Cette fois-ci dans Partie Rapide, Shift vous parle d’OkunoKA Madness, une ressortie améliorée d’un platformer un peu trop hardcore et imprécis pour son propre bien, et JoK ne vous parlera pas du non-jeu There Is No Game.
OkunoKA Madness
OkunoKA, c’était ce platformer italien hardcore sorti sur Switch en 2018 dans une indifférence assez dramatique. Il ressort cette année dans une édition enrichie sous-titrée Madness, pour un résultat que je qualifierai d’encore pire qu’avant. Belle performance. La ressortie Madness ajoute quelques merdouilles à la sauce, sans franchement prendre le temps de s’attaquer au cœur du problème : le jeu de base n’est pas terrible du tout et Madness le reprend tel quel. Ainsi, avant même de m’intéresser aux ajouts de cette nouvelle version, j’avais déjà beaucoup trop de raisons de détester OkunoKA Madness.
Des claques pour les calques
Si vous avez visionné la bande-annonce, je vais à peine avoir à expliciter mon premier grief : OkunoKA est un shitty Super Meat Boy, puisque c’est la tendance de l’été : faire des photocopies ratées de jeux indés à succès – pas la meilleure mode si vous voulez mon avis, mais c’est à l’image de cette année. Le principal souci, c’est que ce genre de décalques ne comprennent généralement pas pourquoi leur modèle fonctionne – à l’instar de tant de Souls-Like – et s’arrêtent aux apparences. « Super Meat Boy c’est dur et ça glisse, je vais donc faire un jeu dur et qui glisse ». Sauf que vous vous en doutez, c’est légèrement plus compliqué que ça, tout comme faire un Souls-Like ne consiste pas uniquement à faire un jeu labyrinthique parcouru par un bloc de parpaing. Ce que des titres comme OkunoKA semblent n’avoir pas compris, c’est que la physique savonneuse de Meat Boy ne fonctionne qu’avec Meat Boy, c’est – à mon sens – un petit miracle que celui-ci soit aussi jouable et maniable et ça repose en très grande partie sur le moteur maison de McMillen calibré avec minutie – et probablement un peu de chance. Reproduire cet effet de glissement dans un jeu de plateforme me semble suicidaire tant il nécessite une maîtrise parfaite de sa physique – ce que même McMillen ne reproduira pas avec The End is Nigh.
OkunoKA glisse, donc, beaucoup trop pour son propre bien et pour la précision générale de ses contrôles, et surtout pour le reste de son gameplay et level design. Toujours dans cette optique de recopie de SMB – nous passerons sur l’absence de race qui va jusqu’à repomper le découpage, les vortex qui ouvrent des niveaux cachés, les collectibles qui débloquent des personnages et le nouveau mode Madness, honteuse resucée des Dark Worlds de son modèle -, le titre de Caracal Games est difficile, mais encore une fois, sans avoir trop compris comment la difficulté de Meat Boy était gérée. Ce dernier n’est certes pas exempt de reproches, loin de là, certains pièges de fin de niveau peuvent être vraiment punitifs et toutes ses mécaniques ne sont pas parfaites – ces saletés d’orbes là – mais il repose tout de même sur un level design ingénieux, une courbe de difficulté progressive et des pièges et obstacles généralement justes et anticipables.
Du caca kaki collé OkunoKA
OkunoKA, quant à lui, aime non seulement nous balancer assez tôt dans des niveaux un peu trop longs, mais surtout nous coller des pièges hors écran et autres joyeusetés injustes, sur lesquelles il faudra mourir au moins une fois pour connaître leur existence. Un aspect qui fait passer le titre de dur à méchant, et qui m’a fait rage quit bien plus de niveaux que dans n’importe quelle production de McMillen ou EXOK Games. Une difficulté mal fichue, et parasitée par tout un tas d’autres saletés, comme cette mécanique qui fait apparaître et disparaître certaines plateformes, parfaitement ingérable quand on veut aller vite – un poil dommage pour un titre incitant au speedrun – et qui au mieux flingue le rythme, au pire rend les niveaux injouables à cause de son mapping absurde. Niveaux aux décors régulièrement surchargés d’ailleurs, dans lesquels nombre d’obstacles, pièges, ennemis ou plateformes deviennent compliqués à distinguer – et à la DA pas toujours de très bon goût, mention spéciale à ce Monde 3 sur une autre planète aux couleurs, disons, audacieuses.
Voici qui est salé, j’en ai bien conscience, et j’ai toujours un sentiment de culpabilité quand il s’agit de défoncer un jeu indé. Mais être un petit studio n’excuse pas tout, et avec sa physique foireuse, sa difficulté malveillante et sans bonnes idées, son statut autoproclamé de jeu hardcore, sa recopie éhontée, OkunoKA Madness m’a mis en colère. D’autant que les ajouts de la version Madness, en plus de ne jamais corriger le moindre problème du jeu de base, sont au mieux anecdotiques, au pire vraiment nazes. Anecdotique, comme ce mode Time Attack, qui permet de speedrunner un monde d’une traite – au cas où vous auriez très envie de refaire les mêmes niveaux nuls. Naze, comme ce mode Madness, qui propose une batterie de niveaux encore plus difficiles et injustes, ou comme cette sortie PC avec moins du minimum syndical côté paramétrages, ce qui m’a valu un petit voyage dans les options du pilote de ma carte graphique, histoire que le jeu cesse de vouloir sa mort en tournant à 1500 images par seconde.
