Warhammer 40,000: Space Marine 2 est exactement ce qu'il a l'air d'être, à savoir un jeu bourrinissime, suite d'un autre jeu bourrinissime qui avait fait sensation en 2011. Et vous savez quoi ? Parfois, on n'a pas besoin de plus que ça pour être heureux. Lisez quand même juste l'encadré ci-dessous avant de vous lancer dans la lecture !
Entre le moment de la rédaction de cette critique et sa publication, nous avons appris (comme beaucoup d'autres rédactions) que Saber Interactive, développeur du jeu, a peut-être développé son jeu en Russie. Depuis plusieurs années, Saber se présente comme une société américaine (elle est immatriculée en Floride), mais elle possède de nombreux studios dans le monde, dont certains en Russie et Biélorussie, sans qu'il nous soit possible de savoir pour sûr si ces studios continuent d'opérer dans ces pays.
Nous avons contacté l'éditeur du jeu pour obtenir des précisions, mais sans obtenir à ce jour de réponses. Il est donc possible que Space Marine 2 ait en partie été développé dans les studios russes du développeur, mais à notre niveau et à ce stade, il nous est impossible de le confirmer ou l'infirmer définitivement.
Après consultation avec la rédaction de The Pixel Post, je n'ai pas souhaité retirer cette critique pour autant, car elle a été rédigée avant que ces informations ne nous parviennent. Mais je souhaitais vous donner par cet encadré un élément de contexte, et rappeler mon soutien personnel d'une part au peuple ukrainien (et à son industrie du jeu vidéo florissante qui a été étrillée par le conflit depuis 2014) et d'autre part aux développeurs de jeux russes, opposés aux actions en cours, et qui ont dû délocaliser la production de leurs jeux à l'étranger pour ne pas financer la machine du régime en place (Indika, Militsioner, et tant d'autres).
Quand j'avais sept ans, ma mère m'a acheté des boîtes de jeu de rôle avec plein de petites figurines dedans, en n'ayant absolument aucune idée de ce que c'était. Moi non plus, mais sachez que j'ai passé ma meilleure vie avec mon plateau de Hero Quest et ma caisse de Marines du Chaos de Warhammer 40 000. J'y jouais avec des copains, on faisait courir les monstres et les robots sur le plateau en criant des trucs à base de crâne magique et de laser des enfers et en faisant des bruits d'explosions en gonflant les joues. Sans jamais comprendre ce qu'on était supposés faire parce qu'on ne comprenait rien au volumineux livre de règles. Presque 35 ans plus tard, je n'y comprends toujours pas grand-chose, et je pense en réalité qu'il n'y a pas grand-chose à comprendre. Du moins rien qui mérite d'occuper de la place de stockage dans mon cerveau déjà bien saturé d'idioties. En revanche, le plaisir d'incarner un gros bonhomme bête et de décapiter des monstres avec une tronçonneuse en braillant des inepties, lui, il est toujours intact.
La théorie du crado
L'affreuse et susceptible fanbase de Games Workshop essayera sans doute de vous convaincre du contraire : si, si, en vrai, c'est super profond et intelligent et subtil, tout ça. L'hérésie des boucliers noirs des tyrannides des mechanicus de je ne sais quoi. Non, mais vous rigolez ou quoi ? On parle d'un univers où tout le monde ajoute des crânes partout sur tous les éléments du décor possible. Où les soldats peuvent se rafistoler pour vivre 200 ans, ou les Orks et les insectes de l'espace arrivent par MILLIARDS DE MILLIARDS et où la taille moyenne des épaulettes d'armure dépasse en envergure celle de mon salon. Tout le monde porte des noms de faux trucs en latin : Titus, Demetrius, Cadia ou Archimagus. Les méchants froncent les sourcils de manière fourbe, les soldats sont braves jusqu'au délire, et les traîtres se trahissent parce qu'ils ont des TATOUAGES DU CHAOS VISIBLES SUR LEUR BRAS. Vous pouvez tartiner toutes les pages d'univers étendu et de wiki que vous voulez, tout ceci reste un fichu dessin d'enfant qui a bouffé trop de sucre au goûter.
Je suis, en général, un grand défenseur de la narration dans les jeux vidéo. En principe, moi, ce qui me fait vibrer dans un jeu, c'est qu'on me raconte un truc. Encore quelque chose qui est lié à l'enfance, sans doute, puisque je ne pouvais pas m'endormir sans qu'on me raconte de jolies histoires. Mes parents fatigués, les romans et les jeux ont pris le relais, d'où mon amour des RPG de haut vol et des jeux indé à la narration torturée. Faut quand même bien admettre que dans Warhammer 40,000: Space Marine 2, on ne coche aucune des deux cases.
