Cette fois-ci dans Partie Rapide, beaucoup de rose avec Zali qui nous parle du puzzle game Princess Farmer et ses lapines magiques et Seastrom qui se promène dans les contrées pailletées et bizarres de Catie in MeowmeowLand.
Princess Farmer
Petit projet de deux développeuses canadiennes réunies sous le nom de Samobee Games, Princess Farmer propose un mélange pour le moins inhabituel de puzzle match-3, de visual novel, de romance, d’histoire de magical girl et de relooking de furries. Ne fuyez pas tout de suite, c’est vraiment pas mal du tout.
Tout le monde se lièvre
Princess Farmer vous place dans un monde assez cauchemardesque, sauf si vous adorez les furry de femme-lapin évoluant dans un monde de paillettes dans lequel tous les bruitages semblent avoir été engendrés par un bandit manchot dans un casino décati. Pour tout dire, le premier contact visuel avec le jeu est assez spécial, avec ses lapins manga rondouillards aux yeux gigantesques, aux sourires béats et aux couleurs saturées… Et puis au bout de quelques minutes, on s’y fait : Princess Farmer dégage une ambiance bien à lui, mais qui fonctionne pas mal, en partie grâce au superbe pixel art du jeu et à la sincérité de l’ensemble.
On y incarne une ramasseuse de carottes qui, visitée par une entité divine, va se retrouver dotée du pouvoir de la Princesse Fermière. Devenue une magical-lapine-girl, notre héroïne va arpenter la contrée, aider des gens à ramasser des légumes ou à arracher des mauvaises herbes… Et peut-être découvrir un terrible complot à base de méchant lapin mystérieux faisant pousser des trucs à des endroits inappropriés.
Pour moitié composé d’un Visual Novel découpé en épisodes introduisant chacun quelques pans de l’intrigue et quelques personnages, Princess Farmer se démarque par un scénario certes extrêmement basique et franchement naïf, mais qui fonctionne vraiment bien. Les séquences narratives s’enchaînent de manière rapide et fluide, le casting est plutôt attachant, et on comprend assez vite que la plupart des choix de dialogue n’ont qu’une importance marginale sur la joyeuse bonne humeur qui se dégage de l’aventure… Et à vous donner accès à une boutique de produits cosmétiques pour relooker la protagoniste, bien sûr. Mais elles sont surtout le prétexte à introduire les phases de puzzle qui composent l’essentiel du gameplay du titre.
Lapin compris
Difficile de dire autre chose de Princess Farmer que : c’est un match-3. Voilà. Sans originalité particulière, ni twist spécialement surprenant : vous allez devoir aligner des séries de 3, 4 ou davantage de légumes identiques dans des grilles pour les récolter. Parfois, il faudra casser des cailloux. Parfois, récolter un type de légume en particulier. Parfois faire du score, parfois résoudre une situation en un maximum de coups. Mais formellement, Princess Farmer ne vous propose strictement rien d’original. Est-ce grave ? Pas vraiment.
D’une part, parce que la promesse du jeu implique une prise en main extrêmement simple et rapide, et pour le coup, l’engagement est tenu : en quelques secondes, on a compris tout ce qu’il y avait à comprendre. Ensuite, parce que chacun des épisodes du jeu vous propose assez de variété et de situations différentes pour être joué sans ennui. Enfin, parce que Princess Farmer a la bonne idée de permettre de rejouer chaque chapitre en modifiant le style de grilles : davantage axé sur les combos, privilégiant la réflexion, en version coop, etc. Un jeu varié, à la rejouabilité appréciable, donc.
On saluera aussi les gros efforts réalisés par Samobee en matière d’accessibilité : éléments à aligner pas uniquement basés sur les couleurs, légumes bonus surlignés avec un fort contraste, possibilité de désactiver certains effets visuels, etc. Tout a été fait pour que vous puissiez parcourir l’ensemble des puzzles du jeu (comptez 5 à 10 heures pour le faire à fond) de la manière la plus adaptée possible à vos envies.
Princess Farmer a été testé sur PC via une clé fournie par l’éditeur.
Princess Farmer est un jeu qui ne révolutionne absolument rien : il se contente de parfaitement mener à bien ses quelques idées. Un scénario simple et naïf, quelques personnages colorés, des puzzles ultra-lisibles et une rejouabilité bien pensée. Parfois, on a pas besoin de davantage pour apprécier un moment passé devant son écran.
Catie in MeowmeowLand
D’une humeur aventureuse, on a mis de côté notre aversion pour le point’n’click (n’en déplaise à Murray), séduit par la proposition du studio slovaque ARTillery : Catie in MeowmeowLand, relecture d’Alice au pays des merveilles mais avec plus de chats, difficile de refuser l’invitation. Ça été l’occasion d’apprécier tout le classicisme du titre, l’humour qu’il déploie et sa galerie de personnages loufoques, mais aussi ses ponctuels archaïsmes de mécanismes comme de représentations.
