Premier jeu de Black Salt Games et édité par Team17, DREDGE propose un jeu de pêche atypique, où se mêlent exploration, collecte et mystères à découvrir. Un premier titre qui s’est vite transformé pour moi en coup de cœur de ce début d’année.
La pêche dans les jeux vidéo pourrait faire l’objet d’un très sérieux dossier que ça ne surprendrait personne. Entre celle qu’on retrouve sur des bornes d’arcade, les licences connues ou plus discrètes sur consoles ou celle qui fait office de gameplay annexe, il y a effectivement de quoi faire. Mais l’image qu’on retient à chaque fois, c’est celle du protagoniste pêcheur, canne à la main. Pour DREDGE, c’est différent puisque le gameplay tourne autour de la pêche en mer et le protagoniste est représenté par son bateau, un chalutier. Une approche originale qui permet au titre de la petite équipe néozélandaise de Black Salt Games de proposer des mécaniques intéressantes quant à la gestion de ce bateau et de son équipement. Mais c’est loin d’être le seul atout du jeu.
Pris dans les filets
Qui n’a jamais rêvé de pêcher à l’infini et de posséder son propre bateau de pêche ? D’accord peut-être que peu de monde est concerné et même le lobby breton de TPP ne s’y retrouvera pas. Mais comme je le disais en introduction, DREDGE offre clairement un peu de fraîcheur dans la manière d’aborder le jeu de pêche. On peut en effet découper le gameplay en trois strates : la première, c'est la quête principale qui est centrée sur la récupération, par la pêche, de mystérieux artefacts. La deuxième strate, c’est l’accomplissement de quêtes secondaires ainsi que la recherche d’objets, de ressources, et la découverte de lieux et de personnages, dans le but principalement de débloquer de nouveaux équipements pour le bateau. Enfin la troisième strate, c’est l’exploration libre et la complétion de l’encyclopédie où sont consignés tous les poissons attrapés.
La pêche est donc à la fois un gameplay principal ET annexe. Il faut pêcher, c’est même une obligation ne serait-ce que pour vendre le poisson (et les trésors que l’on trouve parfois) pour se faire de l’argent. Mais ça n’est pas là où se trouve l’unique moteur du jeu. Entre la gestion du chalutier, sa navigation, l’exploration, l’optimisation de l’inventaire, tout est évolutif et maintient notre intérêt. Ce qui est aussi renforcé par l’ambiance et la qualité de la direction artistique de DREDGE.
Avec des phases de pêche et d’exploration totalement libres, on prend rapidement du plaisir à errer en mer et tout cela est donc accentué par le travail réalisé sur l’environnement : des graphismes aux accents minimalistes et une direction artistique et des personnages qui vont parfois chercher du côté de Dishonored avec ce style entre peinture et croquis. Quelque chose que l’on retrouve dans ces deux univers qui lient pêche et fantastique et cela n’aurait pas été surprenant d’ailleurs d’apprendre que l’aventure de DREDGE se déroule directement dans l’univers de Dishonored, tant l’aspect pêcherie maudite, pouvoirs et malédiction ne se retrouve dans aucun autre titre. Un travail qui implique aussi les musiques et l’ensemble de la conception sonore, rendant la navigation vite angoissante lorsque la nuit tombe.
On se dépêche
Justement, le titre Black Salt Games a fait du cycle jour/nuit un élément capital de son gameplay. L’équipement du bateau comporte des emplacements : un pour le(s) moteur(s), un (puis deux) pour le matériel de pêche, et enfin donc un pour la lumière. Pour être certain de tenir dans l'obscurité et plus globalement face aux obstacles imprévus qui peuvent impacter la navigation, il vaut mieux avoir une lampe de qualité et de préférence ne pas trop s’éloigner sous peine d’être peu à peu rongé par la folie (on reviendra sur cet aspect dans la dernière partie). Le temps est donc compté.
La lumière, comme chaque équipement, peut être améliorée auprès de la charpentière, dans la ville principale, la Grande Moelle, ou de la marchande ambulante dans les autres zones du jeu. Cela passe par des projets d'amélioration qui nécessitent un certain nombre de pièces précises : au départ, il s'agit surtout de planches, de morceaux de ferraille et de tissu. Une fois complété, cela va augmenter les emplacements de matériel de pêche transportable, les lumières installables, la place pour les moteurs ou tout simplement la taille de l'inventaire. Cela a son importance, car tous les poissons et objets n'ont pas la même forme et il faudra optimiser au mieux l'espace de stockage à la manière d'un Tetris. La marchande ambulante et la charpentière vendent aussi de l'équipement, un catalogue d'objets qui sera plus complet à mesure que l'on débloque des recherches.
L’autre aspect de la gestion du bateau dans DREDGE, c'est bien sûr la pêche elle-même. La mécanique de pêche est assez simple : un curseur se déplace dans un cercle, ou une barre, ou d’autres formes, cela va dépendre de ce que vous êtes en train de pêcher et il faut cliquer au bon moment pour faire progresser la vitesse de pêche. Meilleurs sont vos cannes ou votre matériel de drague, meilleure sera votre vitesse de pêche. Ce qui a son importance, car comme je le disais plus haut, il y a ce fameux cycle jour/nuit. Le temps passe rapidement lors de ces phases et on peut facilement se retrouver éloigné des côtes alors que la nuit tombe. Même si en réalité, pêcher de nuit peut être pertinent puisque certains poissons ne sont disponibles qu'à ce moment-là. On peut aussi passer par des casiers à mettre à l’eau et où il faut ensuite revenir au bout d’un jour ou plus afin d’en récupérer le contenu (principalement des crustacés).