Vous savez ce qu'on fait là-dedans ? On incarne un gros mec à la mâchoire carrée comme un lego qui doit ralentir une invasion d'insectoïdes spatiaux qui cache une autre invasion, de méchants sorciers des enfers. Et on défonce tout au passage. Ça explose, ça découpe, ça étripe par paquets de cent, et c'est servi pendant une dizaine d'heures par des dialogues de type "Chef, on dirait que ce truc est en train de prendre vie ! / Ah ouais ? Alors s'il est vivant, il est temps de lui apprendre LA DOULEUR" (je n'invente rien).
En réalité, ma seule exigence en lançant le jeu, c'était sans doute que Saber Interactive et l'éditeur (Focus) dressent un portrait ne versant pas complètement dans la complaisance de nos chers amis les Space Marines. Qu'il y ait tout de même un petit rappel qu'on n'incarne pas "les gentils" dans cet univers où tout le monde est soit un monstre sanguinaire, soit une créature de Frankenstein à la solde de la secte meurtrière d'un dictateur immortel. Eh bien, sachez que c'est le cas, puisque Warhammer 40,000: Space Marine 2 nous accueille par un panneau d'exposition nous rappelant qu'ici, tout le monde est un salaud qui veut tout faire exploser, opposé à d'autres salauds qui veulent tout faire exploser. C'est toujours bien de faire ce genre de petite piqûre de rappel : non, vous ne voulez pas vraiment être un Space Marine. Parce que vous n'êtes pas un dessin d'enfant qui a bouffé trop de sucre au goûter.
Bazar autant qu'il tranche
Comment se fait-il que je me sois donc autant amusé pendant la dizaine d'heures de la campagne de ce truc ? Et que j'ai même envie de le relancer pour me plonger dans les "opérations", ces batailles supplémentaires vous proposant de refaire certaines missions sous une autre perspective et avec d'autres personnages ? Et que j'ai même presque eu envie de tenter le mode PvP, avant de me souvenir que les autres êtres humains sont probablement d'horribles personnes (beaucoup plus skillées que moi) ?
Je pense que cela tient à deux choses : la première, c'est que Warhammer 40,000: Space Marine 2 ne fait pas semblant d'être autre chose que ce qu'il est. Pas de surcouche RPG, pas de "untel se souviendra de ça", pas de loot, pas de craft. Tout est centré sur le fait de courir dans tous les sens en hurlant et en choisissant l'arme appropriée pour tout cramer en fonction de la menace qui arrive d'en face. Et de ce point de vue, l'arsenal est généreux et jouissif.
La seconde, c'est que Warhammer 40,000: Space Marine 2 est un jeu assez imprenable techniquement. C'est bigrement bien optimisé, c'est très beau, c'est fluide comme tout, le feeling des armes est pile dans le ton, le corps à corps est d'une brutalité réjouissante. Même les options de difficulté et d'accessibilité sont au top. La campagne parvient à reproduire quelque chose de très répétitif pendant un paquet de chapitres sans jamais générer de sensation d'ennui, même en solo, alors qu'elle a clairement été conçue pour être parcourue en coop. Le rythme est géré de manière admirable.
Si vous avez deux potes aussi bas du front que vous à même de vous accompagner dans le délire, d'ailleurs, n'hésitez pas. Parce que si j'avais la moindre petite retenue à formuler sur cette divine surprise, c'est que les personnages contrôlés par l'IA sont, eux aussi, absolument aussi stupides, têtes brûlées, incohérents et irritants que possible. Autant, mettons, qu'un personnage de dessin d'enfant qui a bouffé trop de sucre au goûter.
Warhammer 40,000: Space Marine 2 a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur. Le jeu est également disponible sur PlayStation 5 et sur Xbox Series.
Je pense qu'on doit tout autant défendre le droit des jeux vidéo à être fins, subtils et innovants qu'à, parfois, être de gros sacs à patates de violence et d'explosions régressives. À condition de le faire bien. Et à quelques bugs et problèmes d'IA près, Warhammer 40,000: Space Marine 2 remplit totalement son contrat, notamment en proposant énormément de contenu annexe à parcourir en coop une fois la campagne bouclée. En ce qui me concerne, je range le coffre à jouets, car ce genre de truc, une fois tous les 13 ans, moi, ça me suffit. Mais je le fais en me réjouissant de savoir que le premier Space Marine développé par Relic Entertainement (cela ne nous rajeunit pas) a désormais un digne successeur. Gloire à l'Empereur, ou un truc dans le genre. Je vous ai dit que je ne comprenais rien aux règles de cet univers.
Les + | Les - |
- C'est beau, fluide et bruyant pile comme il faut | - Les personnages contrôlés par l'IA sont aussi bêtes qu'ils en ont l'air |
- Le jeu est extraordinairement bien optimisé | - Les combats de boss sont un peu moins inspirés que le reste du jeu |
- Taillé pour être joué en coop, mais fonctionne très bien en solo | |
- Magnifie l'univers décadent de Warhammer 40K sans le glorifier ou le glamouriser outre mesure | |
- La campagne ne souffre d'aucune baisse de rythme |
zalifalcam
J'aime les jeux double A, les walking simulateurs prétentieux et les JRPG, et plutôt que de me soigner, j'écris à leur propos.
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