EA FC 25 est sorti le 27 septembre, et son arrivée sur consoles et PC va s’accompagner une nouvelle fois d’une danse que l’on connaît déjà toutes et tous. Le titre va rester plusieurs mois dans le top des ventes dans de nombreux pays, tandis que ses utilisateurs vont se plaindre (très souvent à raison) d’un jeu cassé qui ne semble les considérer que comme des vaches à lait.
Au-delà de ce paradoxe, EA FC (ex-FIFA) est un jeu qui, par le mépris sans conséquence avec lequel il traite sa communauté, s’avère pernicieux à différents degrés pour ses joueurs et joueuses. Ne nous méprenons pas, la communauté EA FC n’a rien à envier à celle des jeux Riot en termes de nocivité. Et si je prends la peine d’utiliser un terme masculin et féminin pour parler de ses utilisateurs, il n’y a aucune surprise quant au fait que l’attitude problématique de cette communauté est l’écho d’une masculinité toxique, omniprésente dans les domaines footballistiques et vidéoludiques dont EA FC est le point de convergence.
L'insouciance
J’ai toujours aimé les jeux de foot. D’abord en solo avec Super Kick-Off sur Master System, FIFA 95 sur Megadrive ou Sega Worldwide Soccer sur Saturn. La première bascule notable se fait en l’an 2000. J’ai 14 ans et je viens de récupérer un CD gravé d'ISS Pro Evolution Soccer qui tourne à merveille sur ma PlayStation 1 pucée. Le temps que j’y perds est honteux. Mais pour la première fois, je joue avec des amis, en présentiel. Deux manettes, une télé, et c'est parti pour 6 minutes (90 dans le jeu) en coopération contre l'IA ou l'un contre l'autre. Durant les vacances, les matchs sur console font suite à ceux sur un vrai terrain, une fois que nos jambes ne nous portent plus. Le temps passe, ISS devient PES, la PlayStation 1 laisse la place à la PS2, les graphismes s’améliorent et le gameplay, tel Marat, s'affine. Le plaisir reste le même et les souvenirs qu’il engendre s’inscrivent profondément dans ma mémoire.
Nouveau saut temporel, les études nous séparent, et pour ma part m'isolent. Paradoxalement, alors que le jeu en ligne se popularise, c’est en solo que je continue mon aventure avec les jeux de foot. PES 6 et ses patch classiques sur PC, PES 8 sur PS3, les chiffres changent, les supports aussi, mais les heures passées manette en main restent les mêmes. Cela ne me dérange pas de rester sur le même jeu pendant 3 ou 4 ans, je n’ai ni l’envie, ni les moyens d’acheter un nouveau jeu chaque année, et pour les versions PC, la communauté PES propose souvent d’excellents patchs accessibles gratuitement, permettant de mettre à jour les équipes en quelques clics.
Les années passent, une nouvelle fois, et je rejoins Twitter. J’y rencontre de nouvelles personnes dont certaines partagent mon attrait pour les jeux de foot. Entre-temps FIFA a repris du poil de la bête et semble avoir dépassé la licence de Konami en qualité et en popularité. 70 euros le jeu, auxquels s'ajoute le même montant pour pouvoir jouer en ligne avec le système PS+, c’est un budget, mais pour le nombre d'heures que je me sais capable de mettre dans le jeu, ce n’est pas totalement aberrant. Au début nous sommes 2 à nous affronter en ligne tout en parlant de la pluie et du beau temps ou des sujets chauds de nos TL. Puis un groupe se forme, rendant encore plus facile la possibilité de trouver quelqu’un qui est disponible pour jouer. Les modes de jeu s’étoffent : des affrontements en versus, des matchs en coopération contre un duo d’inconnus en ligne, et même des tournois officieux fabriqués à la main par l’un d’entre nous avec un stylo, une règle et un très joli tableau sur papier pour lister les matchs, les scores et le classement. Presque 30 ans se sont écoulés depuis mon premier match de foot manette en main et le plaisir est toujours intact.
