Cette fois-ci dans Partie Rapide, BatVador embarque à bord du très réussi Monorail Stories et Zali revient sur l'accès anticipé du tower defense original Timemelters.
Monorail Stories
Dernier jeu du petit studio suisse Stelex Software, déjà titulaire d’une récompense au SGDA Swiss Game Awards dans la catégorie « Serious Games » pour son précédent jeu Castello Visconteo, Monorail Stories est d’ores et déjà en lice dans la catégorie « Entertainment » de 2022. Avec son esthétique rétro à base de pixel art soigné et d’une vue en side-scrolling, accompagnée d’un gameplay narratif, Monorail Stories est bien plus riche et bien moins linéaire qu’il n’y paraît.
En voiture tout le monde !
Silvie et Ahmal vivent dans les villes de M et L et commutent chaque jour vers leur lieu de travail. Ils ne se connaissent pas, ne prennent pas le monorail aux mêmes heures, ni dans la même direction. Ils rencontrent parfois les mêmes personnes et leurs actions vont influencer le déroulement de leur journée à tous les deux. Sur une semaine, en incarnant tour à tour chaque personnage, il va falloir décider de régler ou non les problèmes des uns et des autres et parler avec les autres passagers. Le gameplay est simple : les flèches permettent de se déplacer à droite et à gauche et la touche entrée d’interagir avec les personnes et objets et de faire défiler les dialogues. Le point central, ce sont les choix. Les personnes que l’on aborde et la façon dont on choisit de réagir vont avoir un réel impact sur la suite du jeu. Garder ou non une écharpe perdue, commenter ou se taire devant une situation qui risque de mal tourner, tout cela va déterminer ce que l’on pourra faire par la suite. Dès qu’on creuse un peu, on découvre une myriade de possibilités différentes et d’embranchements dans les relations entre les personnages.
Ainsi, en dehors des trois fins les plus évidentes, je suis tombée lors de ma troisième partie sur une possibilité que je n’avais même pas envisagée, et d’autres se sont esquissées au hasard des choix. Dans un cas de figure, il est par exemple possible de sympathiser avec la jeune femme geek qui parle en équations, dans un autre de se faire une nouvelle amie et dans un autre encore probablement de percer le mystère de la dame au(x) chat(s), mais celui-là, je n’ai pas encore trouvé comment faire. Chaque nouvelle partie débloque des nouveaux passagers du monorail, qui rajoutent un peu de vie dans la rame. Le contexte sociopolitique de la région est distillé dans certaines interactions, mais surtout par les journaux qui traînent sur les sièges. Classique, mais efficace.
Terminus, tout le monde descend… ou pas
Il est difficile d’en dire beaucoup plus sans spoiler les différentes intrigues et la fin de l’histoire, je n’en dirais donc pas plus de peur de gâcher le plaisir de la découverte. Chaque partie dure environ une heure (parfois un peu plus, parfois un peu moins, selon les choix et les fins débloquées), ce qui incite à relancer le jeu pour découvrir autre chose. Pour changer un peu la dynamique, un mode multijoueur est aussi disponible. Il propose à chaque joueur d’incarner l’un des personnages et de prendre les décisions pour lui avant d’arriver à une conclusion commune. Pour les vagues points négatifs, on notera que bien que tout le jeu soit doublé en anglais avec des acteurs convaincants et que la version française soit correcte, on déplore quelques grosses fautes qui auraient pu être corrigées avec une bonne relecture et quelques termes qui trahissent une maîtrise du français pas toujours au point (la traduction de « shady » par « suspicieux » au lieu de « louche » est probablement le meilleur exemple). Ceci étant dit, je n’ai relevé aucun contresens et les sous-titres permettent de profiter du jeu, c’est simplement dommage vu la qualité de l’ensemble que ce point ait un peu été mis de côté (comme souvent). Le manque de contraste entre les options sélectionnées et les autres rend parfois un peu difficile de voir ce qu’on fait en termes de choix. Comme mentionné plus haut, ce sont des défauts minimes qui n’entachent pas du tout le plaisir d’explorer le monorail.
Monorail Stories a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur.
Autant par son esthétique rétro qui fait penser aux plateformers sur consoles et son mécanisme narratif simple et intuitif, que par ses intrigues basées sur la vie quotidienne de passagers d’un transport en commun, Monorails Stories mise sur une formule classique qui dissimule une grande richesse narrative et une grande rejouabilité qui vaut la peine de prendre le temps de découvrir.