Rire et chat-iments
Alors qu’elle joue dans sa chambre, Catie est attirée dehors par les miaulements affolés d’un chat endimanché, lequel se rue dans un trou au pied d’un arbre. Ni une ni deux, la petite fille plonge à sa poursuite et, après une longue chute, atterrit sur le sol d’un monde au ciel rose après être sortie de l’anus d’un chat. Qui pète lorsqu’on clique dessus. Et devant elle, il y a un bonhomme enclume pas commode. Avec toute la candeur qui caractérise les enfants (ou alors grâce à un self control impressionnant), Catie se satisfait de ce surprenant environnement et se lance à la poursuite de ce chat pressé.
Ainsi vont se succéder les 24 tableaux de ce point’n’click linéaire, au long d’une marche en avant continue, qu’elle se fasse à pied, à dos d’escargot ou de chat botté (à fusées, les bottes), ou à coup de canon. Mais pour avancer, il faut débloquer les situations qui barrent la route de la jeune héroïne. Chaque tableau nécessite ainsi de déclencher des interactions données dans un ordre plus ou moins précis, tel objet faisant réagir tel bonhomme dont la réaction rendra accessible un nouvel objet etc. Une poignée de puzzles à proprement parler sont bien présents, jamais très compliqués (ni très innovants), on n’a (dieu merci) pas d’inventaire à gérer, mais le rythme général de la progression est mené par ces suites de petites actions, comme une scène qui n’attendrait que de se dérouler. Ce qui conviendra très bien aux débutants et débutantes du genre, même si on n’aurait pas craché sur une option permettant d’afficher toutes les interactions possibles, quand les confirmés devront s’en tenir à ses saillies humoristiques et à une structure très classique, si ce n’est quelque peu désuète. Cette dimension spectatorielle d’un petit théâtre en train de se jouer, l’équipe d’ARTillery l’assume parfaitement et revendique d’ailleurs sa parenté avec les productions du studio tchèque Amanita Design.
Dans la lignée de Samorost ou plus encore de Chuchel et son personnage principal colérique, Catie in MeowmeowLand vise avant tout le plaisir de l’interaction, donnant toujours à réagir des éléments non-essentiels à la résolution des tableaux. Les scènes se suivent et se ressemblent un peu, mais toujours mues par la recherche du petit élément qui fera rire, basé sur l’inattendu permis par son univers absurde, une mise en scène inventive dans la surprise comme la contemplation, ou la réapparition d’un casting auquel on a vite fait de s’attacher. En particulier les personnages en colère ou mécontents, nombreux et qui n’hésitent pas à râler haut et fort à coups de borborygmes universels (pensez Pingu ou La Linea). Le bruitage occupe d’ailleurs une place importante dans la tenue de ce monde coloré, du pet originel aux miaous déclinés sous toutes les clés. Cela n’empêche pas certaines scènes de souffrir d’une ambiance un peu austère, ponctuée des apostrophes quelques fois trop régulières de Catie à notre intention.
Visuellement grotesque et surréaliste, la direction artistique charme et perturbe à la fois, comme la diversité des situations et de son casting, parfois emprunts d’une sorte de cruauté rigolote. Au-delà d’Amanita Design, le titre se place par extension dans la lignée d’une tradition d’animation d’Europe de l’Est largement étendue au cinéma, laquelle n’hésite pas à dépeindre des univers glauques, déclinée ici dans son pendant comique. Certains noms viennent ainsi à l’esprit, auxquels sont parfois fait référence par l’intermédiaire, notamment, de personnages : l’incontournable Jan Švankmajer, d’abord, lui qui a également adapté le livre de Lewis Carroll en mélangeant prises de vues réelles et stop motion (c’est superbe et effrayant), Youri Norstein aussi, dont Le Hérisson dans le brouillard fait une petite apparition, ou encore, plus éloigné mais reconnaissable à 100m, l’un des chats-phares de Miyazaki. Dans ce foisonnement d’étrangetés et de chats aux yeux globuleux, un ou deux choix de représentations interrogent toutefois, de par un certain décalage culturel, dirons-nous avec précaution, qui ancre plus que souhaité le jeu dans un passé qu’on aimerait révolu. Aujourd’hui, assimiler un personnage associé à la culture chinoise à des moustaches fines et tombantes et à un chapeau conique, ce n’est plus vraiment de bon ton.
Catie in MeowmeowLand a été testé sur PC via une clé fournie par l’éditeur. Il est également disponible sur PlayStation, Xbox et Switch.
Si vous aimez les miaulements bruités à la bouche et l’humour à la fois bête et naïf, Catie in MeowmeowLand devrait vous ravir pendant les deux ou trois heures que dure son aventure. Moins porté sur les puzzles que sur sa suite de scénettes rigolotes, il s’inscrit dans un héritage bien fourni avec un certain classicisme, ainsi à rebours de son univers loufoque et de son époque, mais arrive toutefois à créer de sympathiques moments, par son humour et sa mélancolie, qu’on aurait aimé voir développée.
zalifalcam
J'aime les jeux double A, les walking simulateurs prétentieux et les JRPG, et plutôt que de me soigner, j'écris à leur propos.
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