Cette fois-ci dans Partie Rapide, Shift vous parle de Hell is Other Demons, un shooter en arène nerveux et Fanny vous parle de Tales of the Neon Sea, un jeu d’enquête teinté de puzzles douteux.
Hell is Other Demons
Hell is Other Demons est le premier jeu du tout jeune studio Cuddle Monster (le monstre câlin), composé d’un seul membre : le suédois Hannes Rahm, répondant au doux pseudonyme de Kebabskal. Des kebabs, des câlins et un jeu dont l’acronyme sonne comme un début de yodel, il n’en fallait pas beaucoup plus pour me convaincre.
Tournent les démons
Mon premier contact avec HiOD (eleï… oui, j’arrête tout de suite) ne s’est pourtant pas hyper bien passé, puisque je m’attendais à un shooter 2D en scrolling horizontal et qu’il s’agit en réalité d’un shooter en arène, le but étant de dézinguer tous les ennemis du niveau arrivant vagues après vagues. Déception. Déception oui, mais heureusement de courte durée, reprenons dans l’ordre, voulez-vous. Hell is Other Demons nous met dans la peau d’un petit démon, ressuscité pour mener la révolution en enfer, flingue à la main. Pas beaucoup d’autres explications : à l’instar de DOOM, on est pas là pour causer, mais pour déboulonner du démon.
On a ici affaire à du shooter extrêmement classique : cinq zones, chacune possédant un certain nombre d’arènes, un magasin pour améliorer son équipement et un boss de fin. Classique, certes, mais extrêmement efficace. Les armes sont d’une réactivité et d’un punch assez fantastiques, les divers pouvoirs et améliorations – activables et désactivables entre chaque niveau – permettent un panel de configurations et styles de jeu très étendu, les quelques capacités (qui s’étoffent en cours de partie) répondent au doigt et à l’œil, chaque combat, chaque arène donne lieu à des affrontements au rythme et à la nervosité parfaitement maîtrisés.
Bien que variés, les niveaux ont eux aussi un sacré goût de déjà-vu : pas une seule mécanique ne semble nouvelle. On découvre sans surprise les pièges, lasers, explosifs, plateformes mouvantes et autres éruptions, avant de comprendre la philosophie du titre. Ici on invente rien, on le fait juste extrêmement bien. Il en va de même pour les boss : hormis un moment de bravoure plus qu’appréciable (je vous laisse la surprise), on reste sur du très connu et il ne faudra pas beaucoup de temps pour en comprendre tous les patterns. Sûrement un peu plus pour les exécuter dans le bon ordre et remporter la bataille en revanche, car les boss ne sont pas que démesurés, ils tapent proportionnellement.
L’enfer est pavé de bonnes intentions
En plus des arènes (qui constituent le gros du jeu) et des boss, on trouvera également quelques niveaux Endless composés de vagues infinies d’ennemis, parfaits pour farmer, tester de nouvelles combinaisons d’armes et compétences et, on ne va pas se mentir, poster son score en ligne pour se la péter (ou pas, y a de sacrées brutes dans les high scores). S’ajoute enfin à tout ça un mode Arcade, qui a le bon goût de ne pas recycler les niveaux de l’histoire, mais d’en proposer des inédits, le tout avec des configurations d’armes et pouvoirs aléatoires, qui marchent parfois tellement bien qu’elles peuvent ensuite donner des idées pour la campagne. Une réelle bonne surprise.
Mais ce n’est rien comparé à mon vrai coup de cœur, qui se trouve être (ne vous moquez pas), la finition et les menus du jeu. Ça paraît bête comme ça, mais ça ne vous arrive jamais dans les productions indés (ou plus grosses d’ailleurs), de ronchonner contre une option manquante, un menu pas clair, une interface pétée ou obscure ? Moi tout le temps, mais peut-être je suis relou. Quoi qu’il en soit, Hell is Other Demons m’a terriblement conquis en pensant à tout, avec ses multiples options, sa possibilité de changer son équipement sans avoir à repasser par la carte ou encore ses menus élégants, tant de petites attentions qui ont su toucher mon cœur de joueur aigri.
Ce qui m’a moins touché comme petite attention, et j’avais un peu préparé le terrain là dessus, c’est la difficulté des boss et de certains niveaux, qui – à moins d’être très très bon – vont nécessiter une grosse dose de farm dans les niveaux précédents ou Endless. Assez gonflant, surtout quand on se rend compte que certaines compétences sont quasiment indispensables pour battre un boss, et que celles-ci coûtent assez cher. Autre détail agaçant, c’est ce tutoriel extrêmement incomplet qui n’apprend que la moitié des mouvements possibles, laissant le soin aux textes aléatoires des temps de chargement d’enseigner le reste. Pas ouf de réaliser au bout de 2h de jeu qu’on pouvait planer. Ceci dit, je dois bien reconnaître que ce sont les seuls reproches que j’aurais à adresser au jeu, tant il brille sur les autres points.
Sans la moindre originalité, mais également sans presque aucun raté, Hell is Other Demons est un shooter extrêmement efficace, que ce soit dans ses combats, sa structure, son interface, son esthétique ou son ambiance sonore. Pour moins de 10€, et à condition de se farcir la plate-forme Kartridge de Kongregate (en attendant la sortie Steam – EDIT : ça y est, il y est dispo depuis ce début de semaine), vous avez là une valeur sûre, pour peu que vous soyez sensible au genre.