Timemelters
C'est au minuscule studio québécois Autoexec (trois personnes en tout et pour tout) que l'on doit Timemelters, un jeu de stratégie plutôt malin qui entame actuellement son accès anticipé. Un savant mélange entre tir à la troisième personne, tower defense et puzzle game qui fonctionne à merveille, si on omet une réalisation encore un peu en retrait.
Yes, Wicca
Dans une contrée reculée assaillie par les forces des ténèbres, vous avez été malheureusement condamnée au bûcher comme sorcière par des villageois haineux. Secourue à la dernière minute par le fantôme d'une magicienne, vous voici investie du pouvoir de plier le temps et les éléments à votre volonté. Vous décidez d'aller aider ces ingrats d'humains qui vous ont condamnée au bûcher parce qu'au fond, la horde de démons assoiffés de chair fraîche qui déboule sur le pays aide à mettre ses différends de côté. Bienvenue dans Timemelters, avec son scénario assez prétexte, mais plutôt efficace dans sa manière de dérouler un sentiment d'urgence. Pas le temps de niaiser, les démons attaquent, et il va falloir utiliser tous les moyens à disposition pour les repousser.
Le jeu se déroule sur une vingtaine de maps peu ou prou présentées de la même manière : vous devez soit atteindre un point précis sans vous faire bouffer par un gobelin de passage, soit défendre une zone et empêcher les ennemis d'y déferler. Le tout en utilisant une combinaison de pouvoirs modifiant le terrain ainsi que la capacité de riposter par des projectiles directs façon jeu de tir à la troisième personne. Si cela vous rappelle le vénérable Sang-Froid - Tales of Werewolves c'est bien normal, Timemelters partage le même réalisateur et la même idée de changer en profondeur les mécaniques classiques du tower defense. Mais mélanger stratégie et TPS, des séries comme Orcs Must Die le font depuis longtemps. Le point d'originalité de ce titre se situe plutôt dans son habileté à nous faire, je vous le donne en mille, manipuler et fusionner le temps.
C'est le temps qui coule, qui nous rend sérieux
Timemelters a l'intelligence de vous donner dès son tutoriel un aperçu de ce que vous pourrez faire plus tard dans le jeu : certes, vous pouvez invoquer des esprits ou activer des éléments du décor pour repousser les démons. Mais vous aurez surtout à votre disposition des capacités pour manipuler le temps, par exemple en activant une sorte de téléporteur permettant de vous transporter instantanément à un checkpoint si vous mourez. Ou encore la possibilité de remonter votre propre ligne temporelle, plusieurs fois d'affilée, pour combattre à côté de fantômes de vous-même. Une fonctionnalité d'autant plus amusante que le jeu peut être joué en coop, permettant de peupler le terrain d'une marée de clones de votre personnage et de celui de votre comparse pour décimer les ennemis.
Très vite, la campagne principale met à profit toutes les possibilités offertes par cette manipulation du temps, et vous pousse à vous creuser la tête pour bidouiller des situations impossibles et les retourner à votre avantage. Impossible de survivre à une marée de démons qui déboule vers une porte indéfendable ? Pas grave, vous pourrez mettre vos points de mana à profit pour créer des fantômes de vous-même, balançant de plus en plus de projectiles à mesure que vous rembobinez le temps. Plus on avance dans le jeu et plus on en vient à réaliser la grande ingéniosité des développeurs pour nous faire penser en "quatre dimensions" le temps d'une campagne qui vous occupera six à huit heures. Une durée de vie à laquelle il faut ajouter celle d'un mode défi, beaucoup plus ardu, et poussant encore plus loin le concept.
Bien sûr, tout n'est pas (encore) parfait au royaume de Timemelters. Le jeu est un poil terne, l'optimisation graphique est encore un peu bancale, le framerate un peu inconstant quand il y a trop d'éléments à l'écran... Mais rien de bien grave, l'essentiel de la structure du jeu étant déjà en place. Et surtout, rien d'inexcusable pour un jeu en accès anticipé qui devrait livrer sa version définitive dans quelques mois.
Timemelters a été testé sur PC via une clé founrie par l'éditeur.
Timemelters, c'est tout ce qu'on aime dans un jeu en accès anticipé : un concept simple mais efficace, déjà beaucoup de contenu pour s'amuser, et l'impression de n'avoir pas vraiment joué à quelque chose de similaire avant. Puzzle game inventif doublé d'un tower defense plus que solide, il s'agit d'une des plus belles surprises de cette fin d'année 2022 du côté des studios indés.
BatVador
Traductrice ascendante topiaire qui aime les city builders, les dystopies et les jeux avec des gens déprimés dedans.
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