Cette fois-ci dans Partie Rapide, Zali vous parle du portage Steam du jeu expérimental de création d’expériences ludiques Supermash et Veltar vous présente The Red Lantern, jeu de survie en traineau à chiens.
Supermash
Après une early access de quelques mois exclusive à l’Epic Games Store et une sortie complète sur Switch au printemps dernier, Supermash est désormais disponible sur Steam. Ce projet très ambitieux du petit studio Digital Continue promettait non moins que d’être un générateur de jeux et d’expériences ludiques, en donnant au joueur la possibilité de « fusionner » deux genres très différents et d’y injecter un certain nombre de variables pour créer des jeux à la volée. Qui n’a jamais rêvé de jouer à un shoot them up d’infiltration où on incarne Kirby qui se bat contre des avions Mario ? C’est plus ou moins ce que Supermash laisse entrevoir.
Autant le dire tout de suite, ce n’est pas franchement le genre de promesses qu’on fait à la légère, tant ce genre de proposition doit s’accompagner d’un système solide et bien rôdé qui doit donner l’illusion d’un tour de magie. Si tous les jeux générés se ressemblent, s’ils sont à peine jouables ou si le contenu est trop maigre pour faire illusion plus de quelques minutes, alors le pari est raté. Malheureusement, malgré un système amusant lors des premières tentatives, Supermash ne parvient pas à grand-chose.
Supermouais
Concrètement, Supermash se déroule dans une boutique de jeux vidéo dans laquelle le joueur est incité à faire des « mash » : mélanger deux genres de jeux et laisser une part d’aléatoire concernant le personnage principal et le gameplay du résultat obtenu. Seuls six genres de jeux sont disponibles (RPG, metroidvania, platformer, action-aventure, shmup et infiltration), mais les premiers essais laissent entrevoir de nombreuses possibilités : commander une sorte de Solid Snake s’infiltrant dans un jeu d’adresse ou encore générer un jeu d’aviation avec des combats au tour par tour. Quand le mélange fonctionne (générant des jeux durant entre 30 secondes et 10 minutes), c’est très sympa. Le problème, c’est que ça n’est quasiment jamais le cas.
Il est évident que même dans sa version définitive, Supermash manque d’une ossature narrative viable : la quête principale fonctionne mal, les objectifs peinent à être validés et le seul élément qu’il y a vraiment à débloquer consiste en des lots tirés d’une machine à gacha pour ajouter des personnages, pouvoirs ou éléments aux jeux générés. Loin d’être une bonne nouvelle, ces éléments supplémentaires rajoutent beaucoup d’incertitude et de chaos aux résultats des « mash ». Plus les possibilités se multiplient et plus les jeux s’avèrent systématiquement injouables. D’accord : un shoot them up au tour par tour, c’est très sympa sur le papier. Mais quand on pilote un avion incapable de tirer, ou qu’on se retrouve dans un jeu de plateforme où le personnage ne peut pas sauter, à quoi bon s’acharner ? À l’inverse, de nombreux « mash » donnent des résultats où le joueur s’avère invincible et le challenge inexistant.
Le principal problème de ce Supermash trop petit pour son concept, c’est que s’il met dans son moteur une grosse dose d’aléatoire (on met tous les éléments possibles dans un chapeau et on les tire un peu au pif), il n’y inclut aucune dose de procédural (réorganiser les éléments du chapeau pour garantir un résultat viable). Bien sûr, ce type de moteur ne se développe pas en un claquement de doigts, et c’était sans doute hors de portée de la petite équipe à l’origine du projet. Certains ont regretté qu’il n’y ait que six styles de jeux à mélanger, mais le résultat est déjà assez peu viable en l’état et en ajouter davantage aurait été la garantie de problèmes supplémentaires. Il aurait sans doute mieux valu viser plus petit et retirer toute dose d’aléatoire, pour se concentrer sur une quête principale nous forçant à jouer à des mash déjà préparés à l’avance, quitte à ajouter un mode bac à sable ensuite. En l’état, on ne peut pas recommander l’achat d’un générateur de jeux qui génère surtout des objets injouables et cassés, même si les rares tentatives réussies s’avèrent amusantes.
Supermash a été testé sur PC via une clé fournie par l’éditeur. Il est également disponible sur Switch, PS4 et One.
Excellent concept en théorie, Supermash rate hélas complètement son entreprise. La plupart des jeux générés sont à peine jouables, systématiquement déséquilibrés et très rapidement répétitifs. La quête principale n’a pas semblé fonctionner pendant nos différents essais pour la faire avancer, et les différents éléments débloqués au fil des « mash » n’ont fait que rendre moins jouables et moins amusants les résultats obtenus. Supermash se contente d’aléatoire là où il aurait fallu du procédural. En résulte un kamoulox indigeste d’expériences bizarres, davantage que l’impression d’avoir joué à un générateur de jeux viables.
The Red Lantern
En profitant des promos Epic durant les fêtes de fin d’année, j’ai pu mettre la main sur The Red Lantern. Pourquoi ce jeu ? Hé bien le titre de Timberline Studio, sorti sur PC, Switch et Xbox One le 22 octobre 2020 a deux arguments qui m’ont plu : des doggos gentils et des paysages doux et enneigés. Si on retrouve effectivement cela en jeu, on découvre aussi un gameplay à l’opposé de la “mignonitude” et quelques points frustrants.