Présent depuis quelque temps dans la licence phare d’EA, le mode Club Pro prend son essor avec FIFA 20. Le principe est très simple, chacun joue un seul et unique joueur sur le terrain et comme il est difficile d’être 11 pour faire une équipe complète, il y en a un qui joue tous les joueurs sur des postes vacants. Il est aussi possible de laisser l’IA les contrôler, mais c’est aussi satisfaisant et enrichissant que de proposer à sa rédac-chef un article écrit par ChatGPT. Confiné par le COVID, ce mode de jeu est un excellent moyen de se retrouver et d’oublier le stress et le poids du quotidien en mimant au mieux (le côté cardio' et la fatigue musculaire en moins) un vrai match de foot en plein air. Certains trouvent vite leur poste de prédilection et pour la première fois nous pouvons jouer à 4, 5, 6 et plus en même temps, dans la même équipe ! FIFA 21 arrive, puis le 22 et le mode Pro s'affirme comme notre préféré. Que demander de plus ? L’ambiance est bonne, même si les moqueries ne se font pas attendre en cas de tir dans les tribunes, de passe catastrophique ou de tacle mal maîtrisé. Le groupe étant bienveillant, les railleries le sont aussi. Et rares sont les jeux qui permettent de se retrouver facilement à plus de 2 en ligne sur PlayStation (n'étant pas très porté FPS). Pourtant, à l’entame du cycle EA FC 25, le constat est là : notre club n’existe plus. Et pour comprendre pourquoi, il faut plonger un peu plus en profondeur dans le marais toxique qu’est devenue la licence d’Electronic Arts.
But contre son camp
Il y a un lien très fort entre la nocivité des joueurs de FIFA et celle du jeu dans sa manière de les traiter. Chacun est cause et conséquence de l’autre. Si la compétition est indissociable de tout jeu en ligne non coopératif, elle peut adopter bien des visages. Un élément primordial est la transparence des systèmes de jeu. Dans un jeu de combat, l’explication et la démonstration du système de hitbox et de frame data via des modes d’entrainement permet de comprendre pourquoi notre technique ou nos combos sont plus ou moins efficaces face à tel ou tel adversaire et manière de jouer. C'est un moyen d'apprendre de ses échecs, ses défaites et de cibler les axes d'amélioration. Un système qui tire la communauté vers le haut. La défaite n’en devient pas plaisante, mais le sentiment d’injustice et la colère qu’il peut engendrer sont atténués par cette transparence. Dans FIFA/EA FC, l’impact des statistiques des joueurs sur leur action en match est des plus opaques. Pourquoi ma frappe n’est pas cadrée alors que j’ai bien dosé mon tir et visé correctement ? Je ne le saurai jamais. Pourquoi ce joueur passe à travers mon défenseur alors que je m’étais mis au bon endroit sans faire faute pour récupérer la balle ? Impossible à dire. Pourquoi les jambes de mon joueur se croient sur scène dans un spectacle Lord of the Dance au lieu de faire la passe que j’ai demandée ? Nul ne le sait. L’absence de communication d’EA sur le sujet a même fait naître l’hypothèse d’un script FIFA, qui déciderait de manière arbitraire de l’issue de certaines actions, à l’instar du système d'équilibrage de Mario Kart mais version précision/maladresse avec un ballon. Lorsque les choses tournent en notre faveur, nous nous en accommodons, quand elles nous coûtent un match, nous hurlons à l’injustice.
Tout cela n’est permis que par les errances du Frostbite Engine, moteur utilisé par EA depuis FIFA 17 et que ne semblent toujours pas maîtriser les équipes de développement 8 ans plus tard. Mais les joueurs sont malins, quel que soit le jeu, ils chercheront et trouveront toujours la faille. Cette faille, dans FIFA, on appelle ça la "méta". Ce terme désigne une façon de jouer qui donne un net avantage sur le terrain en tirant profit des défauts du moteur physique du jeu. Par exemple, certains gestes techniques vont augmenter la probabilité de bugs de collisions qui vont permettre de passer un défenseur pourtant bien placé. Certaines tactiques s’avèrent aussi bien plus efficaces, comme le tir de l’extérieur du pied depuis le coin de la surface de réparation ou le centre au second poteau depuis la ligne de touche. Cela peut paraître normal, tous les jeux ont une "méta", et souvent cela crée un jeu du chat de la souris entre développeurs et joueurs. Les joueurs trouvent une façon optimale de jouer, les développeurs ajoutent un patch pour la rendre moins efficace et les pousser à varier leur gameplay. Cette synergie en devient parfois positive. Mais pas dans FIFA. Dans le jeu d’EA, la "méta" est sacrée, elle est immuable, parce qu’elle participe à la réussite du mode de jeu le plus toxique qui soit : le mode Ultimate Team.
