Dans Rogue Flight, vous êtes une pilote de vaisseau spatial qui doit aller dézinguer de méchants robots I.A à travers le système solaire dévasté. Oh, mais vous n'êtes pas n'importe quelle pilote de vaisseau. Vous êtes une pilote d'un animé japonais des années 90. Qui voudrait être autre chose, au fond ?
Le studio américain Truant Pixel est relativement méconnu de nos services, mais ce sont tout sauf des bleus. Leurs membres ont ainsi déjà travaillé en support sur des projets majeurs de SEGA et de Konami, et sur des expériences VR poussées. Jusqu'ici, l'entreprise s'était spécialisée en particulier dans la conception et l'optimisation d'interfaces graphiques. Est-ce que ce CV était le bon pour se lancer dans un jeu de tir de forcené axé scoring et saturation d'explosions ? La réponse est oui, mille fois oui. Et si j'ai eu un mal fou à décrocher de Rogue Flight alors que je déteste en principe de genre de trucs, c'est pour deux raisons. D'une part, moi aussi j'ai toujours voulu être une pilote de mecha dans un animé produit entre 1988 et 1991. Ensuite, parce que ce jeu déborde d'amour, pas uniquement pour son sujet, mais également pour ses utilisateurs. Depuis sa sortie, son suivi par le studio est ainsi particulièrement exemplaire.
What did the Star Fox say ?
Avez-vous déjà joué à Star Fox ? Oui ? Je sais que ce site est lu par des personnes âgées, rassurez-vous, vous êtes en bonne compagnie, cornet acoustique et lumbago compris. Parce que Rogue Flight, c'est surtout un Star Fox sous stéroïdes. Et si vous ne connaissez pas le concept, car vous avez la chance d'être jeune, rassurez-vous, c'est très simple. Vous êtes dans un vaisseau, vu de derrière, et il faut tirer sur tous les trucs en face. De temps en temps, il y a un boss, qui fait la taille de plusieurs fois l'écran. Et à un moment donné, on vous demande de choisir entre plusieurs chemins pour poursuivre votre aventure, ouvrant la voie à des fins différentes. Et en chemin, il y a des bonus et des missiles à collecter pour devenir plus fort. C'est bon, j'ai résumé tout Rogue Flight, on passe aux + et - de fin de critique et je retourne jouer à des JRPG de 157H.
Comment ? C'est un peu court ? Bon, admettons. J'ai déjà eu l'occasion de le dire en intro, mais Rogue Flight est une excellente surprise. Ses devs ont réussi le petit miracle de produire un jeu de massacre à l'interface foisonnante et à l'écran saturé d'explosions et d'effets graphiques en permanence, en gardant le tout absolument lisible en permanence. Des premières secondes de vol au générique de fin, je n'ai jamais pesté une seconde contre une interface confuse, des patterns illisibles ou des décors envahissants. C'est brillant, c'est rythmé, c'est clair, et c'est punchy.
Et si Rogue Flight voit son intrigue placée logiquement assez en retrait, Truant Pixel est tout de même parvenu à donner, via une direction artistique et quelques cutscenes magnifiques, une vraie ambiance à son jeu. Oui, il y a du Macross, du Evangelion et même (et SURTOUT) du Gunbuster dans ce voyage post apo vers les confins du cosmos. Je lui reprocherai sans doute une seule et unique petite chose : vous forcer à refaire quatre fois diverses variations de sa route principale pour en voir le bout, en vous faisant repasser par les (longues) deux premières missions sans variations particulières. Même si le jeu ne dure que cinq ou six heures, j'ai fini par me lasser de massacrer les deux premiers boss en boucle.
Suspens ton vol
Mais davantage que par la joie de me donner l'impression d'être en train de cosplayer un épisode de Diebuster, Rogue Flight me restera en mémoire pour la qualité exemplaire de son suivi de la part du studio. En particulier sur la question de l'ajustement de la difficulté, et sur des détails de confort de jeu qui ont radicalement amélioré l'expérience suite aux premiers retours des utilisateurs. Je m'explique.
