie définitive est annoncée avant l’été, ce qui me semble démesurément optimiste. Cependant, comme je ne suis pas un guide d’achat, je vous laisse vous débrouiller avec ça, moi de toute façon j’ai déjà ma clé du jeu qui me permettra de mesurer dans quelques mois les progrès accomplis.
Benjamin "Noodles"
Faire des jeux de mots c’est mon dada. J'aime bien tous les jeux aussi. Sauf les mauvais ou ceux qui nous prennent pour des glands.
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