Tacle par derrière
Ultimate Team est un mode de jeu qui mélange de la gestion d’équipe avec un système de loot boxes. On démarre avec une équipe de très faible niveau et pour gagner en compétitivité il faut récupérer de nouveaux joueurs (et joueuses avec l’ajout de ligues féminines de football sur EA FC 24). Cela peut se faire via un système de ventes aux enchères de cartes (qui représentent les joueurs) ou par l’achat de loot boxes, qui prennent le nom de Pack. Chaque pack peut contenir le joueur que l’on attendait désespérément, un autre qui ne nous servira pas mais que l’on pourra revendre aux enchères ou uniquement des joueurs à faibles valeur et statistiques (ce qui est le cas dans la majorité du temps). Il y a plusieurs moyens d’obtenir des packs, mais si l’on simplifie, soit vous jouez beaucoup au jeu, soit vous entrez votre numéro de carte bleue dans la console. Pour vous faire une idée, un pack à 45 000 crédits ou 600 points FC (environ 6 euros) a moins de 10 % de chances d’offrir un joueur intéressant au début du jeu. Chaque match rapportant aux alentours de 500 crédits, c’est 90 matchs qu’il faut jouer pour pouvoir se l’offrir sans passer à la caisse avec de l’argent réel. Il existe un système de récompenses journalières et hebdomadaires avec des objectifs à atteindre qui permettent de gagner quelques packs gratuitement et des crédits, mais la conclusion est toujours la même : jouer énormément ou sortir la carte bleue. Ce n’est pas nouveau, FIFA/EA FC n’est pas le premier à faire cela. C’est l’apanage de nombreux jeux, principalement des free-to-play et la première source de revenu de la majorité des jeux mobiles à succès. Dopamine et frustration, on se joue de notre cerveau, jusqu’à ce que celui-ci se dise "Oh, c’est rien 5 euros, et si ça se trouve ce que je vais obtenir derrière va vraiment valoir le coup". Spoiler : non. Jamais.
Mais la machine FIFA/EA FC est puissante. Non seulement elle a réussi à normaliser un système scandaleux de gatcha dans un jeu payant, mais elle possède en plus une communauté qui l’entretient et le normalise pour elle. La sphère des youtubeurs/streameurs EA FC qui proposent du contenu, avec certes du gameplay, mais aussi beaucoup de ce qu’ils appellent du "Pack Opening", ne fait que créer de l’espoir et de la frustration chez les spectateurs. Au moyen de sponsors, ces créateurs de contenus peuvent ouvrir des packs à foison, pour un équivalent de plusieurs milliers d’euros en cumulé sur l'année. Oubliant les probabilités, le nombre de packs ouverts et leur coût en argent réel, le public ne retient que l’image du joueur rare et très fort que leur youtubeur préféré vient de récupérer. Pourquoi pas eux ? "Oh, allez, je peux bien mettre 100 euros dans le jeu, c’est comme si j’en avais acheté un nouveau, et le jeu a l'air d'être généreux aujourd'hui". Et derrière, systématiquement, la déception.
Quand bien même, la chance serait du côté du client, Ultimate Team propose des nouvelles cartes presque toutes les deux semaines, transformant une équipe compétitive début décembre en escouade obsolète mi-janvier. Et la valse reprend jusqu’au moment le plus cynique de cette supercherie, l’arrivée d’un nouveau EA FC. Tabula Rasa comme l’écrit Platon dans le Théétète. On efface tout et on recommence. Tout le monde repart de zéro, il faut tout recommencer. Et ainsi le cycle reprend, EA engrange 1,5 milliard de gain sur l’achat de loot boxes et des joueurs s’endettent de manière dramatique.