OkunoKA Madness a été testé sur PC via une clé fournie par l’éditeur. Il est également disponible sur PS4, Xbox One et Nintendo Switch.
Je n’attendais rien, et je suis quand même déçu. Tout le monde le sait, cette phrase n’est pas de moi, mais si Caracal Games peut le faire comme ça devant tout le monde, je ne vois pas pourquoi je me gênerais. OkunoKA Madness est une version pimpée d’un jeu qui aurait dû rester dans les limbes où le monde l’avait oublié, sur plus de plateformes et avec de nouvelles mauvaises idées, sans avoir pris la peine de corriger ce qui ne fonctionnait pas dans la version de base. Avec une physique mieux rodée, une difficulté moins malveillante, un mapping moins absurde et une version PC avec le minimum attendu en termes de réglages, OkunoKA Madness aurait pu être un clone de SMB acceptable pour les junkies en manque de platformers hardcores en attendant SMB Forever. En l’état, je ne le recommanderais même pas à cette frange de la population.
There Is No Game
There Is No Game a tout du jeu qui aurait pu ne pas sortir : un jeu issu d’une game jam avec un succès d’estime (avec une première place, et une carotte en plastique, lors de la game jam en question : la construct deception jam 2015) qui devient une campagne de crowdfunding qui n’atteint pas son objectif. En général, ce n’est pas un bon présage pour l’avenir commercial d’un jeu indépendant. Mais le créateur (KaMiZoTo) a persévéré en fondant son studio Draw Me A Pixel pour nous livrer une version finale de son jeu. L’idée est simple : il n’y a pas de jeu, et le non-jeu fera tout pour vous décourager de jouer à ce qui n’est pas un jeu.
Et cette version finale m’a beaucoup plu. Mais je n’ai pas trouvé comment en parler. Je l’ai pourtant fini en quelques heures une fois le code entré dans Steam, et je dois dire que je me suis beaucoup amusé à découvrir les diverses situations que KaMiZoTo a choisi de nous faire vivre, mais je ne trouvais pas les mots pour vous en faire une critique. Alors j’ai écrit plusieurs versions, changé d’angle à plusieurs reprises, tenté des choses un peu nouvelles, retiré mes blagues habituelles mais ça ne marchait pas. J’ai eu peur de vous spoiler en dévoilant ce que vous pourriez trouver dans ce jeu à la narration de qualité. J’ai craint d’être redondant en réutilisant certaines blagues du jeu pour les intégrer dans ma critique. J’ai hésité à vous noyer sous un tas de références et de liens pour que vous alliez voir des critiques d’autres jeux sur The Pixel Post puisque celle-ci ne devait pas exister.
Maintenant que vous êtes là, est-ce que cette critique existe ? Voulez-vous vraiment en savoir plus sur ce jeu ?
Alors si je dois en dire plus, commençons par décrire ce non-jeu. Un point & click très simple dans son approche avec une succession de tableaux reprenant de nombreuses références du jeu vidéo, naviguant entre les genres, les époques, les pays et les supports, mais qui va également piocher dans d’autres médias pour nourrir son histoire et son univers. Mélange d’humour absurde et de comique de situation, il arrive à varier les gags et à surprendre jusqu’à la fin tout en vous forçant à penser comment détourner les codes du jeu vidéo pour arriver à vos fins. Vous voyagerez accompagné des éléments qui façonnent un jeu, un narrateur mystérieux dont vous en apprendrez plus au fil de votre aventure et quelques personnages qui lui sont proches, à la poursuite d’un ennemi étrange qui s’appelle monsieur Glitch, dans un univers qui détruit le 4e mur à grands coups de masse dès les 4 premières secondes de votre expérience. Parce que oui, c’est principalement ça que vous rencontrerez, un jeu qui sait utiliser la narration et se jouer du joueur dans un délire qui pousse très loin la confusion entre joueur, héros, jeu, créateur et autres éléments d’interaction, vous faisant passer dans l’envers du décor d’une scène de jeu par l’envers du décor d’une télévision ou vous poussant à détruire l’interface pour mieux l’utiliser dans le tableau que vous devez résoudre. Pour en profiter il vous faudra tout d’abord déjouer le menu principal qui souhaite que vous quittiez le jeu dès votre arrivée, des premières scènes qui font tout pour vous décourager de poursuivre et ce fameux narrateur qui vous enjoint continuellement à le laisser tranquille et à ne pas essayer de jouer, puisqu’il n’y a pas de jeu. Si j’osais la comparaison, je dirais qu’il y a du Quentin Dupieux dans ce jeu tant KaMiZoTo s’amuse avec les frontières du média avec une volonté de rester concis dans un format assez long pour exprimer ses idées mais pas trop long pour ne pas risquer de lasser ou de se répéter. Et c’est d’ailleurs pour ça qu’en parler ne sert à rien, allez y jouer, ça ira plus vite (et venez m’en reparler après).
There Is No Game a été testé sur PC via une clé fournie par l’éditeur.
There Is No Game est à la fois simple à jouer et difficile à décrire sans trop en dévoiler, pour lever le voile sur ce qui fait ses qualités, je vous recommande donc d’aller y jouer, là, maintenant. Si vous aimez être surpris et qu’une histoire simple soit racontée avec humour (et également les point & click, sinon ça va être compliqué), alors foncez, ce jeu est fait pour vous.
Shift
Camélidé croisé touche de clavier et militant pro-MS Paint. J'aime les jeux indés à gros pixels, les platformers sadiques et les énigmes.
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