Tales of the Neon Sea
Esthétique néon-cyberpunk et jeu d’enquête, c’est généralement un cocktail gagnant pour moi. Le jeu de Palm Pioneer avait donc en théorie toutes les cartes en main pour me séduire et me laisser une excellente impression. Mais c’était sans compter sur son monde générique, qui dépeint une cohabitation difficile entre humains et robots, où l’on se retrouve à incarner un détective privé, parfait archétype de l’ancien flic torturé. Alcoolique avec un imperméable usé et un chapeau sombre, hanté par une sombre affaire de meurtres en série et qui se retrouve à accepter une enquête qui fera remonter à la surface des souvenirs enfuis au plus profond de son esprit embrumé par la bouteille. En lisant ça, normalement, vous commencez à avoir peur. Et vous pouvez : Tales of the Neon Sea n’est qu’un ramassis de clichés qui n’est pas sauvé par ses rares instants brillants.
Herbe à chat
Tout n’avait pas si mal commencé : on enquête sur le meurtre d’une vieille femme, on retrouve ses anciens copains flics au bar, on a quelques discussions sympathiques avec les habitants de la ville et le gameplay, sans être absolument révolutionnaire, était passable. Parfois, on avait même de bons moments, comme lorsqu’on jouait un chat qui se retrouvait dans des intrigues entre gangs de félins modifiés génétiquement et qui finissait par emmener tout ce beau monde se défoncer à l’herbe à chat dans la maison de son humain. Le scénario n’était pas extrêmement développé mais hey, ce n’était que le premier chapitre, on pouvait leur pardonner.
Et puis arrive le deuxième chapitre et tout s’effondre : il semblerait qu’à ce moment-là, le studio se soit rendu compte qu’ils n’avaient pas assez d’histoires à raconter pour donner au joueur le sentiment qu’il avait bien dépensé ses 14€. Alors chaque petite action nécessite des allers-retours interminables et de résoudre un puzzle nul. Pour leur défense, une partie de ces moments agaçants ont été corrigés dans une mise à jour, avec certains puzzles carrément supprimés. Mais je n’ai pas découvert ces changements dans les meilleures conditions : il se trouve que je me suis retrouvée bloquée une semaine dans le chapitre 2, à cause d’une action essentielle que mon personnage refusait de faire. Et quand ce fut enfin corrigé, la mise à jour apportait des modifications tellement importantes qu’il était nécessaire de refaire toute une partie du chapitre pour pouvoir continuer. Si vous avez déjà lu mes critiques, vous savez que la patience n’est pas mon fort et Tales of the Neon Sea l’avait déjà bien poussée à bout.
Mauvais achat
Car oui, plus qu’un jeu d’enquête, vous aurez compris que Tales of the Neon Sea est finalement plus proche du puzzle game, bien que ce ne soit pas vraiment flatteur pour tous les autres jeux du genre de le mettre dans la même catégorie. Et jouer à une bêta glorifiée n’est déjà pas bien plaisant mais les choses empirent quand elle est teintée de la compilation des pires puzzles et mécaniques du jeu vidéo.
Je veux dire, qui n’aime pas faire ce fameux mini-jeu des serrures à crocheter, dans une version où la précision doit se faire au millimètre près ? Ou encore des puzzles où la logique ne compte pas, puisqu’il n’y en a pas et que la personne chargée de répondre sur Steam se contente d’indiquer qu’effectivement, c’est beaucoup de « trial and error » ? Ah mais ai-je raconté cette petite heure passée à faire des allers-retours à bouger des plateformes et une batterie ? Parce qu’à part les puzzles dédiés à crocheter des serrures, ils n’ont même pas l’avantage d’être cohérent avec l’idée que l’on se fait des actions d’un détective privé, on en arrive à modifier totalement les systèmes d’une ville de façon peu subtile alors même que l’on n’enquête pas vraiment officiellement.
Et je ne vais pas mentir : je n’ai pas fini ce jeu. Déjà, parce qu’il n’est pas fini lui-même, vu qu’ils ont rajouté au dernier moment que cette sortie ne concernait que les chapitres 1 à 3 et que le reste arriverait à l’automne, gratuitement. Et surtout, les 3h à répéter encore et toujours les mêmes actions pour avancer d’à peu près dix minutes dans le scénario ont fini par m’achever et je ne me sentais pas le courage de m’infliger ça dans un chapitre entier.
Tales of the Neon Sea a été testé sur PC via une clé fournie par l’éditeur.
Tales of the Neon Sea est une nouvelle victime de l’injonction très commerciale faite aux jeux vidéo, qui veut qu’ils aient un bon rapport quantité/prix pour « valoir le coup ». Malheureusement, ici, cela a des conséquences inverses : là où avec quelques heures en moins, il aurait pu être une petite aventure sympathique grâce à quelques dialogues plutôt bien écrits et malgré des mécaniques peu inspirées, il se transforme en corvée, avec une foire de puzzles plus génériques et mal implantés les uns que les autres. Et je n’ai pas parlé des erreurs de traduction dans le décor, sans parler de celles dans les dialogues, des nombreux bugs et autres joyeusetés. Bref, tant que Tales of the Neon Sea ne choisit pas d’avoir le chat qui aiderait son humain un peu stupide dans ses enquêtes en personnage principal, il n’est absolument pas à recommander.
Shift
Camélidé croisé touche de clavier et militant pro-MS Paint. J'aime les jeux indés à gros pixels, les platformers sadiques et les énigmes.
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