Fair-play financier
La frustration est un élément très présent dans l’expérience vidéoludique, parfois même indispensable. Exception faite des jeux majoritairement narratifs (visual novel, walking simulator…), on retrouve presque toujours un système d’échec ou d'inaccessibilité initiale qui va s’accompagner d’une certaine frustration pour nous amener à progresser, apprendre le langage du jeu pour gagner en maîtrise et finalement atteindre cet objectif qui nous narguait jusque là. L’exemple le plus évident est celui des boss dans les Souls-like. L’échec, encore et encore (la fessée en ce qui me concerne), avec pour seul but de rendre la victoire encore plus savoureuse, jouissive et méritante. Mais la frustration peut s’exprimer de manière moins intense. Stardew Valley, et l’objectif de développer notre ferme avec initialement un avatar épuisé après avoir coupé 4 arbres, en est un autre exemple. Le point commun à ces exemples est la récompense finale, assurée, tant attendue. Nous l’avons vu plus haut, dans le mode Ultimate Team, il n’y a jamais la promesse de la récompense souhaitée, avec un système de packs aux résultats certes aléatoires mais où la probabilité est toujours à l’avantage d’EA. Mais l’utilisation de la frustration dans EA FC est encore plus vicieuse. L’opacité de son système de statistique des joueurs et les errances du Frostbite Engine offrent systématiquement un net avantage pour qui possède de meilleures caractéristiques.
J’en reviens aussi au système de "méta" entretenu par EA. Il y a clairement une manière de jouer plus efficace que les autres. Cette dernière s’avère d’autant plus efficace que votre joueur possède de meilleures capacités, adaptée à cette façon de jouer. Et comme dit plus haut, un bon joueur en décembre peut être inutile en janvier avec la ridicule fréquence d’arrivée des nouvelles cartes. Tout cela mis ensemble crée une frustration ineffable lors d’une partie en ligne Ultimate Team. Celui qui aura payé l’équivalent d’un très bon resto à deux dans des packs pour améliorer son équipe va ressentir une frustration encore plus grande après une défaite qui lui signifie qu’il lui faut repasser à la caisse pour suivre le rythme. Celui qui n’aura pas mis d’argent dans le jeu se sentira floué d’avoir perdu face à quelqu’un qui semble moins bien maîtriser le jeu que lui, mais possède en contrepartie l’avantage d’une équipe surpuissante grâce au pouvoir du passage à la caisse. L’expression "Pay to Win" qui revient très souvent à l’évocation du mode Ultimate Team ne vient pas de nulle part et semble clairement justifiée après avoir réalisé quelques matchs.
Les joueurs pourraient se retourner contre EA FC, le boycotter, passer à un autre jeu, mais ils souffrent d’une ambivalence malsaine. Beaucoup de joueurs sur EA FC ne se contentent pas de vouloir gagner leur match, ils veulent humilier l’adversaire, le faire quitter le jeu le plus vite possible pour pouvoir enchaîner sur l’affrontement suivant. Cela se fait par l’application de tactiques anti-jeu, mais aussi en abusant des pauses ou en utilisant des célébrations moqueuses après un but. Il n'est pas rare non plus de recevoir un message insultant après un match si l'on n'a pas bloqué l'option sur la PlayStation. Certains n’hésitent pas à arborer des pseudonymes problématiques, misogynes ou racistes, dans ce qui semble être une impunité totale malgré une option pour signaler du contenu offensant. Le joueur d’EA FC veut se sentir fort, supérieur, et pense que l’humiliation de l’autre est un moyen d’arriver à ses fins. Le système bancal et scandaleux créé par EA lui permet de réaliser cela, avec encore plus de facilité s’il accepte de dépenser de l’argent. Tout le monde est gagnant quelque part, sauf celui ou celle qui voulait juste jouer en ligne et s’amuser, en solo ou avec ses amis.
Pas faute selon l'avare
Si Ultimate Team est un cercle de l’enfer où règne une manipulation aussi avide que malsaine, pourquoi ne pas se tourner vers les autres modes de jeu ? Parce que directement et indirectement, Ultimate Team altère l’expérience de jeu globale dans EA FC.