Douceur apparente
L’aventure de The Red Lantern débute par une phase introductive assez courte. On y apprend très succinctement que notre personnage est une jeune femme qui a quitté la cosmopolite San Francisco pour réaliser un de ses rêves : faire de la course de traineau à chiens. Pour cela, elle doit d’abord rejoindre la maison de sa tante Margot, perdue au fin fond de l’Alaska. On se retrouve donc sur la route dans notre van, notre chien Chopper à nos côtés, avec pour premier objectif de choisir les fidèles alliés qui composeront l’attelage. Des passages rapides où le jeu nous propose un chien dont on devine facilement le caractère et la possibilité ou non de l’accepter. Parmi les huit chiens disponibles on ne pourra en garder que quatre, soit un total de cinq avec votre propre chien (promis, ceux que vous ne choisissez pas ne sont pas envoyés « dans une ferme »).
Une fois toute l’équipe réunie, exit le van et bonjour le traineau. L’environnement se dévoile : une DA épurée pour de vastes environnements enneigés. Cela donne d’ailleurs un côté presque « Firewatch à la montagne » dans les graphismes. Une idée renforcée à la fois par la vue à la première personne et le choix d’une voix connue pour le personnage principal, la talentueuse Ashly Burch (Chloé Price dans Life is Strange, Aloy dans Horizon Zero Dawn). L’ambiance est donc au rendez-vous, et les changements jour/nuit permettront d’apprécier de manière différente les paysages à proximité comme ceux situés à l’horizon.
Toutefois, vous n’aurez pas l’occasion de vous lancer selon vos envies à travers ces terres de liberté. Votre avancée en Alaska se fera donc sur des chemins tracés avec assez régulièrement la possibilité de prendre à gauche ou à droite, et la présence d’événements aléatoires. Cet aspect rogue-lite se traduit aussi par une gestion d’équipements permettant la survie non seulement de l’héroïne mais aussi des chiens. Cela impliquera notamment récolte d’objets, rencontre d’animaux et chasse de certains d’entre eux. Un mélange des genres qui a le mérite de créer un jeu original.
Alaskaléatoire
S’agissant des différents événements aléatoires, ceux-ci rompent avec l’avancée plutôt linéaire du traineau (on peut parfaitement choisir de ne pas le contrôler, il avance tout seul). Ils se répètent pourtant vite et les commentaires de l’héroïne qui y sont liés ne changent pas non plus. Ces séquences narratives permettent toutefois de compléter un journal de découvertes et/ou d’obtenir des ressources (balles, nourriture, kit de secours, objets). Au fur et à mesure des « runs », l’équipement de départ est augmenté, facilitant notre voyage. Cela rend le parcours plus confortable et rend moins punitif le choix d’épargner ou non certains animaux, choix qui peut s’avérer nécessaire pour valider des entrées du journal.
En plus de vite retrouver les mêmes événements, la narration qui les accompagne demeure un peu trop pauvre. C’est quand même dommage d’engager une doubleuse célèbre pour aussi peu s’en servir. Au lieu de ça, on a souvent des monologues peu développés et des remarques plates. Si le journal rappelle celui de Life is Strange, il n’en a pas la portée narrative. Il sert surtout à suivre la complétion des objectifs qui y sont inscrits. D’ailleurs, ces derniers ne motivent pas plus que ça à relancer l’aventure une fois celle-ci terminée. Je dois avouer une grosse déception sur le point précis que constitue l’intrigue. Elle laissait un champ assez vaste pour une vraie introspection, des réflexions sur la survie en milieu hostile, le besoin de tuer des animaux, le changement climatique, etc. On doit se contenter de quelques remarques sur l’envie de suivre ses « rêves ». Le tout uniquement en anglais, pas de sous-titres français à l’horizon.
Pour terminer, je reviens rapidement sur la survie : il ne faudra pas seulement gérer la sienne mais, comme je le précisais plus haut, gérer aussi celle de nos chiens. Les petites phases de « pause » offrent la possibilité de se restaurer et de les nourrir, histoire d’être prêts pour les dangers à venir, car certaines rencontres pourront être périlleuses. Un affrontement avec un loup ou un ours, c’est le risque d’une blessure pour vous ou pour un de vos canidés. Dans ce dernier cas, grattouilles et morceaux de viande ne suffiront pas. Il faudra utiliser un kit de secours sans quoi la barre de fatigue des chiens sera réduite de moitié. Afin de palier à cette difficulté, les développeurs ont ajouté un mode « dogs always live ». Et de toute façon, au-delà du problème que cela pose pour arriver à la fin du trajet, c’est aussi un petit moment d’inquiétude pour celui de nos compagnons qui se retrouve blessé.
The Red Lantern atteint à peine le statut de jeu correct : ses bonnes idées sont plombées par un manque d’ambition scénaristique et un gameplay limité. Les éléments de rogue-lite paraissent forcés, au point qu’ils prennent le dessus sur le reste sans pour autant être eux-mêmes bien maitrisés. Au final, on en vient à regretter l’aspect doux et mignon du titre. Car la direction artistique et le contexte de solitude dans les paysages d’Alaska auraient pu permettre de suivre une direction résolument plus axée sur la narration. Ha et j’allais oublier : oui, on peut « pet the dog ».
zalifalcam
J'aime les jeux double A, les walking simulateurs prétentieux et les JRPG, et plutôt que de me soigner, j'écris à leur propos.
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