Un jeu de jardinage, dans la campagne néerlandaise, voilà qui promet d’être relaxant et parfaitement normal. Enfin ça, c'est ce qu’on se dit si on n’a lu que la première ligne du descriptif et qu’on n’a pas encore lancé Grunn.
Avant Stackland, je n’avais jamais entendu parler de Sokpop et faute de temps ou de curiosité, je n’avais pas cherché à en savoir plus. Erreur réparée, Sokpop est donc un collectif hollandais, composé de quatre personnes, collectivement à l’origine de plus d’une centaine de jeux, qui développent leurs jeux en solo au sein du collectif. En plus du système de distribution classique via Steam et itch.io, le collectif propose un abonnement mensuel via Patreon qui permet d’avoir accès à leurs nouveaux jeux (un ou deux par mois) et à certains de leurs anciens. En parcourant leur catalogue et quelques articles sur le sujet, j’en ai conclu que si Grunn a très peu en commun avec Stackland, il a en revanche tout à fait sa place au milieu d'une quantité d’autres titres qui ont l’air aussi étranges qu’inventifs.
Déjà-Grunn
J’ai été embauchée pour m’occuper d’un jardin, le temps d’un week-end, le temps d’aller couper quelques haies et de ramasser quelques papiers, rien de bien sorcier. Malgré une méthode de communication peu conventionnelle à base de Polaroids dispersés ici et là, j’ai pu trouver la clé et m’installer dans le cabanon où j’ai trouvé une paire de cisailles. Un peu sommaire comme équipement pour les tâches qui me sont assignées, me suis-je dit, mais on ne va pas se laisser abattre pour si peu. J’ai toutefois l’impression d’être observée en permanence, mais ça doit être mon imagination, encore que je suis presque sûre que quelqu’un a fermé cette porte dans mon dos. J’ai trouvé l’église, puis un passage vers le village qui m’a permis de ramasser une trompette magique et localisé un marteau. J’ai fait un tour et j’ai… vérifie ses notes, été mangée par un chien.
J’ai été embauchée pour m’occuper d’un jardin, le temps d’un week-end, le temps d’aller couper quelques haies et de ramasser quelques papiers, rien de bien sorcier. Malgré une méthode de communication peu conventionnelle à base de Polaroids dispersés ici et là, j’ai pu trouver la clé et m’installer dans le cabanon où j’ai trouvé une paire de cisailles. Un peu sommaire comme équipement pour les tâches qui me sont assignées, me suis-je dis, mais on ne va pas se laisser abattre pour si peu. Je suis toutefois certaine d’être suivie, j’ai observé un reflet dans la fenêtre et cette porte ne s’est pas fermée toute seule. J’ai trouvé l’église, puis un passage vers le village qui m’a permis de ramasser un trompette magique et localisé un marteau. J’ai fait un tour du village, localisé la station-service et trouvé une pomme et j’ai… été mangée par un couloir.
J’ai été embauchée pour m’occuper d’un jardin, le temps d’un week-end, le temps d’aller couper quelques haies et de ramasser quelques papiers, rien de bien sorcier. Malgré une méthode de communication peu conventionnelle à base de Polaroids dispersés ici et là, j’ai pu trouver la clé et m’installer dans le cabanon où j’ai trouvé une paire de cisailles. Un peu sommaire comme équipement pour les tâches qui me sont assignées, me suis-je dit, mais on ne va pas se laisser abattre pour si peu. Je suis sûre d’être observée et une sensation tenace de déjà-vu me saisit. Mais je suis consciencieuse et j’ai terminé de faire le jardin et comme le bus ne revient que lundi, j’en ai profité pour entretenir le reste de la ville et trouver quelques Polaroids en plus et… je suis morte d’une façon aussi étrange qu’inavouable.