Les autres modes en ligne, contre des inconnus, proposés par EA FC sont les modes Saisons et le Club Pro. Je reviendrais sur le second un peu plus tard, mais pour le premier, il est extrêmement simple. On sélectionne une équipe et on affronte un inconnu qui a sélectionné une équipe que le jeu estime du même niveau selon un système d’étoiles. Manchester City et le Real Madrid possèdent 5 étoiles et les équipes du championnat coréen dépassent rarement les 3. Outre le fait qu’il existe parfois de flagrantes disparités de niveau entre deux équipes avec le même nombre d’étoiles, le système de "méta", pensé pour Ultimate Team, fonctionne toujours sur ce mode de jeu, certaines équipes proposant des joueurs plus à même de permettre d'appliquer cette méta. La résultante est l'affrontement très fréquent des mêmes équipes, encore et encore, qui applique le même schéma de jeu. L’époque de PES 6 où il fallait construire, jouer en passe et en déplacement parce que l’idée d’éliminer un joueur en face-à-face était presque incongrue, paraît bien loin. Même dans une moindre mesure, les attitudes toxiques restent légion sur ce mode où l’humiliation de l’autre semble bien plus être le but recherché que la simple victoire. À cela s'ajoutent des serveurs souvent à bout de souffle, comme si le mode en ligne non rentable d’affrontement en ligne n’avait droit qu’aux restes de bande passante laissés par Ultimate Team. Niveau bugs, on est aussi servi, mais bien loin de ce que Club Pro nous réserve.
Pour ce qui est du jeu hors ligne, l’IA a au moins l’avantage de ne pas être toxique, à défaut d’être toujours cohérente dans ses prises de décision, mais le souci principal n’est pas là. Les modes hors ligne, depuis quelques années maintenant, semblent clairement avoir été bâclés et relégués au rang de dernière priorité dans l’agenda de développement du jeu. Les bugs s’y multiplient et sont souvent corrigés des mois après le moindre glitch de carte dans Ultimate Team, le sentiment de redondance s’installe très rapidement, et les maigres évolutions sur les options managériales proposées paraissent risibles au regard de ce que proposait Football Manager dans ses opus considérés aujourd’hui comme obsolètes. Passé 15h sur les modes hors ligne d’EA FC, il est clair que nous évoluons dans une zone du jeu qui n’est là que pour faire honneur à sa présence historique depuis les premiers opus. Pourtant, EA a su faire. Sur FIFA 17, nous avons pu découvrir le mode histoire, qui permettait d’incarner Alex Hunter, jeune joueur promis à une grande carrière. Cinématique, gameplay en match, choix de dialogue, c’était inespéré, bien réalisé, plaisant. Cela a duré sur FIFA 18 et 19 où l’histoire s’est étendue à celle de Danny Williams, ami et ancien coéquipier d’Alex, et Kim Hunter, demi-sœur d'Alex dont nous pouvions jouer un pan de carrière. Avec FIFA 20, le mode histoire a disparu, ne laissant derrière lui que des souvenirs et des modes hors ligne qui peinent à capter notre intérêt sur la longueur.
Ted lassé
Comme je l’écrivais plus haut, notre Club Pro, source de tant de moments de détente, de rire, de mauvaise foi assumée, n’est plus et ne reprendra probablement pas vie sur EA FC 25. Que s’est-il passé ?
Perdre n’est jamais amusant, mais quand on est avec ses amis cela passe plus facilement. "On gagne ensemble, on perd ensemble", comme aiment le dire les joueurs et joueuses du ballon rond. Mais il y a la défaite, et les conditions de la défaite. J’évoquais plus haut la toxicité de la communauté EA FC. Cette dernière n’est pas confinée au mode Ultimate Team. Tandis que vous vous connectez pour jouer avec vos amis, après une journée de galère au boulot, dans l’espoir de vous offrir un moment de détente, en face de vous se dresse un groupe d'inconnus qui jouent comme si leur vie en dépendait. Cela pourrait simplement amener à élever le niveau technique sur le terrain, mais il n’en est rien. La résultante de cette attitude est l’application de toutes les méthodes pour gagner vite et de manière aussi efficace que non ludique. Pour arriver à leur fin, ces personnes jouent en appliquant la "méta" du jeu, qui n’est autre que celle pensée pour créer de la frustration dans le mode Ultimate Team. Deux schémas principaux peuvent se rencontrer : des petits joueurs très vifs qui misent tout sur les bugs de collisions provoqués par les dribbles du jeu, et les joueurs excessivement grands qui sont là pour prendre tous les ballons de la tête. Ces deux stéréotypes garantissent une efficacité maximale en match, au prix d’une partie des plus fades en l’absence de tout ce qui fait le sel d’un match de foot : la tactique, l'adaptabilité, la polyvalence. Pour quiconque veut jouer, il faut choisir entre appliquer la "méta" afin de maximiser ses chances de réussite, ou jouer comme le voudrait toute simulation de foot, avec de la variation dans la construction, et se compliquer la tâche.