Pour le suivi, on possède une encyclopédie où sont consignés les poissons obtenus, s’ils sont disponibles le jour, la nuit ou les deux, dans quelles zones on les trouve et surtout à quelle profondeur. En effet, on ne peut pas pêcher n’importe où, il faut rechercher des bancs de poissons et selon l’endroit, le matériel requis n’est pas le même. Il y a 7 catégories et certaines cannes ou dragues (des filets pour racler le fond marin) sont dédiées à des catégories précises, là où d'autres en font plusieurs à la fois. À noter qu’on ne peut pas changer de matériel comme ça, il faut se trouver dans un lieu de repos. Au-delà de la profondeur à laquelle il faut pêcher, la question de la zone géographique a aussi son importance : selon là où l’on se trouve sur la carte (consultable à tout moment via la cabine ou avec la touche M), les poissons ne sont pas les mêmes. Quelque chose dont on se rend vite compte à mesure que l’on explore les mers et qu’on s’éloigne de la Grande Moelle et de la Petite Moelle, les deux villes de départ voisines.
Le pouvoir de la drague
Tout ce gameplay est évidemment inscrit dans un cadre narratif. DREDGE possède un fil conducteur, une quête principale qui démarre après la découverte d’un artefact mystérieux. Un homme solitaire, le Collectionneur, nous renseigne sur ce dont il s’agit et nous demande de partir à la recherche de 5 autres objets. Ceux-ci sont répartis dans chacune des zones principales que comporte le jeu : Au centre Les Moelles, au nord-ouest, Rive Retorse et sa mangrove labyrinthique, au nord-est l’Échine du Diable et ses ruines dangereuses, au sud-ouest, le Bassin des Astres et ses lagons faussement paradisiaques, et enfin les Falaises de Soufflevent et ses passages restreints. Chacune de ces zones possède des lieux d’intérêts où l’on peut se reposer et passer la nuit, mais aussi rencontrer des personnages nous proposant parfois des quêtes secondaires. Ceux-ci peuvent nous en apprendre plus sur le monde de DREDGE ou nous offrir des objets nécessaires pour l’amélioration du bateau. Pas de problème d’oubli, puisqu’un tableau dans le menu permet de suivre les quêtes en cours et celles déjà accomplies.
La narration n’occupe pas une place centrale dans le jeu et les quelques interactions avec des PNJs ne font donc que contextualiser l’univers. Cela suffit pourtant largement à expliciter ce qu’on pouvait déjà facilement deviner : l’aspect lovecraftien du titre. Cela passe forcément par la fascination pour la mer et ce qu'elle renferme, la quête des mystérieux objets à l’aura inexplicable, l’existence d’un culte oublié ou encore la présence d'autels cachés à compléter. Mais c’est aussi dans la manière de représenter la peur. Lorsque la nuit tombe, notre personnage est vite affaibli, et plus il reste en mer dans le noir, plus il est soumis à des hallucinations et attaques mentales, allant jusqu’à faire apparaître des créatures marines terrifiantes attaquant le chalutier. C’est aussi la complétion de l’encyclopédie qui passe par la pêche d’abominations, c'est-à-dire des versions corrompues et malsaines de poissons qui apparaissent aléatoirement.
C’est d’ailleurs grâce à cela que DREDGE bénéficie en plus d’une durée de vie intéressante. On est poussé à l’exploration par l’envie de remplir toutes les entrées de l’encyclopédie comme on pourrait le faire dans Pokémon pour le pokédex. Un objectif qui a un autre intérêt, car certains autels cachés, sans rapport avec la quête principale ou quelconque quête secondaire, demandent des poissons précis pour être activés. Plus l’encyclopédie est complétée, plus il est simple de savoir quelles créatures marines sont requises. Un moyen de faciliter la recherche des derniers secrets du jeu et de son monde.
DREDGE a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur et est prévu pour sortir le 30 mars 2023. Il sera également disponible sur PlayStation 4 et 5, Nintendo Switch et Xbox Series.
Il y a encore des détails sur lesquels j’aurais pu m’attarder, comme les pouvoirs que l'on récupère à mesure que l'on ramène des artefacts ou les meilleures combinaisons de matériels. Mais c’est aussi pour vous donner envie de vous intéresser à DREDGE. Je n’ai pas spécialement de points négatifs à noter, si ce n’est peut-être un léger manque de PNJ et de lieux et un bateau qu'on aurait aimé personnalisable visuellement. Cela reste un coup de cœur comme je le disais directement en introduction, qui plaira forcément aux adeptes de la chasse au 100 % mais pas qu’à eux. Un jeu étonnamment prenant, qui jongle parfaitement entre pêche et aventure, avec une narration simple, mais efficace et des objectifs secondaires et cachés qui donnent envie de poursuivre l'exploration. Et même, pourquoi pas, plus tard, avec de nouvelles zones ?
Les + | Les - |
- Univers à explorer librement | - Manque peut-être un peu de vie en mer |
- Gestion du bateau et son équipement | - Pas de personnalisation visuelle pour le bateau |
- Rend la pêche vraiment intéressante | |
- Ambiance et direction artistique |
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