Rogue Flight est un titre globalement assez difficile, et ce, dès son niveau de difficulté standard, dans lequel la moindre erreur importante vous promet de vous faire descendre en quelques secondes. Il possède une approche très "arcade" de son gameplay, consistant à vous faire multiplier les parties pour apprendre quasiment par cœur la structure et les pièges de chaque niveau. Mais "difficile" n'est pas synonyme de "déséquilibré" ou "d'injuste" : en réalité, chaque setting vise explicitement un public différent. Si les niveaux les plus ardus sont conformes à ce que cherchent les joueurs les plus mas… exigeants, les trois autres ont des cibles plus larges. Le niveau le plus faible (où seuls les boss représentent une véritable menace) permet de profiter de l'histoire et de découvrir la structure des niveaux. Les deux suivants sont plus conformes au rythme assez lent vu dans le premier Star Fox de 1993 et aux shooters classiques à la Afterburner.
Et non seulement chaque mode de difficulté reste fun, mais de plus, chaque élément débloqué dans un mode (vaisseau plus performant, arme bonus…) l'est pour toutes les versions. On peut ainsi déverrouiller de meilleurs vaisseaux en mode facile pour rendre moins hardcore la difficulté en mode supérieur. Tout le reste (à part le compteur de score) propose une expérience et des features absolument similaires, sans jugement ni considération hautaine affichée à l'écran. Rogue Flight est un jeu à la fois exigeant et inclusif, et c'est absolument réjouissant.
D'autant plus que chaque mise à jour vient corriger d'autres problèmes un peu frustrants suite aux premiers retours. Ainsi, le système d'upgrade du vaisseau un peu nébuleux vient d'être grandement amélioré. Et dans le même ordre d'idée, le système de game over, jusqu'ici assez punitif et pouvant vous effacer à la volée une run d'une heure en vous renvoyant à la case départ, vient de devenir plus permissif. Vous voulez vous entrainer en boucle sur ce satané quatrième boss sans avoir à vous refarcir tout le reste ? C'est désormais possible. Moult autres petits détails ont été apportés au fil des discussions, comme la possibilité de suspendre son vol si on n'a pas le temps de finir une run et de revenir plus tard. Entre le lancement du jeu et le moment où j'écris ces lignes, Rogue Flight est passé de "très bon" à "encore meilleur". Ce travail de suivi mérite votre attention, votre temps, et des gros câlins aux devs (si ça leur dit).
Rogue Flight a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur. Le jeu est également disponible sur PlayStation 5, Nintendo Switch et Xbox Series.
On peste souvent contre les jeux qui ont un suivi défaillant ou, au contraire, ceux qui cèdent à toutes les demandes farfelues des joueurs les plus vocaux. Dans le cas de Rogue Flight, il me semble que c'est plutôt un dialogue très constructif qui s'est engagé entre le studio et les fans de shoot them up. Et ce afin de livrer une expérience à la fois complexe, subtile et adaptée au public le plus large possible. Bien entendu, il faut TOUT DE MÊME être un minimum sensible à la science-fiction rétro et aux ambiances de japanime vintage pour pleinement rentrer dans le délire. Mais il s'avère que c'est mon cas, et que malgré mon indifférence habituelle aux jeux de piou-piou spatial, je ne me suis jamais senti mis sur le côté. Je serais même volontiers reparti faire quelques tours supplémentaires dans des niveaux inédits.
Les + | Les - |
- Un shoot them up fun et spectaculaire | - Quelques menus un peu confus dans l'écran d'accueil |
- L'ambiance et la direction artistique sont au top | - Les quatre routes principales finissent par se répéter un peu |
- La modulation de la difficulté est très fine | |
- Suivi exemplaire depuis la sortie |
zalifalcam
J'aime les jeux double A, les walking simulateurs prétentieux et les JRPG, et plutôt que de me soigner, j'écris à leur propos.
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