À cela s’ajoutent des attitudes et pseudonymes problématiques, qui s'enchaînent au fil des matchs. Certains joueurs n’hésitent pas à arborer des noms racistes, misogynes, voire à faire l'apologie du fascisme et du nazisme (ce qui est très loin d’être rare). On pourrait me répondre que mon rôle dans cette situation est de faire un signalement via les options qu’EA FC propose, mais ce n’est pas si simple. Dans la page de signalement, ce sont les noms de compte PlayStation qui apparaissent et pas ceux des avatars. Il est impossible de savoir qui est celui qui doit être signalé. Alors dans le doute, on signale tout le monde, sans savoir si cela sera utile ou non. Avec ces éléments, la coupe est déjà pleine, mais pour quiconque aurait encore un peu de patience ou de résilience, EA FC n’hésite pas à enchaîner les bugs avec des maillots aux couleurs similaires rendant le jeu injouable, des déconnexions intempestives et inexpliquées qui coûtent la victoire, et autres situations tellement ubuesques que vous croiriez à une blague si je vous les énumérais. Le cumul de ces éléments rend le jeu pénible, moins attrayant, et la défaite qui faisait partie du jeu jusque là devient la cerise sur le gâteau du découragement. La frustration, qui se doit d’être un moteur à la progression dans tout jeu vidéo, devient une cause d’aigreur et nous rend nous-mêmes toxique dans notre attitude envers nos amis (c'est le moment où je fais mon mea culpa). Au même moment, sur l'autre moitié du terrain, l'équipe adverse, coupable d'une attitude délétère et de pseudonymes honteux, célèbre sa victoire dans une effusion de joie. Le plaisir n'est plus, les connexions se font sans envie, et à terme, le Club se fâne jusqu'à ne plus exister.
Débrief' d'après-match
Quelles sont les alternatives à EA FC ? UFL devrait sortir d’ici la fin d’année, on n’en sait pas grand-chose mais c’est un free-to-play, ce qui a priori n’augure rien de bon. eFootball, aka le cadavre de PES, est lui aussi un free-to-play qu’il est difficile d’apprécier. La FIFA, qui a rompu son partenariat avec EA, a demandé au studio 2K de produire un jeu de foot profitant de ses licences. C’est peut-être là qu’un mince espoir est permis. Mais cela ne dépend pas que des studios et des jeux, mais aussi des joueurs. Pour qu’un mode permettant de retrouver ses amis pour jouer en ligne soit optimal, il faut une communauté qui suive le train en marche. S’il n’y a personne sur les serveurs, autant se retrouver entre amis sur Discord pour discuter (ce qui est aussi une très bonne chose). Et si les joueurs d’EA FC migraient vers un autre jeu, cela ne changerait pas leur mentalité à moins d'une modération drastique. Qui prendra ce risque à une époque où l'éthique est sacrifiée sur l'autel des dividendes pour les actionnaires ? Le problème est complexe, et pour l’heure je ne vois aucune solution à l’horizon.
Alors en attendant, je ressors ma PS2 du placard et je l’emmène avec moi en vacances pour jouer à PES 6 avec des amis, comme au temps de l’insouciance et de la mauvaise foi bonne enfant qui prêtait à sourire. Mais à l’image de X (ex-Twitter), FIFA/EA FC est un autre lieu de rencontre, support de liens sociaux qui fait s’éloigner les gens en conséquence d’une toxicité locale croissante difficile à supporter. Peut-être que les équipes de Bluesky pourraient se lancer dans le développement d’un jeu de foot ?
Rifampicine
Je vous dirais bien ce que j'aime comme style de jeux mais ça change toutes les 6 heures. Alors disons que j'aime aussi beaucoup les musiques de jeux vidéo et écrire dessus.
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