J’ai été embauchée pour m’occuper d’un jardin, le temps d’un week-end, le temps d’aller couper quelques haies et de ramasser quelques papiers, rien de bien sorcier. Malgré une méthode de communication peu conventionnelle à base de Polaroids dispersés ici et là, j’ai pu trouver la clé et m’installer dans le cabanon où j’ai trouvé une paire de cisailles. Un peu sommaire comme équipement pour les tâches qui me sont assignées, me suis-je dit, mais on ne va pas se laisser abattre pour si peu.… Excusez-moi, je crois que je suis coincée dans une boucle temporelle, ça aurait dû figurer sur le contrat de travail et impliquer une prime de risque au minimum. Mais puisque j’y suis, autant aller au bout de cette histoire.
J’ai donc parcouru et reparcouru les mêmes endroits, j'ai refait les mêmes actions, de manière de plus en plus efficace, me libérant du temps pour effectuer d’autres actions parfois complètement dispensables, juste pour voir. J’ai même saccagé volontairement mes chances de survie pour voir ce que ça donnait et j’ai fini par rompre le charme et sortir enfin indemne de ce jardin infernal.
Si j'avais un marteau… je fracasserais des nains de jardin
J’étais très circonspecte en acceptant cette mission, Grunn a une esthétique qui ne me parle pas, tout est un peu trop vif, un peu trop bancal, un peu trop bizarre et j’ai toujours peur d’être perdue dans ce genre d’ambiances étranges où il faut se débrouiller par soi-même. J’ai terminé ma première partie plus perplexe que jamais et puis un essai après l’autre, un Polaroid après l’autre, j'ai commencé à prendre mes marques, j’ai appris à observer mieux, à tester des choses, car tout au plus, il me fallait juste recommencer, et au plus long une partie a dû me prendre 45 minutes.
Ça m’a fait penser à un concept que je n’ai toujours compris qu’en théorie quand mes petits camarades en parlent : l’idée de timing et d’apprentissage dans les jeux, que ce soit de la plateforme ou des souls-like. Ici bien sûr, pas de boss à combattre, pas de jolis mouvements fluides à effectuer, pas non plus comme les rogue-like classiques de capacités à améliorer, mais essai après essai, les doigts commencent à savoir dans quel ordre effectuer les actions, à quel moment de la journée telle action sera possible, quel chemin prendre pour que ça aille plus vite. C’est une mécanique que j’ai rarement l’occasion d’explorer et ça m’a ravie de l’avoir sous cette forme très simplifiée.
Un autre point fort du jeu, c’est sa capacité à donner des directions sans jamais prendre le joueur par la main ou l’empêcher en quoi que ce soit de tenter des choses absurdes. J’ai ainsi couru dans tout le village en soufflant dans une trompette, fait du popcorn, tenté de ressusciter un poisson, aidé la fanfare du village et fini par me rappeler que si j’avais un marteau dans mon inventaire, il pouvait être judicieux de tenter de fracasser plein de choses pour voir. Il n’y a d’ailleurs aucune pression à atteindre à la vraie fin du jeu.
Sous des dehors un peu grossiers, relativement peu bavards et malgré ses murs invisibles presque visibles, Grunn est généreux et propose un grand nombre de zones, grandes et petites à découvrir… et redécouvrir quand on a compris comment y progresser et re-redécouvrir quand on a compris qu’on avait raté quelque chose. Et si je parle de la direction artistique de ce jeu en termes qui peuvent paraître dépréciatifs, ce n’est pas du tout parce que c’est raté, c’est même très réussi. Ça colle parfaitement avec l’ambiance.
Grunn a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur.
J’avais peur d’être injuste avec Grunn, de ne pas comprendre ce qui se passe et de passer un mauvais moment et c’est tout l’inverse qui s’est produit. Sous des dehors étranges, c'est un jeu malin, inventif et surtout très généreux qui introduit en plus subtilement une grammaire ludique qui n’est pas forcément habituelle dans les point and click, tout en offrant discrètement assez de structure pour que les joueurs un peu perdus s’y retrouvent.
Les + | Les - |
- Une grande liberté d'action | - Mais des murs invisibles quand même très visibles |
- Les nombreux détails, zones, achievements à débloquer | - Une ambiance sonore un peu répétitive |
BatVador
Traductrice ascendante topiaire qui aime les city builders, les dystopies et les jeux avec des gens déprimés dedans.
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